Le calcul quantique et ses qubits n'a pas fini de faire parler de lui. Avec des promesses attendues que d'aucuns annoncent comme exceptionnelles, les ordinateurs quantiques sont cependant pour l'heure loin d'être dans les tuyaux de toutes les entreprises et laboratoires de recherche. Aux Etats-Unis, un acteur comme D-Wave - financé par Google, la Nasa et la NSA - fait à ce titre partie des pionniers en ayant annoncé la disponibilité d'une solution qubit 1024 pour de la reconnaissance d'images. En France, on en est encore loin. Mais cela ne veut pas dire que les travaux de recherche sont au point mort. Bien au contraire.

Présentée au forum Teratec 2016 par Thierry Mandon, secrétaire d'Etat à l'enseignement supérieur et à la recherche, comme une priorité de recherche pour la France, la technologie quantique est ainsi bel et bien dans les tuyaux des plus grands laboratoires de recherche du pays. A commencer par le CEA qui, sous l'impulsion de Daniel Esteve et son équipe d'une vingtaine de chercheurs, mène depuis plusieurs années des recherches qui vont aller en s'accélérant. « Le calcul quantique n'est pas encore un mode de calcul en production mais il se présente comme un mode de calcul de rupture par rapport à tout ce que l'on connaît », nous a expliqué Jean-Philippe Bourgoin, directeur de programme nanosciences au CEA.

Le calcul quantique en complément plutôt qu'en remplacement

A terme, l'équipe de Daniel Esteve devrait d'ailleurs connaître une sérieuse expansion pour atteindre 200 personnes, ce qui en dit long sur les ambitions du CEA en la matière, sur un total de 11 000 chercheurs. « Ce nombre paraît petit mais il est loin d'être négligeable par rapport à d'autres efforts du CEA », nous a précisé Jean-Philippe Bourgoin. « Pour l'instant les travaux en calcul quantique sont orientés sur de la compréhension fondamentale et sur des recherches autour de capteurs permettant de tirer parti du calcul quantique. On travaille sur des technologies à l'origine de la photonique avec le laboratoire Leti ainsi que sur des simulateurs quantiques. » Des travaux et des recherches qui restent loin d'être utilisables pour des projets en production, le CEA ne préférant pour l'heure pas avancer de date de mise en oeuvre.

« Il n'y a pas aujourd'hui de visibilité sur un remplacement des technologies de calcul actuelles par du quantique, mais plus sur des machines spécialisées en complément », fait savoir Jean-Philippe Bourgoin. Même son de cloche chez le Genci, qui ne voit pas dans son radar de débouchés concrets avant 2020. « On a une approche d'évaluation sur des nouvelles technologies de type Exascale comme l'approche Intel many coeur ou celle d'OpenPower », nous a confié Stéphane Requena, responsable innovation du Genci. « Le calcul quantique est adapté à des types de problématiques que l'on peut simplifier, mais pas pour tous les problèmes complexes car par nature, on traite seulement avec le quantique de l'algorithme simple. Cela n'empêche pas d'être une solution d'avenir et de rupture même si ce n'est pas la seule », analyse Stéphane Requena. « Il faudra compter aussi avec les technologies nanotubes de carbone, de arséniure de gallium et d'autres métaux afin de ramener la gravure à des finesses encore plus basses comme du 4 nm », conclut Stéphane Requena.