Fournisseur historique sur le marché des disques durs, avec Seagate et Toshiba, Western Digital fabrique toujours des unités de stockage de grande capacité pour les PC, serveurs et baies de stockage. Des disques durs SAS et SATA, mais également des SSD SATA et NVMe, ainsi que des JBOD  (just bunch of disk) et des baies de stockage NVMe-over-Fabrics OpenFlexLe patient meccano DCS initié en 2008 avec plusieurs acquisitions stratégiques - HGST pour les disques durs de classe entreprise, Amplidata pour le stockage objet, Fusion IO pour l’accélération flash, SanDisk pour les JBOD et plus récemment Tegile pour les baies flash-a toutefois été abandonné fin 2019 avec la cession de Tegile Systems à DDN en septembre 2019 et ActiveScale (issu d’Amplidata) à Quantum en février 2020. En développant toutes ces solutions fichiers, objets et blocs, Western Digital était devenu le concurrent direct de ses clients/fournisseurs (Dell, HPE, NetApp, PureStorage et autres) qui travaillent tous avec plusieurs sources d’approvisionnement. Une situation difficile à tenir et qui nécessite de mobiliser un grand nombre de ressources pour développer et commercialiser des solutions très techniques.

 

Marc Bonnet est technologist, EMEA field engineering chez Western Digital. (Crédit WD)

La firme de San José reste toutefois un acteur clef dans le domaine du stockage de classe entreprise avec différentes gammes de produits et “des innovations verticales depuis les composants jusqu’aux systèmes”, nous a expliqué lors d’un entretien Marc Bonnet, technologist, EMEA field engineering chez Western Digital. “Nous avons, par exemple, un brevet Artic Flow pour l’optimisation et la réduction de la température moyenne des disques durs”. Cette innovation apporte deux flux d’air dans le châssis pour éviter une zone d’air chaud autour du disque dur. Dans la gamme disques durs pour les entreprises, WD propose les Ultrastar à 7200 t/m pour les datacenters avec des modèles hélium et classique en SAS à 12 Gbit/s et SATA à 6 Gbit/s offrant jusqu’à 20 To (SMR). “Nous ajoutons 15% de capacité tous les ans, nous sommes ainsi passés de 14 à 16 puis 18 To”, nous a indiqué Marc Bonnet. Un disque dur 20 To (SMR) est déjà commercialisé l’Ultrastar DC HC650. Les mêmes produits se déclinent ensuite vers le bas pour le marché des NAS avec des ajustements au niveau du firmware : les WD Red à 5400 t/m et les Red Pro à 7200 t/m. Les modèles à 10 000 t/m ont disparu du catalogue pour être avantageusement remplacés par les SSD.

Scellé à l'hélium pour réduire les vibrations des plateaux, l'Ultrastar DC550 propose une capacité de stockage de 18 To en SAS et SATA. (Crédit WD)

Sur le marché des SSD, Western Digital, qui fabrique ses propres contrôleurs, est associé à la société Kioxia, anciennement Toshiba Memory, pour la fabrication de composants NAND flash. “Les SSD deviennent plus abordables, mais si on regarde l’évolution des tarifs, les prix ne vont pas se croiser [avec les disques durs].  Dans les datacenters, la croissance de la flash est plus rapide, mais cela ne veut pas dire que la flash va remplacer les disques durs. Les disques durs restent une technologie d’avenir pour les données tièdes et froides”, avance Mar Bonnet. “Les données dynamiques vont plutôt sur la flash qui est la bonne réponse. Les disques durs et la flash travaillent ensemble”. En 2019, le marché était évalué à 20 milliards de dollars et la croissance est importante avec une augmentation des données créées avec l’IoT et d’autres activités, nous a expliqué le responsable.

Des ventes flash à développer dans les entreprises

Au deuxième trimestre 2021, les revenus de Western Digital ont dépassé les attentes grâce à des ventes solides en disques durs et SSD. Cependant, cette bonne performance met également en évidence la faiblesse persistante de WD dans deux domaines clés - les disques durs et les SSD de classe entreprise, où le fournisseur a pris du retard sur la concurrence. WD a généré un chiffre d'affaires de 3,93 milliards de dollars avec un bénéfice net de 62 millions pour le trimestre clos le 31 décembre 2020. Les revenus de l’activité disques durs représentent 1,9 milliard de dollars, en baisse de 20%, et celles de la flash ont grimpé de 10,7% pour atteindre 2,03 milliards de dollars. Le numéro de livraison de l'unité de disque dur de WD était de 25,7 millions, en baisse de 22%.

L'activité de WD se divise en trois segments : Data Centre Devices and Solutions qui pèse 807 M$, en baisse de 46% d’une année sur l’autre; Client Solutions (Retail) avec un chiffre d’affaires de 1,005 Md$, en hausse de 6%; Client Devices (PC et terminaux) enfin avec des revenus de 2,13 Md$, en augmentation de 19%. Les performances en retrait de l’activité entreprise chez WD s'expliquent par deux raisons. Seagate a livré plus de disques durs 16 To de classe entreprise que WD et l’activité SDD reste encore modeste avec une part de marché de 1% sur le marché des datacenters selon une estimation du cabinet d’études taiwanais Trendforce. WD devrait donc faire beaucoup mieux dans les mois qui viennent sur ce dernier marché d’autant que le cabinet note que “les clients des segments serveur et datacenter n'ont pas encore redémarré les achats à grande échelle même si leurs stocks sont généralement revenus à un niveau sain”.

