Après avoir enchainé plusieurs trimestres de recul sur son chiffre d'affaires (23), IBMcommencé à sortir la tête de l'eau depuis le début de l'année 2018. Si la partie systèmes - incluant hardware et OS - affiche une insolente croissance (+25% au 2e trimestre), c'est désormais bel et bien sur le cloud mais aussi surtout l'IA, blockchain et l'IoT que big blue veut accélérer. Pour illustrer ce changement de braquet, le fournisseur américain n'hésite plus à multiplier les exemples d'entreprises, en particulier françaises, ayant fait le choix de ses technologies, comme pour favoriser un effet boule de neige. A l'occasion de la 4e édition de son événement Think Paris ce 9 octobre, une ribambelle de cas d'usages - plus ou moins détaillés - utilisant des technologies et services IBM ont été mis en avant : Orange Bank (chatbot), Crédit Agricole CIB (automatisation de la lecture des rapports financiers et juridiques), Euromaster (service desk, gestion des mobiles et PaaS), la Sacem (gestion des droits d'auteur), L'Oréal (capteurs connectés pour l'industrie), Société Générale, BPCE et Carrefour (blockchain) ou, encore, la division Gares et Connexions de la SNCF (système centralisé des données de transport), un projet sur lequel nous reviendrons.

Outre la présentation de ces retours d'expérience, les différents porte-parole d'IBM qui se sont relayés tout au long de cette conférence plénière se sont, semble t-il, passé le mot pour placer l'humain, qu'il soit aussi bien collaborateur que client, comme pilier du développement des entreprises. « On passe d'une culture produit à l'expérience client », a ainsi lancé Nicolas Sekkaki, directeur général de la filiale française de big blue en préambule de la matinée. Un message réaffirmé, affiné, lors d'un point presse réalisé dans la foulée de la conférence plénière : « Nous avons un rôle de tiers de confiance avec les clients dans cette révolution technologique qui doit appuyer le rôle de l'humain augmenté », a précisé le dirigeant.

Un 4e trimestre de hausse consécutive pour IBM France

Depuis quelques mois, la firme d'Armonk a multiplié les annonces plaçant les hommes au coeur de sa stratégie, ce qui n'a pas toujours été le cas après la grave crise traversée par l'entreprise dans les années 90. « De 1992 à 1994, nous sommes passés de 400 000 à 200 000 employés pour 5 milliards de dollars de perte. En France, nous sommes passés sur Montpellier de 3 500 à 500 personnes », a rappelé Nicolas Sekkaki. Après avoir mangé son pain noir, la filiale française d'IBM a cependant fini par voir, enfin, le bout du tunnel. « Nous avons réalisé notre 4e trimestre consécutif de hausse avec un chiffre d'affaires en croissance de plus de 10%. L'année dernière, nous avons fait nos objectifs », poursuit Nicolas Sekkaki. Désormais remis en ordre de marche, la filiale présentera-t-elle un bilan de création nette d'emplois en France pour fin 2018 ? Le dirigeant veut en tout cas y croire : « J'espère qu'on sera positif », promettant de refaire un point sur cet objectif avant la fin de cette année.

Les initiatives d'IBM visant à revitaliser ses effectifs en France ne manquent pas. Au printemps dernier, la société a ainsi répondu - aux  côtés d'autres acteurs du secteur comme Accenture, Capgemini, Econocom ou encore Computacenter - à l'appel de la ministre du Travail Muriel Pénicaud de former des personnes en situation de reconversion professionnelle. « Nous avons un rôle et un devoir, au travers de la technologie, de ne pas laisser des gens sur le bord du chemin », a expliqué Nicolas Sekkaki. « Nous avons un volet sur l'inclusion qui nous amène à embaucher 400 personnes sur les 5 années qui viennent ». Ayant personnellement participé à un tour de table sur ce sujet à Lille, Nicolas Sekkaki, a fait part de son retour : « Nous avons eu l'exemple d'une personne de 50 ans dans le marketing et la communication dont la boîte a fait faillite et qui a suivi une formation de 6 mois dans Java, une aide-soignante qui s'est formée au Cobol ou encore quelqu'un qui a failli mal tourner, avec une personnalité, qui a finalement rejoint une équipe de hacking éthique », a raconté le dirigeant. « Il faut casser les idées reçues et les préjugés. Ce que les recruteurs et les entreprises doivent comprendre, c'est donner une chance d'exercer à des personnes qui font preuve d'appétence pour la connaissance d'un domaine ».

2/3 des recrutements concentrés sur 2 sites en région parisienne

Outre ce plan de formation, IBM France prévoit aussi des recrutements pour renforcer ses équipes en IA, blockchain et Internet des objets comme annoncé par la CEO du groupe Virginia Rometty, lors du dernier forum Tech for Good qui s'est tenu en France au printemps dernier, avec l'embauche de 1 800 personnes. « Nous adoptons un ancrage régional pour un rayonnement national », a indiqué Nicolas Sekkaki interrogé par la rédaction sur la ventilation de ces nouveaux effectifs d'ici les deux prochaines années. « Nous allons répondre à des appels d'offres dans différentes régions pour couvrir des besoins spécifiques locaux comme la deep tech en Occitanie, la digital fabrik à Bordeaux, la supply chain à Marseille, etc. » Plus spécifiquement, dans l'IA, le fournisseur compte aussi doper ses centres R&D avec notamment un 4ème centre sur le plateau de Saclay. Sans compter la multiplication des sites de ressources humaines dédiées à l'accompagnement de projets clients spécifiques, comme dans le cas du Crédit Mutuel. Ou encore, tout récemment, avec Generali pour lequel les ressources mobilisées appartiennent pour 1/3 au client, un autre tiers à IBM et le dernier tiers partagé avec l'écosystème partenaires.

« Sur les 400 personnes que nous allons embaucher dans l'IA, 120 ont déjà été recrutées à fin septembre et elles seront environ 200 d'ici la fin 2018 », a indiqué Nicolas Sekkaki. « On travaille à développer un écosystème autour du quantum computing avec des universités, des clients et des collectivités locales pour créer un hub quantique [...] Les recrutements s'effectuent pour 1/3 en provenance d'écoles d'ingénieurs et 2/3 d'écoles de commerce avec une proportion de 40% de femmes, avec 50% de gens expérimentés et 50% de nouveaux profils ». Concernant la répartition territoriale des embauches, 1/3 d'entre elles seront effectuées en région et les 2/3 sur l'Ile-de-France, sachant que sur ses 19 sites dans l'Hexagone, 17 sont en région. Ce qui amène à comprendre que 2/3 des recrutements effectués par IBM sont concentrés sur uniquement deux sites. « Le business en France est en étoile et passe toujours par Paris », explique Nicolas Sekkaki.