Une détection de fraudes qui est passée d'environ 20 millions par an au double. Grâce aux technologies d'IA, l'assureur Generali - près de 16 Md€ de chiffre d'affaires et 9 300 collaborateurs en France - est parvenu graduellement à renforcer ses capacités de détection des fraudes aux assurances et à structurer une communauté dédiée. Dès le milieu des années 2010, la direction indemnisation de l'assureur cherche à faire évoluer son système anti-fraude. Dans un contexte où l'entreprise affiche sa volonté de tirer parti de l'innovation, de la data et de la technologie. « Nous nous sommes dès lors posé la question de savoir comment appliquer cette transformation à l'item fraude », explique Laurent Jentrain, responsable de l'expérience client chez Generali France.

En 2016, l'assureur se tourne vers la solution de la start-up française Shift, un éditeur spécialisé qui mise largement sur l'intelligence artificielle. « Shift avait des scénarios sur étagères qui tournaient. Ils étaient déjà mûrs et avaient fait leurs preuves », indique Laurent Jentrain. La solution est d'abord appliquée à l'assurance automobile, sur laquelle Generali dispose d'un important patrimoine de données, avant de basculer trois ans plus tard vers un nouveau périmètre. « Nous nous sommes demandé où l'expertise de Shift pouvait être la plus utile, et avons basculé vers les sinistres de dommages aux biens, sur lesquels la solution embrasse désormais l'intégralité du périmètre : multirisques habitation, commerce, etc. », précise Thierry Cassagnères, directeur sinistres IARD standards & solutions. Puis, en 2020, la solution est exploitée en temps réel, via l'utilisation des alertes qu'elle émet. Objectif, selon Laurent Jentrain : « faire converger tous les faisceaux d'indices en un seul lieu pour pouvoir réagir plus vite ».

Trouver un équilibre entre l'IA et l'humain

Face au volume d'alertes ainsi générées, Generali doit toutefois revoir ses processus, pour trier et prioriser ces messages. « Derrière chaque dossier nous avons l'un de nos clients, et nous tenons à tout prix à protéger nos clients honnêtes », relève Laurent Jentrain. Autrement dit, pas question de laisser l'IA dicter ses décisions. « Nous aspirons à trouver l'équilibre entre l'IA et l'humain. Le recours à celle-ci n'a de sens que dans la mesure où elle booste la valeur ajoutée apportée aux gestionnaires chargés de prendre les dossiers en main », résume Thierry Cassagnères. Pour ce faire, Generali se fonde notamment sur les KPI produits par Shift.

En parallèle de la mise en place de la solution, Generali est parvenu à constituer une communauté de 70 à 80 personnes travaillant sur la problématique de la fraude, dont une trentaine exploitent Shift au quotidien. Tant et si bien que la société d'origine italienne envisage désormais la création d'un parcours spécifique de gestionnaires de fraudes au sein de ses métiers.

Détecter la fraude documentaire

La stratégie ainsi déployée livre des résultats probants puisque, après avoir doublé les montants associés à la détection de fraudes, Generali vise désormais les 50 M€ économisés en 2023. « Si l'intégralité de ces montants ne passe pas forcément par Shift, l'assurtech française a joué un rôle capital dans notre capacité à déceler la fraude et à la transformer en effet financier direct », souligne Thierry Cassagnères.

L'assureur entend désormais expérimenter ses technologies de détection de fraude sur d'autres activités - la santé et la prévoyance étant considérées comme des options possibles par Laurent Jentrain - ou enrichir son arsenal de solutions pour se lancer dans la détection de fraudes documentaire. Enfin, comme l'ensemble des acteurs manipulant de grands volumes de données et documents, Generali lorgne vers les technologies d'IA générative. « L'écosystème de l'investigation n'a jamais connu une telle effervescence, en matière de transformation, et nous envisageons de mettre en place une veille pour détecter avec un coup d'avance ce qui bouge au niveau des technologies, et peut se révéler utile à notre activité », indique Laurent Jentrain.