Il est de tradition parmi la classe politique française de tacler les géants du digital, ces grandes entreprises américaines, mais aussi chinoises, qui dominent l'industrie du numérique. Le 27 août, dans son discours adressé aux entrepreneurs français à l'occasion de LaREF (Renaissance des Entreprises de France), l'événement d'été du Medef, Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance, n'y a pas dérogé. Dénonçant certains impôts « stupides » pesant sur la capacité de production des entreprises françaises, il a en revanche défendu une imposition plus importante pour les GAFA. « Il faut aller chercher l'argent là où il se trouve et là où les richesses se créent. Une petite entreprise industrielle de la vallée de l'Arve ne doit pas payer plus d'impôts que Google, Facebook et autres géants du digital, qui eux payent très peu d'impôts en France alors qu'ils y font des profits considérables ».

Si le numérique est créateur de richesses, comme l'admet indirectement le ministre, force est de constater que les entreprises françaises peinent à s'emparer de ce levier. La France manque ainsi de champions du numérique - un constat qui malheureusement semble perdurer. Même si quelques grands acteurs des services numériques et éditeurs de logiciels spécialisés, listés au CAC40, tirent leur épingle du jeu, ce cercle reste très fermé. Parmi les nombreuses startups du numérique qui se créent en France, beaucoup choisissent encore d'aller aux États-Unis pour se développer plus rapidement. Citons par exemple Snowflake, Algolia, Dataiku ou encore Datadog. Pour y remédier, le ministre préconise d'être offensif. « Un problème majeur est l'absence d'union des marchés de capitaux européens. Nous voulons mettre cette union en place pour que les startups françaises puissent se financer en Europe plutôt que d'aller se vendre aux États-Unis. »

« La digitalisation de l'économie française » est aussi un enjeu central pour Bruno Le Maire, qui souligne à juste titre que dans le contexte actuel, « un petit commerce digitalisé parvient à s'en sortir, là où ceux qui ne le sont pas meurent ». Pour aider les entreprises - de tous secteurs - à franchir ce pas, devenu pour certaines une question de survie, il envisage notamment un soutien financier. « Nous allons engager plusieurs centaines de millions d'euros pour aider les entreprises à se digitaliser, à travers des subventions, le soutien de la BPI ou des aides directes, afin de faciliter la transition numérique à l'échelle », a-t-il ainsi promis. Cela suffira-t-il ? Le développement de solides compétences informatiques (sans lesquelles il ne peut y avoir d'économie « numérique »), l'attractivité de la filière, sa capacité à garder les talents ainsi que la mise en place d'un environnement juridique et réglementaire sécurisant pour les entreprises françaises ont également un rôle clef à jouer. Mentionnons enfin que la transformation numérique des entreprises ne va pas sans celle des administrations qui les accompagnent. Un enjeu que le ministre a résumé en une phrase : « le plus compliqué, c'est de simplifier ».