Des certifications en bonne voie

Pour les disques durs, Aaron Rakers, analyste chez Wells Fargo, explique dans une note confidentielle que les livraisons de disques durs ont représenté une capacité totale de 71,2 Exaoctets pour Seagate, 56/57 Exaoctets pour WD et 17,4 Exaoctets chez Toshiba au quatrième trimestre 2020. D’une année sur l’autre, Seagate affiche une hausse de 45%, WD une baisse de 20%, Toshiba une augmentation de 19%. Pour les SSD, toujours selon l’analyste, les certifications pour les modèles NVMe de seconde génération (PCIe 4) sont en bonne voie pour les serveurs et baies de stockage, les ventes devraient donc suivre et rattraper celles des concurrents.

Taillé pour les datacenters, le SSD DC ZN540 est équipé du jeu d'instructions ZNS pour améliorer l'utilisation de la NAND flash. (Crédit WD).

Toujours sur le marché des SDD flash, WD segmente le marché de deux façons : performance et endurance. “Quand on augmente l’endurance, on augmente la performance”, assure Marc Bonnet. Rappelons que le fournisseur ne produit désormais que des composants NAND flash 3D de cinquième génération (+40% en densité avec la QLC) avec des produits haut de gamme en NVMe double ports et la technologie Zoned Name Space (ZNS). Le jeu de commandes ZNS, ratifié par le consortium NVMe Express, optimise la phase d’écriture sur la NAND pour lisser l’usure de la flash. Les lecteurs exploitant ce set d’instructions - comme le DC ZN540 chez WD - bénéficient d’améliorations significatives par rapport aux SSD NVMe conventionnels : réduction de l'amplification d'écriture côté lecteur, ce qui améliore le débit et les latences, réduction de l'utilisation de la DRAM côté lecteur, limitation du surprovisonnement et amélioration du nombre d'écritures par jour. Pour travailler plus efficacement, les SSD NVMe ZNS exposent un ensemble de zones dans un Namespace NVMe, où chaque zone doit être écrite séquentiellement et réinitialisée explicitement, de la même manière qu'avec les disques durs SMR. Un blog de Western Digital détaille précisément cette technologie et ses emprunts au SMR.

Des lecteurs mais également des baies 

Terminons ce portfolio avec la dernière baie composable OpenFlex du fournisseur : la F3200 avec NVMe-oF sur Ethernet. Déjà adopté par les principaux fournisseurs de solutions de stockage flash, le NVMe-oF apporte les performances de systèmes DAS sur un réseau partagé ou dédié. Le NVMe est un protocole de communication - et un contrôleur associé - extrêmement rapide conçu pour la NAND flash et exploitant la bande passante du bus PCIe. Les SSD NVMe délivrent de meilleures performances (un nombre d’IOPS plus élevé par cycle CPU) et une latence plus réduite (quelques microsecondes) que les SSD exploitant les interfaces SATA et SAS. Le NVMe over Fabric offre les mêmes avantages en termes de performance que le NVMe interne, mais hors de la baie en déployant le protocole sur un réseau LAN Ethernet.

Le F3200, baie de stockage lames 3U – propose une capacité maximale de 61,4 To et des performances élevées (voir tableau ci-dessous). En Ethernet, chaque F3200 prend en charge deux ports QSFP28 50 Gbit / s. On obtient ainsi une capacité de latence extrêmement faible et une bande passante très élevée sur le réseau. Un seul appareil OpenFlex F3200 fournit jusqu'à 2,2 millions d’IOPS et 11,7 Go par seconde de débit, avec une latence de moins de 40 microsecondes. Parmi les fonctionnalités supportées par la baie F3200, citons : la possibilité de répliquer les environnements de stockage à distance via le pilote DRBD, le support de Virtual Data Optimizer (VDO) pour supprimer les données redondantes, l'utilisation d’une API ouverte QCP standard pour gérer le device, le support de la mémoire persistante locale (PMEM) en tant que cache face à un volume NVMe-oF, le tiering des données, la réplication longue distance asynchrone de (plusieurs) volumes par expédition de snapshots contigus à des fins de reprise après sinistre. Un déploiement en DAS est également envisageable avec un contrôleur SAS remplacé par une carte NIC.

Ce rapide tour d’horizon, technologique et financier, montre que Western Digital est toujours très engagé dans les solutions et les unités de stockage à destination des entreprises. “Le marché est très prolifique, il faut faire des choix avec les équipes marketing pour aller. Notre stratégie adresse les plus grosses parties du marché du stockage”, nous a confié Marc Bonnet. “Les produits sont conçus chez WD pour exploiter au mieux nos composants avec, par exemple, les Ultrastar pour les JBOD et les serveurs de stockage avec capacité […] alors que le NVMe a complètement ouvert le marché avec beaucoup d’innovation et une sophistication extrême de la technologie”.