Comme tous les ans, les clubs utilisateurs de solutions Oracle, l'AUFO (Association des Utilisateurs Français de solutions Oracle), le Club JDE et le Club PeopleSoft, avaient organisé une Journée des Utilisateurs le 19 mars 2020 qui aurait dû se dérouler au Pavillon Gabriel à Paris. Las ! La crise sanitaire est passée par là et, de report en report, c'est finalement sous forme de webconférence qu'elle s'est déroulée le 1er décembre 2020. Comme tous les ans, et malgré la crise sanitaire, l'événement a aussi été l'occasion de prendre un peu de recul autour du thème « Et si l'innovation digitale soutenait la performance ? ».

Après un rappel de la manière dont l'innovation était perçue il y a un siècle, au travers de la projection d'un extrait du film de Buster Keaton de 1922 « Electric House », Emmanuel Vivier, co-fondateur du Hub Institute, a expliqué que « Le monde est VUCA ». VUCA signifie : « Volatile [volatility], Incertain [uncertainty], Complexe [complexity], Ambigu [ambiguity] ». La crise sanitaire constitue un exemple typique de « cygne noir », c'est à dire de phénomène remettant en cause les règles communes du jeu, comme une guerre, une catastrophe naturelle d'ampleur mondiale, etc.

Onze types de ruptures et huit trophées

Onze types de ruptures sont aujourd'hui identifiées : technologiques, légales, liées à des crises sanitaires systémiques (comme l'actuelle liée au Covid-19), etc. Comme l'a justement remarqué Emmanuel Vivier, notre crise actuelle est loin d'être la pire parmi celles ayant constitué un « cygne noir » : « durant la deuxième guerre mondiale, la vie était plus compliquée que de devoir regarder Netflix à la télévision. » Mais le « monde d'après » manque encore souvent de stratégie pratique, même si la responsabilité sociétale et environnementale commence à être prise en compte sous la contrainte des citoyens-consommateurs. La « next économie » devra forcément en tenir compte pour redonner du sens aux entreprises comme aux individus. Sur ce sujet, Karine Picard, Country Manager d'Oracle France, est également intervenue aux côtés de clients de l'éditeur : Hélène Napoly (Responsable IT Fonctions support et RPA du Crédit Agricole Assurances), José Munoz (DSI du groupe Chryso) et Emmanuel Ruez (Directeur PMO & Contrôle de Orange).

C'est au cours de Journée des Utilisateurs qu'ont été remis les habituels Trophées Oracle des Clubs Utilisateurs récompensant les meilleurs projets menés par les utilisateurs. CIO était représenté au sein du jury réunissant des DSI membres des clubs et invités, des lauréats des années passées, de trois représentants d'Oracle et d'experts. La plupart des projets récompensés s'appuyaient cette année sur le cloud d'Oracle. Les participants à la Journée des Utilisateurs ont également voté pour désigner, parmi les six lauréats, le « Trophée Coup de Coeur », en l'occurrence Louvre Hôtels.

Trophée de l'Expérience Utilisateurs : ALD Automomotive (groupe Société Générale)

ALD est une filiale du groupe Société Générale dédiée au financement de flottes automobiles. En s'appuyant sur Accenture, elle a mis en oeuvre Oracle Eloqua pour gérer les actions marketing dans 60 filiales dans 43 pays avec 6 administrateurs auprès de 1,54 million de contacts. Le projet a été présenté par Yamna Amraoui, Customer Experience Project Manager. Il concernait les deux grandes activités du groupe : le leasing (B2B) et la revente de véhicules (B2C). Baptisé ALD Max, le projet a démarré en 2015 sur le constat que le marketing était très manuel avec des listes de distribution de mails, parfois quelques outils dans les grandes filiales. L'objectif était évidemment d'unifier les démarches et les outils entre les deux métiers et d'harmoniser les niveaux de maturité entre les pays : si la maturité était correcte en France, les petits pays restaient sur des process à sélections manuelles).

