SAP a déclaré la semaine dernière qu'elle prévoyait d'annoncer une offre au cours du prochain trimestre basée sur SAP ERP Central Component (SAP ECC) et conçue pour aider les plus grands clients de l'entreprise à « planifier, exécuter et réussir leur transformation dans le cloud. ». Dite « option de transition SAP ERP, édition privée », cette offre sera disponible à l'achat à partir de 2028 et utilisable activement « à partir de 2031-2033 » indique le fournisseur. Ce dernier justifie cette annonce très en amont pour que les clients ayant des environnements complexes puissent disposer de suffisamment de temps pour préparer leurs planifications.

Etendue en 2020, la maintenance standard pour ECC arrivera donc à son terme le 31 décembre 2027, tandis que la maintenance étendue pour les systèmes SAP ERP sur site doit expirer à la fin de l'année 2030. « Continuer à utiliser ces systèmes au-delà de 2030 deviendra de plus en plus difficile et risqué, car, entre autres choses, les produits tiers, notamment les anciennes versions de Java ne seront plus prises en charge par leurs fournisseurs respectifs », met en garde le communiqué. « Nous savons que les clients SAP qui ont des environnements IT sur site très vastes et très complexes, y compris un grand nombre de systèmes SAP ERP, parfois par centaines, ont besoin de flexibilité pour déplacer chaque portion de leur environnement vers le cloud avec le rythme et l'agilité nécessaires pour soutenir l'évolution des exigences de l'entreprise », ajoute-t-il.

Une offre assortie d'un ensemble de conditions

- Une gamme de produits centrée sur SAP ECC qui n'inclura pas l'intégralité de SAP Business Suite 7, disponible uniquement par abonnement et seulement jusqu'à la fin de l’année 2030 ;

- Les systèmes « pertinents pour l'option de transition SAP ERP, édition privée, doivent être déplacés vers SAP ERP, édition privée, avant la fin de l'année 2030 » ;

SAP Hana sera la seule base de données prise en charge dans le cadre de la nouvelle offre d'abonnement.

L'éditeur fournira plus de détails en 2028, à l'approche de la date de disponibilité.

Robert Kramer, vice-président et analyste principal chez Moor Insights & Strategy, a qualifié cette offre de stratégique. Selon lui, « elle aidera les grandes entreprises dotées de systèmes SAP ERP complexes sur site à passer à SAP Cloud ERP avant l'échéance de 2030, ce qui leur donnera une marge de manœuvre supplémentaire (2031-2033). Elle préserve les fonctionnalités de ECC et inclut un soutien à la transformation, minimisant ainsi les perturbations dans les processus d'entreprise ». L’analyste explique que l'objectif est de « réduire les risques, les vulnérabilités de sécurité et les problèmes de conformité liés à des systèmes obsolètes ». Ajoutant : « Il ne s'agit pas seulement d'un changement technique, mais d'un outil commercial qui permet aux entreprises de se moderniser à un rythme gérable. Le succès dépendra également de l'adoption par le client d'une gestion efficace du changement et des données, ce qui implique une responsabilité totale de sa part. Pour les clients de SAP, la question essentielle n'est pas de savoir s’ils peuvent effectuer la transition, mais comment et à quelle vitesse ».

Une complexité incarnée par l'ERP

Jeremy Roberts, directeur principal de la recherche et du contenu chez Info-Tech Research Group, pense que la solution du fournisseur offre « un couplage prudent entre la modernisation et le cloud ». Il rappelle que « c'est une direction prise depuis longtemps par les principaux fournisseurs de logiciels, sauf qu’ils considèrent le cloud comme la destination où leurs utilisateurs veulent se rendre ». « C'est l'avenir de SAP », estime-t-il. Cependant, tous les clients ne sont pas aussi enthousiastes à l'idée de cette transition. « Cette offre semble répondre à l'hésitation des principaux clients du cloud à changer leurs opérations rapidement et de manière significative. En réalité, la complexité de l’entreprise peut croître de manière exponentielle à mesure qu’elle se développe de manière linéaire. Cette complexité est incarnée par leur ERP ».

M. Roberts compare la transition des ERP à la construction du canal de Panama : « C'est une affaire énorme qui prend beaucoup de temps et paraît parfois impossible à mener à bien ». C’est pourquoi de nombreux clients préfèrent laisser traîner les choses plutôt que d'assumer ce projet de changement massif et les risques qui y sont associés. « Cette attitude est frustrante pour des fournisseurs comme SAP, qui veulent normaliser certaines de leurs opérations et corriger les vulnérabilités ». Selon M. Roberts, la solution à ce problème passe par la création d'un « chemin de migration des clients vers le cloud qui allège la charge autant que possible ». C'est comme préparer un enfant à l'école : c’est plus ou moins plus facile, mais il faut le faire. « Il y a fort à parier que SAP avait un objectif pour le passage au cloud, mais qu'elle est consciente qu'elle ne l'atteindra probablement pas ». Selon M. Roberts, l'offre de la firme est « une solution d'urgence qui cible les clients les plus importants et certainement les plus rentables, en répondant à leurs besoins tout en les amenant lentement à quitter leurs environnements sur site. En fonction du prix, il pourrait s'agir d'une solution gagnant-gagnant. De nombreux administrateurs d'ERP poussent sans doute des soupirs de soulagement aujourd'hui ».

La capitale gestion du changement

En attendant, M. Kramer estime que « pour assurer une transition en douceur vers SAP Cloud ERP, les DSI doivent s'attacher à bien gérer les changements. Cela signifie qu'il faut obtenir l'adhésion de tous, une transparence totale des avantages et de l'impact pour l'entreprise, et s'assurer que les utilisateurs comprennent et sont satisfaits. Il est également important de disposer d'un solide plan de gestion des données. Il s'agit en particulier de nettoyer les données, de planifier leur transfert et de vérifier que tout fonctionne ». Il est par ailleurs « crucial d'examiner de près l'environnement ECC actuel, y compris les personnalisations, les intégrations, la quantité de données et le nombre d'utilisateurs ». M Kramer recommande « de travailler avec des partenaires SAP expérimentés qui ont réussi des transitions complexes dans le passé. »