SAP a ajouté les logiciels de la société Kxen à son offre d'analyse prédictive. Trois mois après l'annonce du rachat, il commercialise sous le nom d'InfiniteInsight une offre interopérable qui associe les solutions acquises à sa propre application, Predictive Analysis (PA). Kxen est un spécialiste reconnu du datamining, dont les équipes (70 personnes réparties entre France et Etats-Unis) apportent à SAP des compétences avancées dans l'analyse prédictive. Pour l'éditeur allemand, le grand intérêt de cette offre, c'est qu'elle s'adresse à des utilisateurs métiers, dans les directions commerciales et marketing notamment. Tandis que la sienne visait plutôt des profils de statisticiens.

Jusque-là, la plateforme d'analyse prédictive de SAP comportait PA et deux autres volets orientés vers HANA, sa base de données in memory, dont l'un permettant de développer des packages R (langage Open Source axé sur les statistiques). L'offre s'adressait donc à des « sachants », reconnaît Stéphane Jouaux, responsable de ces solutions pour l'Europe, le Moyen Orient et l'Afrique. Pour SAP, il fallait se démarquer de ses deux grands concurrents, SAS et IBM, qui possèdent plus de 60% du marché, l'un avec Enterprise Miner, l'autre avec l'offre SPSS.

De plus en plus de prédictif dans les processus

Avec Kxen, SAP s'ouvre donc à un plus grand nombre d'utilisateurs auxquels il va permettre d'automatiser un certain nombre de fonctions, dont la construction de modèles prédictifs et le scoring, ce qui n'était pas le cas avec PA. « Il y aura de plus en plus de prédictif dans les années qui viennent. Les métiers ont besoin de mettre de l'intelligence dans leur processus », a souligné Didier Mamma, directeur database et technology chez SAP France, lors d'un point presse cette semaine à Paris. « Le marketing, par exemple, va pouvoir faire des offres segmentées plus rapidement. La volatilité est importante sur le marché, il faut pouvoir faire tourner les modèles rapidement, disposer des outils permettant de réagir vite ». Un exemple parmi d'autres a illustré ce mois-ci ce type de situation lorsque les opérateurs télécom ont dû réagir en quelques heures aux offres 4G de Free.

Pour des utilisateurs qui connaissent bien leurs données et qui savent ce qu'est la segmentation, comme c'est le cas des équipes marketing, Kxen se charge de choisir les meilleurs algorithmes et la meilleure manière de résoudre les problèmes de prédiction. L'ensemble des variables est pris en compte et le moteur du logiciel réduit ce nombre de variables pour se focaliser sur les plus pertinentes. « Sur d'autres technologies, c'est le savoir-faire de l'utilisateur qui le fait en se basant sur l'algorithme dont il a la connaissance », pointe Matthieu Chouard, vice-président senior, responsable des opérations EMEA de Kxen. Ce qui manquait encore à cette offre, c'est une solution de visualisation, que SAP va lui apporter avec Lumira, un logiciel d'utilisation très intuitive, déjà intégré à PA.

Cas d'usage dans la maintenance et l'énergie

En rejoignant SAP, Kxen va de son côté profiter de la connaissance métier développée par l'éditeur allemand sur onze secteurs d'activités, a souligné Matthieu Chouard. Jusque là, la société française s'était concentrée sur quatre secteurs : les télécoms (notamment pour le traitement de l'attrition, churn en anglais), la banque/finance, le retail (vente au détail) et le e-business. Depuis son rachat, elle explore d'autres domaines, comme la maintenance préventive, par exemple, SAP comptant parmi ses clients des entreprises comme le fabricant de matériel agricole John Deere. D'autres cas d'usage sont identifiés. « Nous travaillons sur le modèle de l'énergie oil & gas », a notamment indiqué Matthieu Chouard. Le projet en question porte sur l'analyse en temps réel d'objets remontés par des sondes sur des zones sismiques pour permettre de forer au bon endroit et d'éviter les échantillonnages qu'il fallait faire jusque-là.

Dans les mois qui viennent, une application native HANA est évidemment prévue. Il faut vérifier que les modèles restent pertinents dans le temps et les recalculer. Cette automatisation est importante dans l'intégration du moteur sur HANA. « Sur un processus d'achat qui va du bon de commande à la livraison, au cours duquel l'entreprise veut pousser des offres complémentaires, il faut avoir la capacité de collecter les données en temps réel et de modéliser très vite », cite en exemple Didier Mamma, de SAP France.

Kxen reste agnostique et s'intègrera aux offres cloud de SAP

Néanmoins, les logiciels issus de Kxen resteront agnostiques en termes de bases de données, a insisté Matthieu Chouard en rappelant notamment que parmi ses clients télécoms, beaucoup utilisent Teradata. A sa suite, Didier Mamma a redit que tous les produits qui sortaient maintenant chez SAP étaient multiplateformes, en soulignant au passage qu'HANA Studio s'appuyait sur la plateforme Eclipse.

La stratégie cloud de Kxen a également contribué à son rachat par SAP. « Nous avons trois modèles autour de l'offre Salesforce sur lesquelles SAP va continuer à investir tout en intégrant Kxen à ses offres cloud », a assuré Matthieu Chouard. « Avoir une stratégie maison n'empêche pas les partenariats ». Les trois modules associés à Salesforce portent sur le scoring (les leads ayant le plus d'opportunités sont traités en premier par les équipes de vente), la « Next best activity » et la rétention des clients. A eux deux, Kxen et SAP comptent à ce jour 712 clients dans l'analyse prédictive, dont 500 pour le premier.

Les équipes R&D de Kxen sont installées en France. Avec celles de Business Objets qui  s'y trouvent également, les équipes R&D réunies sur le logiciel par SAP dans l'Hexagone arrivent au 2ème rang derrière celles de Dassault Systèmes, a fait remarquer Didier Mamma.