Suite à un appel d'offres, le choix de la solution a eu lieu en octobre 2016. Le déploiement a débuté peu après pour être achevé récemment. Il a connu quelques retards dus à des difficultés de structure avec le CRM Salesforce (les contrats sont gérés soit sur compte soit sur contact). Le choix d'Exact Target aurait pu être naturel mais cette solution, rachetée par Salesforce, n'est pas nécessairement mieux nativement intégrée. L'éditeur Adobe, autre concurrent, n'a pas répondu à l'appel d'offres. Selon Yamna Amraoui, la solution a apporté une vraie efficacité. Toujours proposée, jamais imposée, elle a vu son usage croître via le bouche-à-oreille. L'engouement des utilisateurs a été plus important que prévu. Si l'équipe centrale reste un soutien technique, la maîtrise du marché est locale et donc l'usage local.

La disparité de maturité, les différences entre les deux métiers (B2B pour le leasing, plutôt B2C pour la revente) et les craintes que tel pays soit privilégié sur tel autre ont constitué des difficultés particulières du projet.

Trophée de l'Industrialisation : CEVA

Le groupe pharmaceutique vétérinaire a mis en place une industrialisation du processus de déploiement du Core Model JDE Ceva sur les filiales. Le projet, mené sans partenaire, a été présenté par Pascal Arnaud, responsable du département ERP JDE, et Henri Fayad, chef de projet et expert fonctionnel JDE.
Ceva a commencé son usage de JDE en 2003 et dispose donc, en interne, de fortes compétences sur l'outil. Mais le groupe connaît régulièrement des opérations de croissance externe et il s'agissait d'harmoniser les PGI déployés. Le problème s'est notamment posé sur un rachat opéré en Allemagne où Ceva rachetait une partie d'un groupe utilisant un SAP commun. Il s'agissait de permettre une bascule rapide dès la conclusion de l'achat, sans pouvoir contacter les métiers en amont et en gardant une capacité de retour arrière à tout moment. Le périmètre comprenait pourtant la partie comptabilité/finances, les immobilisations et les process achats/stocks/ventes.

Le contrat a finalement été signé le 29 juin, et le nouvel ERP JDE a pu démarrer le 1er juillet après intégration en deux jours des données de l'entreprise. La reprise de données a été effectuée avec des formats de fichiers pré-établis dans lesquels l'entreprise rachetée a dû exporter ses données. Malgré les contraintes, les clients internes se sont approprié rapidement l'outil et les clients externes n'ont pas eu à souffrir de problèmes de délivrance des produits.

Le noyau mis en place possède une branche par pays, une instance Oracle, certaines avec de fortes localisations. Le projet a amené l'ajout d'une branche. Le tout a été mené On Time, On Cost (moins de 100 kE), On Quality. Avec peu d'incidents, le projet a permis une première clôture mensuelle dans les délais. Le ROI calculé est de 7 mois par rapport aux redevances à payer pour utiliser le système de l'ancienne maison-mère. Dans un premier temps, la migration s'est faite au juste besoin, certaines intégrations étant prévues en second temps. Le même process a ensuite été appliqué à une autre filiale dans une même situation, industrielle cette fois.

Trophée de la Stratégie Digitale : Conforama

Dans une situation délicate, le groupe de distribution d'équipements de la maison Conforama a mis en place le projet Club AI (Achats Indirects) avec son partenaire Talan. Visant à optimiser les achats destinés au fonctionnement interne du groupe (non-revendus), ce projet a été présenté par Benjamin Hakoun-Milleliri (directeur des achats indirects), Alexandra Lemmonier (chef de projet métier), Adrienne Salvia (responsable SI finance) et Bao Tran (directeur des études SI Back Office). Basé sur Oracle ERP Cloud, OTBI et Financial Reporting, Club AI est destiné à 940 utilisateurs internes (comptabilité, acheteurs... en magasins et au siège) et à 5000 utilisateurs externes (chez les fournisseurs). Ce projet, sur lequel le jury était partagé, est celui qui a le plus surpris lors de la présentation orale tant une démarche semblant simple et évidente s'est révélée porter une réelle stratégie de digitalisation métier suscitant alors un enthousiasme paradoxal chez les membres du jury.

