Depuis deux ans, le Ministère de l'Intérieur s'est doté d'une direction du numérique en lieu et place d'une DSI, les moyens accordés à la lutte contre la cybercriminalité ont augmenté et, d'une manière générale, la place du numérique s'est accrue dans la maison du « premier flic de France ». Dans cette logique, le projet de loi d'orientation et de programmation du Ministère de l'Intérieur (Lopmi) pour la période 2022-2027, adopté en Conseil des Ministres le 16 mars 2022, comporte de nombreuses dispositions relevant du numérique, soit pour lutter contre la cybercriminalité, soit pour améliorer l'efficience des agents du ministère. Quelques dispositions peuvent s'avérer problématiques du point de vue de la préservation des données personnelles. Pour l'heure, la présentation disponible du projet relève surtout de souhaits. Le budget annoncé est de 773 millions d'euros sur 5 ans.

Les trois premières dispositions présentées relèvent des moyens de lutter contre la criminalité via le numérique. Ainsi une Agence du numérique des forces de sécurité (ANFS) va gérer l'équipement des forces de l'ordre (caméras-piétons, caméras embarquées dans les véhicules, terminaux numériques...), un « cyber-17 » (service d'urgence à contacter en cas de cyber-attaque) va être créé et une force de 1500 cyber-patrouilleurs va être formée et déployée « pour repérer et punir les crimes et délits en ligne ». De plus, le dépôt et le suivi numériques des plaintes vont être améliorés, y compris dans les « espaces d'accueil » (les commissariats) et via la nouvelle app « Ma Sécurité » lancée le 7 mars. « 300 fonctionnaires et contractuels de haut niveau pour mettre en oeuvre les projets numériques indispensables au ministère » vont par ailleurs être recrutés. La cybersécurité et la lutte anti-drones feront l'objet d'investissements importants.

Si tous les policiers et les gendarmes seront qualifiés d'officiers de police judiciaire, le projet de loi implique des conséquences potentiellement gênantes avec une présomption d'habilitation des agents à accéder aux fichiers de police. Dans le passé, plusieurs scandales d'accès inappropriés et abusifs voire de revente de données par des agents indélicats ont pourtant eu lieu. La mesure « déployer des drones, en appui opérationnel ou pour le recueil de renseignement » fera sans doute également tiquer, d'autant que ce déploiement sera notamment opéré dans le cadre de la protection des frontières. Rappelons qu'une disposition légale manque toujours pour permettre un tel déploiement, au grand regret du Préfet de Police de Paris.