Le législateur est passé à l'action. Un décret signé notamment par le président François Hollande et le premier ministre Manuel Valls portant sur le blocage des sites web à caractère (ou faisant l'apologie) terroriste mais également de type pédopornographique a été promulgué hier. Entrant en application aujourd'hui, ce dernier permet à l'Etat d'engager auprès des fournisseurs d'accès Internet une démarche pour les contraindre à bloquer dans les 24 heures l'accès aux sites relevant de cette définition. Une disposition qui avait fait notamment sortir de ses gonds en juillet dernier la Commission Numérique.

Ainsi, les autorités administratives (direction générale de la police nationale et office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication) sont en mesure de demander le blocage de certains sites Internet auprès des FAI. Une vérification sera ensuite effectuée au moins chaque trimestre pour voir si le contenu du service de communication contrevenant présente toujours un caractère illicite. Si c'est toujours le cas, le blocage est maintenu, sinon, dans un délais de 24h, le blocage cesse.

Le surcoût de la mise en place du blocage pris en charge par l'Etat

Le décret n° 2015-125 du 5 février 2015 prévoit par ailleurs un dédommagement pour les fournisseurs d'accès Internet. « Les éventuels surcoûts résultant des obligations mises à la charge de l'autorité administrative en application de l'article 6-1 de la même loi font l'objet d'une compensation financière prise en charge par l'Etat. Le terme de surcoût désigne les coûts des investissements et interventions spécifiques supplémentaires résultant de ces obligations. Pour obtenir une compensation, les FAI adressent à l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication un document détaillant le nombre et la nature des interventions nécessaires ainsi que le coût de l'investissement éventuellement réalisé. Le Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies analyse le document transmis, notamment au regard des coûts habituellement estimés dans le secteur concerné. L'Etat procède, sur présentation d'une facture, au paiement des compensations correspondant aux surcoûts justifiés au vu de l'analyse du Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies. »

La Quadrature du Net s'inquiète toutefois de cette « censure administrative du Net » en rappelant qu'en 2010 le Parti Socialiste s'était opposé à cette mesure dans la loi Loppsi et aujourd'hui Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, vient renforcer cette loi. « Avec ce décret instituant la censure administrative d'Internet, la France persiste dans le contournement du pouvoir judiciaire, trahissant la séparation des pouvoirs pour attenter à la première des libertés en démocratie qu'est la liberté d'expression. Le blocage est inefficace car facilement contournable. [...] Il faut désormais porter ce décret devant le Conseil d'État pour en obtenir l'annulation », déclare Félix Tréguer, membre fondateur de La Quadrature du Net.