En signant un décret assurant au National Strategic Computing Initiative (NSCI) la coordination du projet de supercalculateur exaflopique (soit 1000 pétaflops), Barack Obama compte bien damner le pion au gouvernement chinois dans le domaine des recherches militaires. Cet ordre exécutif vise à adopter une stratégie coordonnée impliquant de multiples agences gouvernementales, des universités mais également le secteur privé pour le développement de systèmes de calcul de haute performance.

Adopter une approche étatique, impliquant tous les ministères et organismes ayant une expertise et des intérêts dans le HPC, sera l’un des objectifs de la NSCI afin d'accélérer la livraison d'un « système informatique exaflopique avec des capacités matérielles et logicielles environ 100 fois supérieur aux 10 systèmes pétaflopiques actuels afin de répondre aux besoins du gouvernement ».

La Chine en tête du Top 500 depuis 2 ans  

Depuis deux ans, la Chine mène actuellement la course aux supercalculateurs avec l'ordinateur Tianhe-2, développé par l'Université Nationale de Technologies de Défense. Ce dernier attient la performance de 33,86 pétaflops au benchmark Linpack, soit près du double de celle du Titan, un superordinateur Cray XK7 exploité par le département américain de l’Énergie. L’US Department of Energy (17,59 pétaflops), selon de la dernière publication du Top500 des meilleurs supercalculateurs au monde en juin dernier.

Les États-Unis possèdent toujours le plus grand nombre de superordinateurs sur la liste Top500 avec 233 de ces machines en juin 2015, contre 265 sur la liste publiée en novembre 2013. Le gouvernement américain semble décider à remédier à cette situation. « Afin de maximiser les avantages du HPC dans les prochaines décennies, il faudra une réponse nationale efficace à la demande croissante en puissance de calcul, aux nouveaux défis et aux possibilités technologiques pour assurer notre indépendance économique et la compétition avec d'autres pays », a écrit M. Obama dans son ordonnance de mercredi.

Le ministère de la Défense au coeur du programme 

Un des objectifs de la NSCI sera de fournir une feuille de route viable au cours des 15 prochaines années, même après que les limites de la technologie des semi-conducteurs aient été atteintes pour entrer dans une « ère post loi de Moore ». Cette règle édictée par Gordon Moore, un des cofondateurs d’Intel, établissait un doublement de la densité des transistors environ tous les deux ans, afin d’obtenir des puces plus rapides et moins chers.

Les trois organismes auxquels rapportera le NSCI sont le ministère de l'Énergie, le ministère de la Défense, et la National Science Foundation, chacun se concentrant sur différents domaines du HPC. Ils travailleront de concert avec l'Intelligence Advanced Research Projects Activity (IARPA) et le National Institute of Standards and Technology (NIST), décrit comme des organismes de recherche et de développement fondamentaux. Alors que l’IARPA se concentrera sur les alternatives aux technologies semi-conducteurs, le NIST mettra l'accent sur le calcul scientifique.

En France le projet Tera-1000 attendu en 2020

Obama a également nommé les agences qui pourront exploiter en priorité ces ressources HPC en fonction de leurs exigences particulières. Il s’agit de la NASA, du FBI, de la National Institutes of Health, du Department of Homeland Security, et de la National Oceanic and Atmospheric Administration.

Le président Obama n'a cependant pas annoncé un calendrier précis pour la création de ce supercalculateur exaflopique. On sait juste que 3 milliards de dollars seront investis sur 10 ans pour livrer la première machine exaflopique. En Europe, une initiative a été lancée en 2011 avec la plate-forme technologique européenne (PTE) qui rassemble des acteurs industriels comme Allinea, ARM, Bull (du groupe Atos), CAPS entreprise, Eurotech, Partec, STMicroelectronics et Xyratex et des organismes de recherches comme le BSC (Barcelona SuperComputer), le CEA, le CINECA, le Fraunhofer, Forschungszentrum Jülich et le LRZ HPC. En France, le CEA a mis le cap sur l’exaflopique à l’horizon 2020 avec le programme Tera-1000 commandé à Bull, qui sera réservé à un usage militaire pour la simulation d’essais nucléaires.