Les 3 et 5 mars derniers, des tests des premières caméras intelligentes équipées du logiciel Cityvision de Wintics ont été menés lors des concerts du groupe Depeche Mode à l’Accor Arena de Bercy, l’objectif étant de vérifier leur bon fonctionnement et leurs possibilités techniques avant une mise à l’échelle lors des prochains Jeux Olympiques et Paralympiques. Attention, selon Quentin Barenne, co-fondateur de Wintics, les algorithmes embarqués dans les caméras sont surtout là pour analyser les situations comme des bagarres, des objets abandonnés, la présence d’armes, les mouvements de foule, des problèmes de circulation ou encore le franchissement de zones interdites. Au total, 8 types de situation sont détectés depuis une salle de contrôle dédiée mais, en aucun cas, les caméras sont exploitées à des fins de reconnaissance faciale pour rechercher un individu suspect par exemple. « Notre logiciel n’est pas adapté pour la reconnaissance faciale, techniquement, il analyse que des silhouettes en visualisant une forme et qu’il associe à un objet. Notre outil ne regarde pas du tout ce qui se passe au sein de la silhouette », précise Quentin Barenne. N’oublions pas qu’il y un an l'Assemblée nationale a voté un projet de loi sur la sécurité liée aux JO dont l'utilisation de la vidéosurveillance alimentée par l'IA, un projet validé par le Conseil constitutionnel sous deux conditions : une autorisation préfectorale pour un mois renouvelable et une interdiction des techniques de reconnaissance faciale ou de biométrie.  

Et après les JO ? 

Bien sûr, la CNIL reste attentive, elle a fait de la thématique des usages des caméras dites augmentées un axe prioritaire de son plan stratégique 2022-2024. Cela se traduit par la mise en œuvre d’une série d’actions qui comportent un accompagnement des acteurs privés et publics, mais aussi la réalisation de contrôles ; la CNIL était d’ailleurs présente lors des tests des concerts de Depeche Mode. Le ministère de l’Intérieur indique que d’autres tests auront lieu avant les JO d’ici cet été. De son côté, l’AN2V (Association nationale de la vidéoprotection), un think tank qui regroupe 150 membres (intégrateurs/installateurs, éditeurs, constructeurs, etc.) suit de près cette loi d’expérimentation surtout au niveau des usages, en cause des contraintes juridiques et éthiques importantes autour de la vidéoprotection et de l’IA. « Les technologies sont matures et ouvrent à toutes les possibilités, en revanche, nos membres se posent plein de questions juridiques et éthiques. C’est par exemple dans cette optique que nous avons créé un groupe de travail autour des usages de l’IA dans la vidéo et que nous avons ainsi pu démontrer pas moins de 180 usages », souligne Dominique Legrand. Bien plus que les 8 usages expérimentés lors des tests. Il y aura évidemment des analyses et des conclusions suite au retour d’expérience grandeur nature des JO. Quelles seront les décisions prises par la suite sur l’usage de ces caméras intelligentes, va-t-on les utiliser de manière permanente pour d’autres événements ou au quotidien ? Une chose est sûre, avec l’usage de ces caméras augmentées, les pouvoirs publics souhaitent ne pas revivre le fiasco de la finale de la Ligue des champions de football le 28 mai 2022 aux abords du Stade de France.  

Pour les JO 2024, on ne connaît pas précisément le nombre de caméras intelligentes qui seront opérationnelles. Le dirigeant de Wintics ne le communique pas et ce n’est pas de son ressort mais celui du ministère de l’Intérieur. Une chose est sure, le logiciel Cityvision équipe principalement des caméras fixes et non pilotables, son système d’analyse travaillant sur des champs fixes. « Et pour cause, notre technologie fonctionne avec un système de calque, si la caméra bouge, ce calque ne sera plus bien positionné. A titre indicatif, la ville de Paris a déployé, il y a une quinzaine d’années, énormément de caméras fixes puis, il y a 6 ans, 7 ans, une vague de caméras pilotables a été installé, maintenant les caméras déployées sont hybrides », conclut Quentin Barenne. Ce qui donne aussi une idée du potentiel de caméras qui peuvent être équipées de ce logiciel.