Peu écoutée par les pouvoir publics français dans son combat contre la massification des achats de l'Etat, la FEB (Fédération de l'Equipement de Bureau et de la Papeterie) porte l'affaire devant la Commission Européenne. Le syndicat professionnel a déposé plainte devant l'institution le 18 octobre dernier pour aides d'Etat présumées illégales. Juridiquement, son action se fonde sur les articles 107 et 86 du traité de l'Union Européenne. Le premier prohibe « dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.» Quant au second, il interdit à une entreprise d'exploiter une position dominante sur le marché commun.

Dans les deux cas, la FEB vise l'action de l'Etat en faveur de l'UGAP, la centrale d'achat public. La réglementation permet en effet aux collectivités locales d'y recourir sans passer d'appel d'offres. Elles y sont d'autant plus encouragées en raison de la complexité des procédures du nouveau code des marchés publics. Le tout, au détriment des PME dont près de 2000 adhèrent à la FEB, notamment dans les secteurs de la bureautique et de l'informatique.

Objectif : gagner la bataille de l'opinion

Désormais entre les mains de la direction générale du marché intérieur à Bruxelles, la plainte a toutefois peu de chance d'aboutir à une condamnation de la France, selon la FEB. En effet, le système qu'elle conteste ne crée pas de distorsion de concurrence entre Etats membres. Conseillée par une agence de lobbying, la FEB cherche en fait à donner plus d'écho médiatique à son action et influer ainsi sur les pouvoirs publics français. Car pour l'heure, ceux-ci font la sourde oreille. C'est notamment le cas des services de François Baroin et d'Hervé Novelli dont les réponses n'ont pas satisfait la FEB.

Parallèlement à l'action qu'elle mène auprès de la Commission européenne, la FEB poursuit un travail plus discret. Il passe, par exemple, par l'organisation d'un débat à l'assemblée nationale auquel vont assister des sénateurs, des députés et des représentants des maires de France. Le syndicat professionnel tire également la sonnette d'alarme auprès de ses homologues tels que la FICOME (Fédération Interprofessionnelle de la Communication d'Entreprise). Sensibilisée elle aussi par la FEB, la CGPME devrait quant à elle organiser une réunion entre les fédérations patronales qui pourraient souffrir de la politique de massification des achats de l'Etat. « Les premiers appels d'offre nationaux lancés par le Service des Achat de l'Etat concernaient les métiers de certains de nos membres, la papeterie et la bureautique. Il est normal que nous ayons été les premiers à réagir. Aujourd'hui, d'autres professions comprennent qu'elles sont exposées », explique Delphine Cuynet, la secrétaire générale de la FEB.

Les constructeurs ont leur part de responsabilités

Le prochain marché concerné devrait être celui de l'informatique avec l'imminence d'un important appel d'offres. Le 26 novembre, la FEB a donc pris l'initiative de réunir des groupements de revendeurs informatiques dans ses locaux parisiens. « Ils adhèrent totalement à nos actions contre le SAE et l'UGAP, juge Delphine Cuynet. En outre, nous avons comparé, catalogue en main, les prix des matériels informatiques proposés par l'UGAP et ceux des revendeurs informatiques. Nous avons trouvé des tarifs jusqu'à trois fois moins importants chez l'UGAP ». Assurément, les constructeurs ont une part de responsabilité qui a courroucé les membres de la réunion au point qu'ils évoquent la possibilité de boycotter certains d'entre eux.

A force d'activisme, la FEB semble toutefois avoir marqué quelques points dans son combat. En amont du lancement de l'appel d'offres qu'il prépare dans l'informatique, le Service des Achats de l'Etat a en effet contacté les représentants de la FEB. Dans le but, peut-être, de commencer enfin à prendre en compte ses réclamations ?