L'agence de presse financière Bloomberg affirme qu'Apple chercherait une solution pour se passer des puces Intel dans ses prochains ordinateurs Mac et les remplacer par ses propres puces ARM, comme ce qu'il fait avec l'iPhone et l'iPad. Selon l'article de Bloomberg, qui cite « des personnes proches du département de recherche de l'entreprise », les ingénieurs de la firme sont convaincus que les puces utilisées par Apple dans ses appareils iOS seront suffisamment puissantes pour faire tourner Mac OS X dans des iMac et des MacBook. D'après ces sources, il est peu probable qu'Apple abandonne les processeurs d'Intel dans « les prochaines années », mais selon les ingénieurs, cette évolution est «inévitable». En effet, étant donné que les terminaux mobiles et les ordinateurs sont de plus en plus semblables, ils estiment qu'Apple sera amené à intégrer ses propres processeurs dans ses appareils.

Au cas où la firme de Cupertino décidait de s'éloigner d'Intel, le fabricant de processeurs en serait affecté. Le fondeur subit déjà la stagnation du marché des ordinateurs sous Windows et souffre de son manque de présence dans l'industrie mobile. L'éloignement d'Apple pourrait également conduire d'autres fabricants à abandonner Intel et à développer leurs propres processeurs. « Apple est un pionnier. Le constructeur a commencé à produire ses propres puces, et d'autres pourraient suivre son exemple », a déclaré Sergis Mushell, analyste chez Gartner. « Si la mobilité devient demain plus importante que la fonctionnalité, le contexte va complètement changer ». Fin octobre, Apple a procédé à un remaniement de ses équipes dirigeantes. Parmi les changements, l'équipe Technologies d'Apple dirigée par Bob Mansfield, dont le travail de recherche est centré sur la conception de puces, a fusionné avec  le groupe des semi-conducteurs, lequel, selon le communiqué d'Apple  « a des projets ambitieux pour l'avenir ». Une appréciation qui pourrait aussi laisser entendre qu'Apple envisage de s'éloigner d'Intel.

Un divorce qui laisse sceptique les analystes

Mais certains analystes et experts ne sont pas convaincus qu'Apple sera en mesure de quitter son fondeur attitré. « C'est une affaire très technique, et la vraie question est de savoir si Apple pourra faire aussi bien qu'Intel en terme de vitesse et de traitement graphique », a estimé Tim Bajarin, analyste chez Creative Strategies. « Actuellement, je n'en suis pas sûr ». Selon Achraf Eassa, analyste chez Seeking Alpha, il est important de comprendre qu'il y a une grosse différence entre la conception d'un micro-processeur haute performance et celle d'un processeur basse consommation, de faible performance. « Intel a des années d'expérience, et investit depuis longtemps dans de nouvelles techniques pour fabriquer des micro-processeurs haut de gamme performant. Elle doit juste transformer cette expérience et la transposer dans la fabrication d'un enveloppe thermique plus économe en énergie», écrit l'analyste.

« A l'inverse, ARM - et ses licenciés - doivent trouver des techniques inédites pour atteindre un niveau de haute performance tout en conservant l'avantage énergétique ». Achraf Eassa estime qu'il est peu probable qu'Apple réussisse à fournir le rendement et les avantages technologiques procurés par Intel pour justifier une telle stratégie. En 2006, Apple avait choisi d'intégrer les processeurs d'Intel dans ses matériels, pour remplacer la puce PowerPC d'IBM.

Ce n'est pas la première fois que des spéculations autour d'un changement possible de processeur chez Apple font surface. Au mois d'octobre, Bloomberg a rapporté qu'Apple avait « discuté de l'opportunité de se passer des puces d'Intel dans le Mac », et d'autres articles parus par la suite sur le site de l'agence de presse ont réaffirmé sa conviction concernant les projets d'Apple en matière de processeur. Certes, ces dernières rumeurs ne sont pas dénuées de sens. Apple a l'image d'une entreprise qui veut contrôler son destin. Le constructeur a créé ses propres machines et logiciels, il a toujours protégé son « jardin », y a introduit ses propres écosystèmes, comme l'iTunes Store et l'App Store. Plus récemment, l'entreprise de Cupertino a pris davantage contrôle de la conception de ses processeurs. La puce A6 qui équipe l'iPhone 5 est construite selon une architecture processeur à base d'ARM imaginée par Apple, à la différence des noyaux ARM standards intégrés dans les premiers terminaux sous iOS.

Des évolutions douloureuses pour Apple

Cependant, c'est une chose de concevoir un processeur différent, mais dont le logiciel reste compatible avec les designs existants, et une autre d'opter pour un noyau radicalement nouveau. Dans le passé, Apple a déjà fait deux transitions de ce genre avec le Macintosh. Une première fois, quand il a migré des processeurs 68000 de Motorola vers l'architecture PowerPC conçue par IBM et Motorola, et une autre fois quand il est passé du PowerPC à l'architecture Intel. Dans les deux cas, la transition ne s'est pas faite sans douleur, mais à chaque fois Apple a conservé un avantage : la technologie d'émulation a permis de continuer à faire tourner les anciens systèmes et les anciennes applications sur la nouvelle CPU. Lors du passage aux processeurs Intel, ceux-ci étaient tellement plus rapides que les processeurs PowerPC, que le fontionnement en mode émulé n'entamait pas les performances.