Début décembre 2010, Microsoft, Apple, Oracle, et EMC avaient informé l'organisme régulateur allemand de leur intention de créer le consortium CPTN Holdings en vue de l'achat de 882 brevets détenus par Novell. Mais le 30 décembre, le groupe dirigé par Microsoft a retiré sa demande d'autorisation sans fournir aucun motif aux autorités allemandes. Ces dernières semaines, l'Office fédéral des cartels allemand avait reçu des lettres et des recommandations de diverses organisations Open Source, notamment de l'Open Source Initiative (OSI) siégeant aux États-Unis et de la Free Software Foundation Europe (FSFE).

En effet, ces derniers s'inquiétaient vivement du fait que ces brevets, dont certains intègrent du code originel Open Source, puissent tomber entre les mains d'entreprises dont les produits sont en concurrence avec un logiciel libre. Compte tenu de l'engagement passé de Novell dans le développement du logiciel libre, il semble très probable que certains de ces brevets recouvrent des technologies utilisées dans le développement de plusieurs logiciels Open Source. « Les fondateurs et les dirigeants du CPTN portent avec eux une longue histoire attestant de leur opposition aux logiciels libres et de leur volonté d'en détourner la valeur, alors qu'ils sont au coeur de l'infrastructure de l'Internet et de la plupart des logiciels et des services parmi les plus répandus. De plus, la plupart du temps, les produits Open Source sont les seuls ou les principaux concurrents de produits représentés par les entreprises du consortium CPTN, » a déclaré l'OSI dans son courrier.

Des atteintes pour le développement du logiciel libre


Karsten Gerloff, président de la FSFE, écrit pour sa part que « sur de nombreux marchés comme ceux des systèmes d'exploitation, des suites de productivité bureautique, ou encore ceux des serveurs web, les logiciels libres sont les principaux concurrents à l'offre de Microsoft. D'ailleurs, l'éditeur de Redmond n'a pas manqué d'initier certains procès pour revendiquer la propriété intellectuelle de ces brevets et étouffer la concurrence du logiciel libre, comme cela a été le cas pour TomTom, et mène depuis longtemps une campagne ininterrompue pour revendiquer des droits infondés sur des brevets et instiller la peur, l'incertitude et le doute quant aux perspectives du logiciel libre. » Il ajoute encore que « le CPTN pourrait également décider de vendre les brevets à des tiers, pour les mettre en sommeil, afin d'empêcher leur utilisation. » Il rappelle aussi que « en septembre 2009, Microsoft avait vendu 22 brevets explicitement liés à GNU/Linux lors d'une vente aux enchères où seuls des participants triés sur le volet avaient été admis. »

La décision de retirer le projet peut être considérée comme une victoire pour les défenseurs de l'Open Source. Mais, selon certaines analystes, cela ne signifie pas qu'il ait été définitivement ajourné. A ce jour, Novell, en cours de rachat par Attachmate, a convenu d'une vente séparée de son portefeuille de brevets au CPTN pour un montant de 450 millions de dollars. Quant à Microsoft, l'entreprise n'a fait aucun commentaire au sujet du retrait du projet de consortium.