En direct de Barcelone. 15 jours avant l’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver à Pyeongchang (du 9 au 25 février 2018), en Corée du Sud, les équipes d’Atos, le partenaire informatique du Comité Olympique, sont toutes sur le pont. La gestion de ce projet a en fait démarré il y a cinq ans avec, pour cette édition, un passage de grande envergure sur les technologies cloud. 340 personnes à Madrid (pour les tests) et surtout à Barcelone (pour la production) sont mobilisées pour assurer la gestion du SOC et la supervision de la plateforme utilisée par la Comité Olympique pour l’enregistrement et la diffusion des compétitions sportives (vidéos live et à la demande fournies aux chaînes TV et web), la gestion des accréditations (200 000), la publication en temps réel des résultats et l’intranet mis à la disposition du Comité Olympique et des journalistes. Les 35 000 bénévoles mobilisés pour l’organisation de l’événement sportif sont ainsi gérés par les outils développés et déployés par Atos. Pour faire le point sur cette plateforme PaaS, nous avons rencontré l’équipe supervision des opérations à Barcelone.

Comme nous l’a expliqué Patrick Abida, directeur général en charge de l’olympisme et des événements majeurs chez Atos, « nous avons commencé à désigner et tester l’utilisation d’une plateforme cloud aux Jeux d’été de Rio, et nous l’avons complètement déployé pour Pyeongchang ». Marta Sanfeliu, directrice des opérations (COO) de l'olympisme et des événements majeurs d'AtoS nous a expliqué plus précisément le découpage des solutions déployées depuis le Brésil. « A Rio, nous avons commencé par porter nos applications dans un cloud privé opéré par Umbrella, un opérateur telco local, à la demande du comité d’organisation. Il s’agissait encore de tests. Aux Jeux Olympiques d’Hiver à Pyeongchang, nous avons basculé ces applications dans notre Canopy Cloud et nous discutons déjà avec le comité en charge des Jeux de Tokyo pour passer ces applications à un modèle cloud natif ».

Patrick Abida, directeur général en charge de l’olympisme et des événements majeurs chez Atos, ici avec Angel Martin, directrice générale des mêmes activités en Espagne. (Crédit S.L.)

Une plateforme cloud privée vBlock 

Aujourd’hui, les services cloud privé sont installés sur des systèmes Dell EMC vBlock hébergés dans deux datacenters aux Pays-Bas (primaire et secondaire avec synchronisation active/active pour une reprise instantanée en cas d’incident majeur) en mode multitenant exclusif pour le Comité Olympique. « Les applications doivent rester indépendantes de l’infrastructure et nous avons adopté Cloud Foundry pour étudier le passage des VM aux containers aux Jeux Olympiques de Tokyo en 2020 », a précisé la COO. Les applications seront alors complémentent distribuées avec une architecture cloud native. Interrogée sur la résistance aux changements, la COO a répondu que la maturité IT n’était pas la même dans les différents pays organisateurs. « Nous sommes dans un mode partenaire avec le CIO, nous cogérons l’innovation, ce qu’il faut implémenter ou pas », a indiqué Patrick Abida.

« Nous sommes d'ailleurs la mémoire des Jeux avec un historique des problèmes qui nous permet de les anticiper et d’apporter des solutions », assure le responsable. Ce qui est aujourd’hui possible en Corée du Sud ne l’était pas auparavant. Atos, comme le Comité Olympique, doit toutefois se plier aux législations en vigueur sur la protection des données. Pour les Jeux Olympiques d’hiver à Pékin en 2022, la SSII ne pourra pas travailler depuis la Hollande si elle veut respecter les lois chinoises sur l’hébergement des données. Et si on regarde encore plus loin, les Jeux Olympiques d’été à Paris en 2024 [la fin de la concession accordée à Atos], « la plateforme cloud actuelle est appelée à évoluer. Mais nous sommes cloud agnostique et nous commencerons à travailler sur les Jeux de Paris en 2020 avec le comité local » nous a précisé le COO.

Marta Sanfeliu, directrice des opérations de l'olympisme et des événements majeurs d'Atos, compte passer aux applications cloud natives en 2020 à Tokyo. (crédit : S.L.)

Des ressources locales limitées 

« Assurer le bon fonctionnement des Jeux est une opération complexe ; nous assurons l’intégration de toutes les technologies à l’exception du ticketing et du contrôle andidopage », indique le dirigeant français. « Ce qui est nouveau à Pyeongchang, c’est que nous faisons tout à partir du cloud en limitant les ressources locales. Nous n’avons plus besoin de réinventer à chaque fois les ressources IT, nous pouvons désormais réutiliser l’existant en proposant des services plus souples grâce au cloud ». Toutes les ressources locales n’ont toutefois pas disparu, des serveurs sont toujours déployés sur place à Pyeongchang pour collecter et enregistrer les résultats sportifs fournis par Omega et assurer le lien avec les ressources cloud hébergées aux Pays Bas. « Les résultats sont par exemple enregistrés et doublement contrôlés mais tout le traitement des données est assuré aux Pays-Bas », nous a précisé Marta Sanfeliu. Les deux principales plateformes applicatives des JO – Olympic Management System (OMS) et Olympic Diffusion System (ODS) – sont hébergées aux Pays-Bas sur le Canopy Cloud d’Atos. Akamai fournit toutefois un service CDN au Comité Olympique pour assurer la fluidité des retransmissions vidéos.

La sécurité occupe aujourd’hui une part très importante dans le cahier des charges d’Atos, surtout avec les menaces des cyberhackers russes qui sont bien décidés à perturber les Jeux Olympiques d’hiver suite à l’expulsion du Comité Olympique russe pour cause de dopage d’État aux Jeux de Sotchi. « Nous devons faire face à plus de 400 incidents par seconde et ce n’est absolument pas possible pour un opérateur humain de suivre et traiter ces menaces. Nous avons donc automatisé le monitoring et le traitement », nous a expliqué Patrick Abida. Le SOC de Barcelone travaille 24 heures sur 7 pour assurer le bon fonctionnement des opérations à Pyeongchang. L’équipe est déjà sur place en coordination avec la dizaine de personnes envoyées en Corée. « Les Jeux Olympiques d’hiver ne sont pas plus compliqués – même avec la neige – que les Jeux d’été [les épreuves sont toutefois moins nombreuses tout comme l’audience], mais il faut gérer différemment la logistique », a relevé le dirigeant. Si Atos assure la gestion des ressources informatiques des Jeux Olympiques, la SSII travaille aussi pour les Jeux Panaméricains et d’autres grands événements sportifs, un peu partout dans le monde.