Et ce ne sont pas les critiques émises hier par la Commission européenne qui feront sourciller la préposée à la Culture française. Dans une longue lettre adressée à l'exécutif hexagonal, Bruxelles a fait la liste de ses observations sur le contenu de la loi Création et Internet. La Commission pose ainsi de nombreuses questions, notamment sur l'absence de proportionnalité entre le but - protéger les droits d'auteur et droits voisins - et les moyens - suspendre l'accès à Internet. En coupant l'abonnement au Web des internautes récalcitrant, l'Hadopi ne respecterait pas la directive européenne « service universel » qui impose aux Etats l'obligation de garantir l'accès de tous à Internet, ne serait-ce qu'en bas débit. Autre grief : en ne permettant pas aux internautes qui recevront les messages d'avertissement précédant la coupure de leur accès, le projet de loi français « pourrait mettre en danger le droit fondamental à un procès équitable ». Le calme avant la tempête Les admonestations bruxelloises n'ont certes pas de caractère contraignant pour Paris et ne remettent donc pas en cause le projet de loi Création et Internet. Elles viennent cependant rappeler, une nouvelle fois, que la Commission ne signera pas de blanc-seing à la France. Le Parlement réexaminera l'amendement 138 en deuxième lecture - Guy Bono assure qu'il déposera à nouveau un texte, peut-être encore plus précis et virulent que le premier - et l'adoptera sans aucun doute. Or, le texte final, qui sera adopté en 2009 par les 27, sera le fruit d'un compromis entre les eurodéputés et le Conseil, sous l'arbitrage de la Commission. Cette dernière a déjà fait état de ses réserves et le Conseil ne subira plus l'influence de la France, qui ne présidera en effet plus l'Union européenne et aura laissé sa place à la République Tchèque. Le retrait, hier, de l'amendement 138, pourrait donc n'être qu'un répit laissé à la France avant que l'Europe ne vienne définitivement contrarier le principe de la riposte graduée.