L'opérateur français a remporté le mercredi 19 septembre le procès dans l'affaire de peering l'opposant à Cogent, un opérateur transitaire. En effet, l'autorité de la concurrence a émis un avis favorable qui pourrait changer le trafic de données sur les réseaux internet en France, autorisant Orange à être rémunéré pour l'ouverture de nouvelles capacités de réseau.

Pour comprendre les dessous de l'affaire, il est nécessaire de comprendre ce qu'est le peering. Orange, qui possède avec Open Transit son propre opérateur transitaire, effectuait des échanges de trafic avec Cogent, qui gère le transport de données entre continents européen et américain.

L'opérateur français transporte ainsi les paquets de l'opérateur américain et inversement. Ce type d'offre demande une certaine équité dans la gestion des paquets, afin que les services d'un des opérateurs ne soient pas bloqués par une trop grande congestion du réseau de l'opérateur.

Or début 2011, « le site MegaUpload - qui a été depuis fermé par la justice américaine - était client de Cogent et envoyait aux abonnés d'Orange, via Cogent, un trafic très significatif (jusqu'à 13 fois supérieur à celui entrant)  dû aux vidéos téléchargées par les internautes, » commente l'autorité de la concurrence. L'autorité ajoute que « constatant une forte dissymétrie de trafic à son détriment, supérieure au ratio arrêté dans sa politique de "peering",  France Télécom a souhaité être rémunérée pour l'ouverture de capacités supplémentaires d'interconnexion. »

Une logique commerciale confirmée

Cogent avait alors déposé une plainte à l'autorité de la concurrence contre Orange en mai 201. Néanmoins, l'autorité estime que la demande d'Orange « n'était pas susceptible de constituer une infraction dans la mesure où France Télécom n'a pas refusé l'accès de Cogent à ses abonnés - elle  a d'ailleurs ouvert gratuitement, et à plusieurs reprises, entre 2005 et 2011, de nouvelles capacités pour répondre aux demandes de Cogent - mais a simplement demandé à être payée conformément à sa politique de "peering", pour l'ouverture de nouvelles capacités, sans remettre en cause la gratuité pour les capacités déjà ouvertes. »

De plus, le contrat signé en 2005 entre Cogent et France Télécom précisait la facturation pour l'ouverture de capacités nouvelles si le « trafic sur le réseau était 2,5 fois supérieur à celui sortant » ce qui justifie à leurs yeux la demande de France Télécom. Dans le même temps, l'opérateur avait investi dans le développement de ses liens, les faisant passer de 2 gigabits en 2005 à 70 Gigabits.

Néanmoins, l'autorité de la concurrence a reproché l'opacité des relations entre Orange et Open Transit. En effet, selon l'autorité de la concurrence, « l'absence de formalisation des échanges internes au groupe France Télécom entre ces deux entités rend difficile le contrôle d'éventuelles pratiques de ciseau tarifaire ou même de discrimination et rend par conséquent plus facile la mise en oeuvre de telles pratiques. »

Une jurisprudence pour d'autres affaires

Cette décision pourrait avoir une grande importance dans les mois à venir. En effet, dans un autre cas Free avait pesté en fin d'année 2011 contre la lenteur de connexion à Youtube, lenteur dont l'entreprise française rend responsable Google. Ainsi, Xavier Niel rappelait dans une interview au Nouvel Obs que « effectivement, il y a un problème. Les tuyaux entre Google et nous sont pleins à certaines heures, et chacun se repousse la responsabilité de rajouter des tuyaux. C'est un problème classique qui arrive partout, mais plus souvent avec Google. »

Dans un billet sur son blog, Alain Bazot, président de l'UFC Que Choisir, a souligné que « sans l'établissement de règles claires, les problèmes d'interconnexion (peering) entre les différents acteurs, dont sont victimes les consommateurs, risquent d'exploser. »