Présent dans 17 pays, le groupe SPB propose des services d'assurance autour des biens et usages de la vie quotidienne, aussi bien pour les professionnels que les particuliers. Il offre également des services de réparation, reconditionnement et recyclage de produits high tech et électroménager à travers sa filiale Save. Fin 2021, le groupe a lancé son portail d'API (application programming interfaces). Pour CIO, Patrick Rivière, DSI du groupe SPB, a expliqué comment ce projet s'inscrit dans la stratégie globale de l'entreprise, autour de l'assurance embarquée.
SPB opère en marque blanche, dans le cadre de partenariats tripartites entre le groupe, les assureurs et les marques qui distribuent les offres, ou les prestataires qui effectuent les réparations. Dans ce contexte, l'interopérabilité tient une place essentielle. « Historiquement, connecter une application à des services hébergés dans d'autres systèmes était difficile. Avec Internet sont arrivées les architectures orientées services et leur promesse d'interopérabilité, mais malheureusement celle-ci ne s'est pas réalisée jusqu'au bout, car les technologies étaient complexes et les instances de normalisation ont eu du mal à s'accorder », retrace Patrick Rivière. « C'est finalement l'architecture REST portée par les géants du Web qui a pris le relais, en proposant une vision plus simple par les API REST. Notre portail d'API s'inscrit dans cette approche, avec la volonté de simplifier l'opérabilité », poursuit le DSI.
Une stratégie d'entreprise
Comme le souligne Patrick Rivière, « Il ne s'agit pas d'un projet purement technologique. L'APIsation est une stratégie d'entreprise, portée par le métier. » Pour le groupe, l'objectif est d'attaquer son marché différemment, de concevoir des produits simples et de favoriser la mise sur le marché rapide des nouvelles offres. « L'assurance du futur, c'est l'assurance embarquée », explique Estelle Rouchon, directrice de la communication du groupe SPB. « Aujourd'hui, on peut souscrire une assurance chez son agent, chez un courtier ou en magasin, grâce à la technologie. Celle-ci démultiplie les canaux de distribution d'assurance, ouvrant la voie à de nouveaux canaux comme les objets connectés ou les plateformes d'auto-partage. D'ici 2030, les analystes du marché prévoient que 25% des contrats d'assurance de biens seront souscrits sous cette forme embarquée ».
Le portail répond à cette évolution du marché, en permettant à SPB de mettre son expertise à la disposition de son écosystème. À travers le portail, SPB publie ses API auprès de ses partenaires, afin que ceux-ci puissent facilement ajouter des fonctionnalités personnalisées dans leur parcours client, dans un modèle d'assurance-as-a-service. « Les développeurs de nos partenaires peuvent s'inscrire au portail. Ils obtiennent alors les informations nécessaires pour intégrer et consommer les API tout au long de leur cycle de vie. Ils peuvent découvrir et tester nos API en toute autonomie, chaque partenaire pouvant aller à son rythme et se concentrer sur son métier », indique Patrick Rivière. En bout de chaîne, cette ouverture va également bénéficier aux consommateurs, comme le souligne Fabrice Pesin, directeur général Assurances de SPB : « Grâce au portail d'API proposé par SPB, nos partenaires élaborent leur parcours client en autonomie et en adéquation avec leur stratégie marketing. Cette plus grande liberté dans la construction des parcours améliore significativement l'expérience assuré. »
Des API flexibles
Le portail propose différents types d'API, couvrant les processus clefs du métier de l'assurance et les grandes étapes des parcours clients : consultation des offres, souscription, traitement des sinistres, gestion documentaire, finance, etc. « Personne n'utilise la même granularité d'API. Ce qui compte c'est le périmètre couvert plutôt que le nombre d'API proposées », souligne Patrick Rivière, qui rappelle également que « derrière les API, il y a les données ». « Les sujets de la data et des API sont très en vogue, mais à un moment il faut se lancer », pointe le DSI. Beaucoup des API disponibles s'adressent aux partenaires distributeurs, mais le groupe met également des API à disposition des assureurs, en particulier pour fournir à ces derniers les informations dont ils ont besoin, notamment financières.
