Cette semaine, le co-CEO d'Atlassian s'est excusé auprès des utilisateurs de HipChat et de Stride lesquels n’ont pas apprécié la décision de l’éditeur australien de mettre fin au support de ses applications de chat en équipe. Fin juillet, ce dernier a vendu la propriété intellectuelle de ces actifs à Slack pour un montant qui n’a pas été rendu public. En contrepartie, Atlassian - qui possède également une gamme d'outils de collaboration commerciale, dont Jira, Confluence et Trello – s’est engagé à investir dans Slack. L'annonce intervient moins d'un an après le lancement de Stride. Si le produit avait été bien accueilli, il n’a pas réussi à s’imposer face à de gros concurrents comme Slack, Microsoft, Facebook et autres.

« La décision a été difficile et je peux vous assurer que nous ne l'avons pas prise à la légère », a déclaré Mike Cannon-Brookes, co-CEO d'Atlassian, lors de la conférence des utilisateurs organisée pendant l’Atlassian Summit de Barcelone (2 au 5 septembre). « Au lieu de continuer à investir dans ces produits, nous avons décidé de former un partenariat avec Slack dont les produits de messagerie et de communication ont acquis une forte popularité », a-t-il déclaré. « À long terme, je suis sûr que c'est le bon choix pour tous nos clients. Mais à court terme, je reconnais que c'est une nouvelle très perturbante pour ceux qui utilisent HipChat ou Stride, et je m'en excuse. Il faudra que vos équipes migrent leurs données ».

 

La plateforme Stride d’Atlassian passée dans le giron de Slack. (Crédit : Atlassian)

Colère des utilisateurs

Si la décision d'abandonner ces produits a été bien accueillie par les investisseurs, beaucoup d’utilisateurs ont exprimé publiquement leur colère sur le forum communautaire de l’éditeur. Un membre de la communauté trouve la décision « plutôt stupide » et demande « pourquoi mettre fin à des produits encore très utilisés dans les entreprises », ajoutant que certains utilisateurs « ne veulent pas, ou ne peuvent pas utiliser Slack ». Larry Cannell, directeur de recherche chez Gartner, estime aussi que « cette décision va impacter de nombreux clients d'Atlassian, en particulier ceux qui utilisent la version sur site de HipChat ». Pour le cofondateur Scott Farquhar, le choix d'abandonner les produits était nécessaire pour permettre à l’entreprise de se concentrer sur d'autres secteurs de croissance. « La décision de mettre fin à la vie d'un produit n'est jamais facile à prendre, surtout quand on a passé l’équivalent de centaines d'années-personnes à le développer. Et si l’on compare les deux produits, je dirais même que Stride est meilleur que Slack », a-t-il déclaré à nos confrères de Computerworld pendant la conférence de Barcelone.

« Je veux pouvoir regarder mes collaborateurs dans les yeux et leur dire qu’ils travaillent sur des produits qui ont un impact significatif dans le monde. Mais nous savons aussi que le meilleur produit ne gagne pas toujours ». À propos de la décision, celui-ci a déclaré qu’elle avait reçu « un accueil mitigée » parmi les utilisateurs de Stride et de HipChat, ceux utilisant déjà Slack étant plus optimistes. M. Farquhar a ajouté que les clients ont le temps de préparer leurs migrations et de choisir leur nouvelle plate-forme. « Notre politique garantit un support de deux ans après la fin de vie d’un produit, quel qu’il soit. Les clients peuvent donc utiliser Stride ou HipChat pendant deux ans et se préparer à basculer sur une autre plateforme ».

Acquisition de JiraOps et d'OpsGenie

Les produits Stride et Hipchat Cloud arriveront en fin de vie le 15 février 2019. Les clients de Hipchat Data Center et de Hipchat Server bénéficieront d'un support jusqu'à la fin de leur période de licence. « Les migrations ont déjà commencé », a dit M. Farquhar, sans donner de détails sur le nombre de clients qui avaient entamé le processus. Il a également précisé que, pour l’instant, aucun client n’avait demandé à migrer sur une autre plate-forme que Slack. La vente des outils de chat en équipe conclue par Atlassian a été assortie d’un « partenariat stratégique » avec Slack, lequel devrait se traduire par une plus grande intégration entre ses applications. Les outils d'Atlassian s'intègrent déjà à un grand nombre d’autres applications de chat en équipe, notamment avec Teams de Microsoft, la solution rivale de Slack. « Il y a des intégrations avec Slack et avec Microsoft Teams et nous continuerons à développer des intégrations pour tous ces produits. Mais si nos clients nous demandent par quoi remplacer Stride, nous leur dirons que Slack est le choix le plus évident ».

Parallèlement à la décision de quitter le marché du chat en équipe, Atlassian a indiqué qu’il se concentrerait davantage sur le service aux équipes IT et techniques en développant en particulier sa famille de produits Jira, un outil de gestion de projet destiné aux développeurs. Selon Scott Farquhar, CEO adjoint d'Atlassian, les équipes IT opérationnelles utilisent souvent plusieurs produits autonomes pour gérer les incidents. D’où le choix de l'entreprise de positionner son nouveau produit Jira Ops destiné à aider les équipes opérationnelles à faire face aux pannes logicielles comme une solution à guichet unique. « Jira Ops permet à lui seul d’intervenir, de résoudre et de s’informer sur un incident », a-t-il déclaré. Basé sur les processus de workflow de Jira, l’outil Jira Ops, plus spécialement dédié à la coordination des réponses, réunit les informations provenant de divers outils de surveillance, d'alerte et de communication dans un tableau de bord unique. « Historiquement, nous nous sommes concentrés sur les équipes de développement de logiciels », a aussi expliqué Scott Farquhar, faisant remarquer au passage que, depuis, les outils ont été adaptés par divers utilisateurs. « L’IT fait partie de ces équipes critiques. C'est aussi un domaine vers lequel nous avons été véritablement poussés par nos clients ». Selon Gartner, le marché des logiciels d’exploitation opérationnelle atteindra les 38 milliards de dollars d'ici 2022. Atlassian a également annoncé cette semaine son intention d'acquérir la société de gestion d'incidents OpsGenie pour 295 millions de dollars.