C'est un procès de huit semaines qui a démarré hier entre Oracle et Google sur l'utilisation de Java dans Android. Il est suivi à San Francisco par notre confrère James Niccolaï, d'IDG News Service. Voilà 18 mois maintenant qu'Oracle a attaqué Google, au motif que le système d'exploitation Android enfreignait les brevets et copyrights Java qu'il avait acquis en rachetant Sun Microsystems. Google, de son côté, nie toute mauvaise conduite et avance qu'il n'a pas besoin de détenir une licence pour les parties de Java dont il s'est servi.

Hier, le juge William Alsup qui entend l'affaire a averti les deux parties qu'elles devront avancer de bonnes raisons pour que les éléments de preuve soumise au tribunal ne soient pas communiquées publiquement, et que des détails peu flatteurs pourraient émerger, de chaque côté. « A moins qu'il ne s'agisse de la recette du Coca-Cola, cela sera communiqué publiquement », a-t-il déclaré. « Si cela révèle quelque chose d'embarrassant sur la façon dont l'une de ces sociétés travaille, tant pis. Cela sera montré. ».

Google n'a pas agi par erreur, affirme l'avocat d'Oracle

L'essentiel de cette première journée a été consacrée à la sélection du jury, mais l'avocat d'Oracle, Michael Jacobs, a néanmoins eu un peu de temps pour s'exprimer (Google devait le faire le lendemain). Il a cité plusieurs e-mails échangés avec des responsables de Google qui, a-t-il indiqué, montreront que la société savait qu'elle avait besoin d'une licence pour Java et que, ayant échoué à en négocier une, a tout de même développé Android avec Java.

L'utilisation de la propriété intellectuelle d'Oracle par Google n'a pas été une erreur, pas plus que la conséquence d'un malentendu, a affirmé Michael Jacobs au jury. « La décision de l'utiliser dans Android a été prise aux plus hauts niveaux », en toute connaissance de cause sur ce qui se déroulait, selon lui.

Google tire la majorité de ses revenus de la publicité sur les terminaux fixes, a rappelé le défenseur. Et la popularité des smartphones a amené Google à réaliser, vers 2005, qu'il avait besoin d'une plateforme logicielle mobile pour rester compétitif. Il a dû développer Android rapidement et il devait attirer les développeurs pour réussir, a ajouté Michael Jacobs. « Comment a-t-il pu y arriver ? La réponse est... avec des composantes de Java ».

eBay, Cisco ou GE ont acquis des licences de Java

D'autres sociétés comme eBay, Cisco Systems et General Electric ont acheté des licences pour se servir de Java, mais Google a « rompu les règles de base qui gouvernent la communauté Java », a poursuivi l'avocat. Plusieurs grands noms de la Silicon Valley devraient être cités comme témoin. Parmi eux, Larry Ellison, le PDG d'Oracle, Larry Page, celui de Google, Eric Schmidt, le président exécutif de Google, ainsi que Scott McNealy et Jonathan Schwartz, les précédents PDG de Sun Microsystems.

Avec la sélection du jury, lundi, le juge William Alsup a dû régler plusieurs différends de dernière minute entre les deux parties. Google considérait injuste qu'Oracle soit autorisé à dire au jury qu'il avait déboursé 7,4 milliards de dollars pour racheter Sun parce que cela pourrait gonfler la valeur de Java dans l'esprit des jurés. « Ils meurent d'envie de communiquer ce montant », a confié au juge l'avocat de Google, Robert Van Nest.

Le juge a rejeté sa demande mais il a néanmoins averti Oracle d'être prudent sur la façon dont il se servirait de ces chiffres. Les lancer face au jury pour faire grimper le montant des dommages, s'il y en a, ce ne sera pas autorisé, a-t-il prévenu.

Un procès en trois phases

Le procès se déroulera en trois phases : on écoutera d'abord la plainte concernant le copyright, puis celle couvrant les brevets, puis les dommages pour lesquels Oracle pourrait être dédommagé. La société dirigée par Larry Ellison réclame près d'un milliard de dollars et une injonction d'interdire à Google la livraison de tout code faisant l'objet d'une infraction. Ce procès est vu par beaucoup comme un test pour savoir si les API (interfaces de programmation) peuvent faire l'objet de copyright. Il devait reprendre ce mardi matin à 8 heures (Pacific Time) à San Francisco.

L'historique du procès Oracle/Google sur l'utilisation non autorisée de Java