L’agilité est un bon indicateur d'une stratégie digitale réussie, car le fait de pouvoir s'adapter aux nouvelles exigences de son activité avec aplomb peut permettre à un détaillant de maintenir ses marges. C’est le cas de Dick's Sporting Goods, qui a pu, grâce à sa stratégie digitale évolutive, s’adapter rapidement aux contraintes imposées par la pandémie, quand le coronavirus a frappé en mars, le revendeur s'efforçant de servir ses clients en respectant la distanciation sociale. Peu après avoir fermé ses 800 magasins en avril, la chaîne d’articles de sport a modifié sa stratégie « Click and Collect » d'achat en ligne suivie de la collecte en magasin (BOPIS ou Buy On line and Pick Up In Store) pour la remplacer par une collecte sans contact, à la porte de ses magasins.
Le principe est assez simple. Les clients font leurs achats en ligne sur le site de commerce électronique de Dick’s et choisissent le magasin dans lequel ils souhaitent récupérer leurs achats. Dès que la commande est prête, le client reçoit un courriel et peut se rendre en voiture devant la boutique. A son arrivée, le client se signale avec son smartphone en indiquant la marque et le modèle de son véhicule. En quelques minutes, un employé sort de la boutique avec la marchandise et la place dans le coffre du client. Tout se passe sans contact physique, puisque le client reste dans sa voiture. Ce changement à la volée a permis à Dick's de mieux résister à la première vague de la pandémie, ce qui n’a pas été le cas de nombreux détaillants du Fortune 500 qui ont subi une forte baisse de leurs activités. Malgré la mise en congé d'un grand nombre de ses 40 000 employés en avril, Dick's a mis rapidement en place de petites équipes pour prendre en charge cette collecte sans contact à la porte de ses magasins. L'entreprise a mieux résisté que d'autres qui ne pouvaient pas ou ne voulaient pas aller à la rencontre des clients.
Une base numérique qui porte ses fruits
« C’est en 2018 que la chaîne d'articles de sport a jeté les bases de cette collecte sans contact et d'autres services conviviaux en adoptant une stratégie de transformation digitale 2.0 », a expliqué Jason Williams, vice-président de la technologie client. « Les besoins de Dick’s en matière d’infrastructure sont semblables à ceux des autres détaillants du Fortune 500 : l’entreprise devait déployer une technologie pour continuer à servir ses clients », a encore expliqué Jason Williams, qui a dirigé pendant huit mois l’an dernier l'initiative en tant que directeur technique par intérim de Dick's. « La stratégie était de se concentrer en priorité sur le client et de croire que les revenus suivraient », a-t-il ajouté pour qualifier les choix 2.0 de Dick's. La philosophie 2.0 de Dick’s tenait compte aussi des comportements d'achat des consommateurs qui ont eu le temps de ses familiariser avec les canaux numériques ces dernières années. Depuis plus de deux décennies, les consommateurs utilisent chez eux des ordinateurs pour acheter des produits sur Amazon.com et d'autres sites de vente en ligne, mais ces dernières années, ils utilisent de plus en plus des tablettes informatiques et des smartphones. Avant tout, ils privilégient la facilité d’usage.
C'est pour cette raison que les revendeurs ont fait en sorte de leur offrir une expérience « omnicanale » qui comble le fossé logistique entre la vente dans les espaces en dur et le monde en ligne. Quel que soit le support, le commerce doit être transparent. Le « Click and Collect » est un exemple de cette expérience omnicanale, mais son attrait réside dans la capacité des consommateurs à se rendre au magasin le plus proche, le plus rapidement possible, pour y récupérer les marchandises qui leur ont été réservées. Cette expérience a obligé Dick's à reconfigurer ses magasins en « mini-centres de distribution », pouvant stocker autant de marchandises les plus demandées que l'espace le permet. « Nous voulions faire en sorte que tout ce que nous proposions puisse aider le sportif à faire ses achats tant en magasin qu’avec la technologie », a expliqué M. Williams. « Le défi était de savoir comment rendre les outils plus rapides et plus fiables ».
Du cloud hybride et de l’open source pour composer une pile moderne
Pour fournir ce nouveau service de collecte, Dick a modernisé sa pile technologique. Surtout, il a adopté une stratégie de cloud hybride qui lui permet de traiter des charges simultanées et de basculer vers un autre fournisseur de cloud si nécessaire. « Nous traitons le matériel comme une chose éphémère. Nous ne nous préoccupons pas de savoir si une application fonctionne sur un cloud public ou privé », a expliqué M. Williams. Des équipes produits composées de gestionnaires, de concepteurs, d'ingénieurs et d'autres membres clés du personnel créent des applications et des micro-services dans les logiciels de Google et de Microsoft. Ces équipes, qui sont récemment passées du développement par projet au développement par produit pour rationaliser la livraison des logiciels, ajoutent de nouvelles solutions et fonctionnalités en tenant compte des notes de satisfaction des clients et d'autres indicateurs clés de performance.
Dick's s'appuie également sur des composants open source qui lui permettent de « financer l'avenir » sans se ruiner, comme l’a déclaré M. Williams. Par exemple, le revendeur s'appuie sur une base de données NoSQL de Redis Labs pour soutenir sa plateforme de commerce électronique. « Redis a remplacé IBM WebSphere Commerce, devenue « fragile » et manquait totalement de flexibilité », a expliqué pour sa part Jay Piskorik, directeur de l'ingénierie des plates-formes chez Dick's. Le logiciel Redis NoSQL prend en charge les changements en quelques minutes, contre plusieurs jours dans l'environnement précédent », a ajouté M. Piskorik. Dick’s a fini par passer à Redis Enterprise, un service plus robuste qui confère à l'entreprise une plus grande résilience et lui permet de répliquer plus facilement les données.
L’importance d’une collecte sans contact
Si plusieurs marques populaires comme J. Crew, J.C. Penney et d'autres ont déposé leur bilan à mesure que l’on avançait dans la période estivale et des va-et-vient de la pandémie, la plupart des magasins Dick's ont rouvert. Toutes les marques qui ont survécu ont adopté des mesures de distanciation sociale. Elles ont adopté un marquage au sol pour rappeler aux clients de respecter la circulation à sens unique. Leurs terminaux de paiement sont protégés par des séparations en plastique. Et, dans les files d'attente des caisses, des affiches demandent aux personnes de rester à un mètre de distance les uns des autres. Selon Brendan Witcher, analyste de Forrester Research, dans un monde où les canaux numériques drainent un volume croissant de ventes au détail, la capacité de Dick’s à servir des clients habitués à faire leurs achats via les canaux de leur choix se démarque des autres.
Selon l’analyste, avant la pandémie, le « Click and Collect » (BOPIS) représentait 14 % des achats des clients auprès des grandes surfaces, contre 16 % pour les ventes directes en ligne. Même s’il est difficile d’apprécier avec précision le succès de la collecte à la porte des boutiques, ou de savoir si la tendance se poursuivra dans un monde post-pandémie, M. Witcher affirme que les détaillants qui offrent cette possibilité seront récompensés par la satisfaction des clients. La mise en place d’une collecte en extérieur des magasins reposant sur un système solide et connecté avant le mois de septembre pourrait être un facteur de différenciation essentiel pour les détaillants. « Ceux qui ont adopté un système de collecte en extérieur avant les autres peuvent s’estimer chanceux », a déclaré Brendan Witcher.
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