Le problème initial était que la direction des achats n'avait pas d'outil et ne couvrait que 30% des achats de son périmètre. Les objectifs du projet étaient ambitieux en débutant par des économies. En plus d'un nouvel outil, il s'agissait surtout de mettre en oeuvre un nouveau process. Il s'agissait aussi de mettre en place un seul outil des achats, des approvisionnements (portail pour les commanditaires) et de la gestion (portail pour les fournisseurs pour suivre le traitement de la facture, y compris factures non-parvenues).

Après un appel d'offres, le pilote a été réalisé fin juin 2019 au sein de la DSI. ERP Cloud a été défini comme la plate-forme la plus complète et la plus pertinente. Puis le déploiement progressif. Le projet n'a jamais été remis en cause malgré les difficultés du groupe et les changements multiples de directions, bien au contraire. Au delà des nombreux bénéfices métier (rapprochements automatisés, gains sur les achats...), il y a eu une révolution des usages. L'outil va gérer à termes 600 millions d'euros d'achats, 5000 fournisseurs, 120 000 factures, 1000 utilisateurs... Le choix du SaaS a été justifié pour garantir l'emploi des dernières versions sans nouvelle équipe projet. L'ERP du groupe, un désormais très ancien Oracle 11i, a obligé à refaire toutes les interfaces. Conforama serait ainsi le premier utilisateur d'ERP Cloud sur les achats.

Trophée de l'Efficacité et Trophée Coup de Coeur : Louvre Hôtels Group

Le projet, baptisé Gingko (du nom de l'arbre survivant de la plus ancienne et résistante des familles arboricoles), a été présenté par Georges Azevedo (Directeur de la transformation), Marion Balestic (FP&A innovation manager) et Christophe Jacquart (Directeur FP&A). Louvre Hotel Group s'est appuyé sur l'intégrateur Nell'Armonia. Gingko consistait en l'implémentation d'Oracle PBCS sur 54 sites à l'international et 1 en France avec 70 utilisateurs internes et 20 externes. Louvre Hôtels Group appartenait jadis au groupe français Taittinger mais a été racheté par Jin Jiang International, deuxième groupe hôtelier mondial, basé en Chine. Celui-ci a un objectif : être le leader mondial de l'hôtellerie, ce qui induit un certain nombre de projets.

Le budget était géré grâce à 200 fichiers Excel, avec un process trop manuel et des macros sous le contrôle d'une seule personne maîtrisant le process. Pour refondre le budget, Louvre Hôtels Group a choisi Oracle PBCS Cloud : il s'agissait de mener une transformation digitale avec accès web de toutes les parties prenantes, une sécurisation du process, un pilotage de la performance, une réduction des délais, de la transparence, de la robustesse et de la pérennité (d'où le nom Ginkgo). Ce projet était mené après deux échecs successifs ayant le même objet (2009 : premier pas avec Essbase ; 2016 : test Anaplan avec rejet par les équipes, notamment du maître du process). Cette fois, après des tests opérés sur divers outils (dont Essbase et Anaplan), PBCS a été choisi par un vote de l'équipe. Oracle outillait déjà d'autres fonctions dans le groupe même si l'ERP est sous AS/400, chaque pays ayant le sien.

Louvre Hôtel a appris de ses erreurs, a remodélisé ses process avec core-model au lieu d'un désordre procédural, a standardisé et a accompagné le changement. Le projet a été mené en trois mois en approche agile, sous date contrainte. Le SaaS a été choisi pour sortir des problèmes d'infrastructures, tenir compte des nombreux itinérants et garantir une standardisation. Le principal bilan est une réduction des délais de création des budgets, passant de 3 à 1 mois, permettant un développement des analyses.

