Un groupe d'utilisateurs français d'OpenVMS a adressé une « lettre ouverte » à Meg Whitman. Ils demandent au CEO de Hewlett-Packard de reconsidérer la décision de HP de réduire le support pour son système d'exploitation. La lettre, écrite au nom du groupe d'utilisateurs HP-Interex France par Gérard Calliet, consultant OpenVMS, explique le rôle important joué en France par OpenVMS pour faire tourner des systèmes dans le domaine des transports, de la santé et même des centrales nucléaires. « Ces produits logiciels sont le fruit de décennies de travail de programmation pointu pour mettre au point un codage précis qui réponde à des nécessités fonctionnelles très particulières », écrit le consultant. « La majorité de ces systèmes utilisent des fonctions spécifiques à OpenVMS et tournent encore sous OpenVMS, car ces fonctions personnalisées sont difficiles à trouver ailleurs », explique encore la « lettre ouverte ».

Le groupe d'utilisateurs critique le manque de clarté de la position de HP et accuse le constructeur d'être à l'origine de l'incertitude actuelle autour de l'OS. « Les grandes entreprises ne s'inquiètent pas seulement des risques fonctionnels et des énormes investissements auxquels elles seraient exposées. Elles constatent que depuis un an elles sont laissées dans l'expectative », écrit encore Gérard Calliet dans cette lettre ouverte à laquelle HP n'a pas encore réagi. En 2013, le constructeur avait affirmé que le support pour OpenVMS serait maintenu sur ses serveurs Itanium Integrity i2 « au moins jusqu'à la fin 2020 ». Mais en janvier dernier, HP a revu ses projets, déclarant cette fois que « le support pour son produit serait maintenu sur les serveurs Integrity i2 au moins jusqu'en 2025 » mais en excluant l'ingénierie, ce qui signifie qu'il ne comprend pas le développement de nouveaux correctifs si cela s'avère nécessaire. De plus, HP n'a pas changé d'avis sur un autre point essentiel : le constructeur n'assurera pas le support d'OpenVMS sur son hardware le plus récent, c'est à dire sur les serveurs Integrity i4.

Le support des dernières puces Itanium est crucial 

Selon Gérard Calliet, « si HP ne valide pas le support pour Integrity i4, les utilisateurs devront acheter les anciens systèmes Itanium i2. Or ceux-ci ne sont pas assez puissants pour leurs usages ». Les serveurs i2 sont équipés de processeurs Tukwila quad-core dont la fréquence d'horloge peut atteindre 1,73 GHz. Comparativement, les serveurs i4 sont équipés de processeurs Poulson huit coeurs dont la fréquence d'horloge peut grimper à 2,53 GHz. Par ailleurs, selon le consultant, le sort d'OpenVMS n'intéresse pas les utilisateurs de HP-UX, de Linux ou de Windows. « Les seules personnes à connaître les systèmes OpenVMS se trouvent probablement dans les services informatiques et la plupart des responsables commerciaux de nombreuses entreprises ignorent sans doute que c'est grâce à ce système d'exploitation que certaines tâches critiques peuvent être exécutées dans leurs entreprises ». Ce manque de connaissance fait que le système ne bénéficie pas du soutien dont il aurait besoin et rend OpenVMS encore plus vulnérable. Ce n'est pas la première fois que HP met un terme à des systèmes existants. Ce fut le cas de ses systèmes milieu de gamme HP 3000, qui tournaient avec un système d'exploitation propriétaire MPE et le système d'exploitation Unix Tru64. Comme OpenVMS, ces systèmes étaient réputés pour leur fiabilité et leur fonctionnalité.

En même temps qu'il pousse OpenVMS vers la sortie, HP va sans doute essayer d'adapter les dates et les délais de fin de vie du produit afin de prendre en compte les préoccupations des utilisateurs, comme ce fut le cas pour son annonce de janvier. Mais son message reste identique : il incite les entreprises à migrer. Gérard Calliet estime que la prolongation du support jusqu'en 2025 n'est pas faite pour aider les utilisateurs d'OpenVMS. « Parce que, compte tenu de la complexité de la migration, pour certains clients OpenVMS, 10 ans, c'est demain », a-t-il écrit. Wayne Sauer, le CEO du Parsec Group, un consultant en informatique qui a une grande expérience d'OpenVMS puisqu'il sert quelque 350 clients qui font tourner 7000 systèmes, a déclaré qu'il était « pleinement en accord » avec les revendications exprimées par le groupe d'utilisateurs français dans la lettre ouverte, sauf qu'il estime qu'OpenVMS est bien plus rentable que ce que le groupe d'utilisateurs français le laissent entendre.

HP n'a pas clairement indiqué qu'il mettait fin au support d'OpenVMS 

Dans une interview, Wayne Sauer et Paul Williams, vice-président des ressources techniques pour le Parsec Group, ont déclaré que HP ne s'est jamais dégagé et n'avait jamais dit qu'OpenVMS était en fin de vie. Selon eux, si le constructeur ne porte pas OpenVMS sur d'autres matériels que l'Integrity i2, la durée de vie du logiciel sera effectivement limitée. Mais Wayne Sauer pense que les utilisateurs d'OpenVMS « sont plus que jamais dévoués au système de HP », ajoutant que parmi les grands utilisateurs du système d'exploitation on trouve des entreprises du secteur de la santé, des communications sans fil et celui des loteries et des jeux d'argent. OpenVMS a été introduit en 1977 par Digital Equipment Corp sous le nom de VAX/VMS. L'entreprise a par la suite été acquise par Compaq, qui à son tour a été rachetée par HP. Dans sa lettre à Meg Whitman, Gérard Calliet écrit que HP « n'a pas compris les spécificités du marché d'OpenVMS, ni celle de son cycle de vie, qui est de 10 ou 20 ans ». Le consultant français exhorte HP à revenir sur sa décision et lui demande de reconnaître qu'elle fait une erreur. « Cela ne porterait pas ombrage à HP si l'entreprise changeait d'avis sur OpenVMS », a-t-il écrit, ajoutant : « Ce ne serait pas le cas si HP omettait de corriger un bogue là où il y en a un ».