Actuellement, le portail propose uniquement les API du groupe SPB. Toutefois, certaines d'entre elles encapsulent des API partenaires, par exemple pour la signature électronique ou le paiement. Sur les activités d'économie circulaire, portées par Save, le portail propose déjà toutes les API de base, pour la commande et la gestion des services. En parallèle, SPB construit un hub de services métiers pour permettre à différents partenaires de proposer leurs services aux clients et partenaires du groupe. « Via nos API, nos partenaires peuvent appeler ce hub de services, pour demander par exemple la réparation d'une machine à laver », explique le DSI. « Une API générique oriente vers les API des différents partenaires, en fonction des critères pertinents. Le premier d'entre eux est la localisation, mais nous pouvons combiner divers critères, comme le fait de chercher uniquement des réparateurs agréés. »
L'agilité en toile de fond
Par sa dimension à la fois stratégique et technologique, un tel portail a nécessité plusieurs chantiers. Le premier d'entre eux était d'ordre technique, pour moderniser et APIser le système d'information. « Nous avons notamment entrepris une démarche de move-to-cloud, pour aller chercher la flexibilité, la puissance et la résilience dont nous avions besoin. Nous avons également réurbanisé nos systèmes et nous construisons les API », relate Patrick Rivière. Les API sont ensuite publiées progressivement sur le portail, qui repose sur la solution d'API management Red Hat 3scale. « Nos API sont sécurisées et monitorées, avec des contrats de services très stricts », indique Patrick Rivière. Pour la DSI, l'un des enjeux est de mener la transformation sans arrêter la machine, en assurant en parallèle la continuité de l'activité. « Nous avons recruté les bonnes compétences pour mener les deux aspects de front, l'APIsation et le business-as-usual », indique Patrick Rivière.
Le deuxième chantier mené par SPB a consisté à retravailler le modèle de mise sur le marché des services dans une volonté d'agilité. « Nous devons devenir une entreprise agile, ce qui ne consiste pas simplement à mettre en oeuvre Scrum. Il faut penser autrement, nous organiser différemment », explique Patrick Rivière. Toute l'entreprise s'est ainsi formée aux fondamentaux de la gouvernance agile et à l'intelligence collective, adoptant des modes de communication plus rapides et simples. « Acquérir cet état d'esprit formait le premier volet de ce passage vers une organisation agile. Dans le même temps, les équipes IT ont été formées aux méthodes agiles. Il faut vraiment les deux volets, cela ne sert à rien que l'IT soit agile seule dans son coin », souligne le DSI.
Co-construction et transformation
Maintenant que la première version du portail est opérationnelle, le groupe souhaite le confronter au marché. « Le principe de base du développement agile est d'aller le plus rapidement sur le marché, pour avoir un retour le plus vite possible et pouvoir s'adapter. Nous souhaitons travailler avec des early adopters, c'est une opportunité d'enrichir plus vite notre catalogue de services et de s'assurer qu'il est bien aligné sur le marché », indique le DSI. « Avec ce portail, nous sommes vraiment dans une approche de co-construction avec nos partenaires. Quand nous travaillons avec eux, la première chose que nous faisons est de réaliser une cartographie du parcours client, pour regarder tous les points d'interaction avec les clients et mesurer leur sentiment, identifier les irritants comme ce qui est apprécié, pour guider les services à mettre en place et les évolutions à apporter », précise Patrick Rivière.
Avant d'initier un tel projet, Patrick Rivière insiste sur l'importance de « travailler le modèle économique. » Le développement des API laisse en effet entrevoir de nouvelles opportunités à SPB, notamment en termes de monétisation de ses services. « Avec les API, nous allons de plus en plus vers l'automatisation. Dans ce contexte, il sera peut-être plus pertinent de facturer en fonction de l'utilisation de certaines API plutôt qu'en fonction des coûts de gestion », illustre le DSI. Si cette stratégie d'APIsation est mise en oeuvre par l'IT, Patrick Rivière insiste : « Pour construire les API, il faut une vision au niveau de la direction générale. C'est une transformation digitale, mais c'est surtout une transformation radicale. »
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