Trophée de la Transformation et Trophée des Trophées : Marie Brizard Wine & Spirits

Le groupe de fabrication et distribution de spiritueux Marie Brizard Wine & Spirits a mis en oeuvre Forward Project en s'appuyant sur l'intégrateur Vigilens. Ce vaste programme comporte des déploiements de l'ERP JDE Enterprise One 9.2, le MDM Oracle Product Hub, l'EPM Oracle Planning and Budgeting Cloud Service (PBCS) et Oracle Database 12.2. Il a été présenté par Olivier Bernazeau (expert métier finance) et Stéphane Jourdain (DSI groupe) accompagnés de leur partenaire Vigilens représenté par Sophie Gautier et Eric Scalabre.

Ce projet avait une particularité : il s'agissait du premier mené au niveau groupe chez MBWS, impactant tous les métiers et toutes les filiales de production comme de commercialisation, alors que, traditionnellement, le groupe est plutôt siloté. Il fallait donc implémenter un seul MDM produits, un seul EPM (budget, consolidation), un seul ERP. Même outil, même processus et même langage partout : les datas devaient aussi être fiabilisées. MBWS a choisi une architecture hybride cloud / on premise. Après la mise en place d'un portail employés et la traçabilité des produits, la prochaine étape est la dématérialisation globale des factures fournisseurs, suivie d'un module de devis communs.

Oracle JDEdwards a été choisi pour ses fonctionnalités particulières et plus structurantes (SAP avait besoin de spécifications à paramétrer). A l'heure du bilan, la satisfaction est réelle sur l'organisation et l'agilité et le ROI financier a été calculé sur 5 ans.

Trophée de l'Internationalisation : SMCP (Sandro, Maje, Claudie Pierlot)

En s'appuyant sur Capgemini, le groupe de mode SMCP a mis en oeuvre WeDo (Worldwide Deployment of Oracle), projet présenté par Raphaël Asaria (directeur du contrôle financier), Marine Penigault (directrice du contrôle de gestion) et Guillaume Sauret (chef de projet finance). Il s'agissait de doter les fonctions comptabilité et contrôle de gestion d'outils adaptés, sous Oracle ERP Cloud et PBCS pour 8 sociétés en France et des filiales dans une vingtaine de pays (déploiement en cours, 6 pays et 8 sociétés déployés à ce jour).

Le projet est issu des métiers, la contractualisation ayant été faite en Janvier 2018. SMCP est une société en forte croissance, avec un focus sur le front-office durant la croissance. Il était temps de s'occuper du back-office. Le déploiement mondial a commencé par la filiale aux USA (fin 2018) avant le pays-père, la France (mi-2019) puis les autres pays (Chine : janvier 2020). L'objectif était de disposer d'un core model unique avec un outil unique, bien intégré et international alors que, auparavant, il y avait de vieux outils épars (ERP Retail Storeland, BI vieillissante...).

Le métier a connu sa révolution aussi : désormais la comptabilité est effectuée en norme IFRS avant le déversement en comptabilité locale. Les déploiements successifs sont toujours en cours, prévus jusqu'en 2021, avec enchaînements entre pays en lancement et pays qui viennent de se lancer. Selon l'entreprise, les objectifs d'harmonisation et d'efficacité ont été atteints. Oracle a d'abord été choisi devant SAP parce que ce dernier éditeur ne proposait pas un module de contrôle de gestion dans le cloud à la hauteur des attentes. Et le choix du full cloud était un impératif de tranquillité. Le groupe avait exigé des soutenances communes éditeur/intégrateur et l'intégrateur SAP ne s'est pas révélé à la hauteur des besoins. Microsoft n'a pas répondu. Workday n'était pas encore bien adapté à l'époque. Le PaaS Oracle a été également utilisé en complément pour intégrer les datas de stocks/vente avant intégration dans le SaaS afin de réduire les coûts de licencing. Là encore, les budgets étaient montés sur Excel avant que le module PBCS d'Oracle ne soit déployé.