Le règlement européen eIDAS (Electronic Identification And trust Services) a été adopté le 23 juillet 2014 par le Conseil de l'Union Européenne et publié le 28 août au journal officiel de l'Union Européenne sous la référence 910/2014, le faisant entrer en vigueur ces jours-ci. Il renouvelle la réglementation de 1999 sur la signature électronique et, au delà, l'identification numérique à l'échelle européenne. En tant que règlement et non directive, ce texte est d'application directe sans avoir avoir besoin d'être retranscrit en droit national dans chaque pays membre. La directive de 1999 sera définitivement remplacée par le règlement eIDAS le 1er juillet 2016, date jusqu'à laquelle les dispositions antérieures restent valides.

« Un des objectifs du présent règlement est de lever les obstacles existants à l'utilisation transfrontalière des moyens d'identification électronique employés dans les États membres pour s'identifier » est-il noté dans les considérants du règlement. De fait, le règlement prévoit une validité européenne aux signatures électroniques qualifiées et aux autres moyens d'identification numérique ainsi qu'aux dispositifs d'horodatage. Les Etats acquièrent la responsabilité de tenir une liste à jour des prestataires habilités à délivrer des certificats de signature électronique. De même, l'archivage de ces certificats devra être garanti au delà de la validité technique.

Les personnes morales également identifiées

La signature électronique de personne morale est également créée par ce règlement. C'est une innovation permise par la dématérialisation. En effet, jusqu'à présent, la signature (papier ou électronique) était toujours celle d'une personne physique s'engageant, le cas échéant, au nom d'une personne morale. Cette contrainte était liée au fait qu'une société, une association ou n'importe quelle autre personne morale ne disposaient pas de mains permettant de tenir un stylo ou une plume d'oie pour tracer des signes sur du papier.

Plusieurs siècles après la création du concept de personne morale, cette création est enfin achevée : par définition objet de droits et de devoirs, la personne morale rejoint désormais la personne physique dans la capacité à s'engager elle-même et pas uniquement via ses mandataires.


Neutralité technologique pour le processus de signature

Sur le plan technique, le support physique (carte à puce...) du certificat de signature électronique n'est plus favorisé. Le règlement institue donc une neutralité technologique dans la procédure permettant de stocker et utiliser le dit certificat.
Par ailleurs, si, en France, depuis la Loi n°2000-230 du 13 mars 2000 ayant institué la signature électronique (articles 1316-1 et 1316-3 du Code Civil), la preuve électronique est autant recevable que la preuve papier, ce n'était pas le cas au niveau européen. Désormais, grâce au règlement eIDAS, la même disposition acquiert une valeur européenne. La neutralité technologique s'étend donc de la plume d'oie à la carte à puce.

Faciliter les échanges au sein de l'Europe

Concrètement, le règlement eIDAS va permettre à toutes les entreprises européennes de répondre à des appels d'offres dématérialisés en France, notamment pour les marchés publics à appels d'offres européens. Bien entendu, la réciproque est vraie et les entreprises françaises pourront concurrencer leurs homologues sur leurs marchés nationaux. Jusqu'à présent, obtenir un certificat de signature électronique national d'un pays différent du sien relevait d'un tel parcours du combattant que cet obstacle constituait en lui-même un frein à la réponse aux appels d'offres dans d'autres pays.
De même, il sera désormais aisé de contracter entre entreprises de pays européens différents sans avoir à se déplacer physiquement. Lorsqu'il s'agit de signer un contrat entre Copenhague et Séville, Brest et Varsovie ou Glasgow et Naples, supprimer la nécessité d'un déplacement acquiert tout son sens. Au delà de la levée d'un protectionnisme larvé, il pourrait aussi s'agir du meilleur moyen de valoriser le recours à la signature électronique, entraînant sa généralisation y compris pour les contrats locaux.