Organiser la donnée dans un groupe de plus de 100 000 personnes, fonctionnant largement dans la cadre de contrats de délégation de services aux termes desquels l'attributaire transmet les actifs - données comprises - au nouveau titulaire du contrat. C'est à ce défi que s'est attaqué le groupe Transdev, en structurant voici trois ans un Data Office, placé sous la responsabilité de Laurent Verhoest, afin d'affirmer une stratégie commune au groupe, de mettre en place une gouvernance de la donnée et de déployer un socle technologique susceptible de porter les projets data.

« Nous ne nous inscrivons pas dans une démarche top-down. Nous travaillons avec les différents pays qui composent le groupe pour installer la légitimité de l'approche par la donnée, en montrant l'apport de cette dernière aux métiers. Une des meilleures façons d'embarquer les gens dans notre démarche consiste à montrer ce qu'elle leur apporte », dit Franck Ella, le responsable du Data Hub au sein du groupe Transdev, qui s'exprimait lors d'un événement organisé par l'éditeur Snowflake à Paris. Une plateforme qui a été retenue très tôt par le Data Office de Transdev, car elle était alignée avec la stratégie de migration vers le cloud de l'entreprise, elle proposait un modèle adapté à la montée en charge progressive, pays par pays, imaginée par l'équipe data et elle offrait une sécurité intégrée et une administration simplifiée. « Sans oublier certaines fonctions qui correspondaient à nos besoins, comme le Data Sharing », indique Franck Ella.

Un support aux programmes stratégiques, comme la maintenance prédictive

Dans l'architecture technique déployée par le Data Office, le hub Snowflake joue un rôle de pivot. L'outil est alimenté graduellement, cas d'usage par d'usage, depuis les multiples sources de données réparties dans les différents pays où opère Transdev (sachant que 7 pays concentrent 95% de l'activité). Les données sont stockées sur trois zones, en données brutes (Raw), normalisées et, enfin, optimisées. L'intégration est assurée par un outillage fourni par Talend.

Franck Ella, le responsable du Data Hub au sein du groupe Transdev : « nous voulons aller vers l'autonomie locale des métiers sur leurs données, ce qui implique une certaine expertise à chaque noeud de l'organisation ». (Photo : R.F.)

Ce socle technologique est mis au service des trois objectifs de la stratégie data du groupe : un fonctionnement data-driven, la responsabilisation de chaque entité sur son pilotage, via une prise en main de ses données, et le support des autres programmes stratégiques de Transdev, comme la maintenance prédictive ou la transition vers le zéro émission de gaz à effet de serre, sachant que 80% du parc de l'entreprise est constitué de bus. « Ce n'est pas un sujet IT, mais avant tout un sujet métiers, dit Franck Ella. Nous voulons aller vers l'autonomie locale des métiers sur leurs données, ce qui implique une certaine expertise à chaque noeud de l'organisation. Or, certaines filiales ne possèdent pas de Data Office. » L'équipe en central prend alors contact avec les compétences IT locales pour présenter sa démarche et évangéliser. « L'objectif est de les aider à monter leur équipe data et à les accompagner dans un premier projet simple, mais de nature à montrer la valeur de notre approche », décrit le responsable du Data Hub de Snowflake. Dans une organisation très décentralisée comme celle de Transdev, pour mettre en place une organisation de type Data Mesh (données en libre-service, métiers responsables de leurs jeux de données) - soit la cible avouée du Data Office -, il faut commencer par convaincre.

Consolider la flotte de bus

Pour y parvenir, le Data Office aligne déjà plusieurs projets. Certains sur des aspects techniques, comme la modernisation d'un datawarehouse SQL Server de plusieurs To, qui, en passant sur Snowflake, a vu ses coûts être divisés par 5 tout en voyant ses performances dopées (certains traitements passant de plusieurs heures à quelques minutes). Mais d'autres sont clairement orientés vers les opérationnels, comme la consolidation des flottes de bus. « Auparavant ces données étaient éparpillées dans des fichiers très disparates. En intégrant toutes ces données, et en y branchant un reporting sur PowerBI, nous avons supprimé les remontées manuelles de données auparavant obligatoires », assure Franck Ella. L'approche data permet encore d'effectuer une réponse ciblée à un appel d'offres, via l'intégration de différentes sources permettant au métier concerné d'effectuer différentes simulations.

« Au départ, nous utilisions Snowflake plutôt dans une approche de datawarehouse, note le responsable. Mais, de plus en plus, nous tendons à utiliser toutes les capacités de la plateforme dans le cadre de notre stratégie visant à mettre des produits data à la disposition des métiers. » Le socle technologique a été déployé au niveau du groupe, aux Pays-Bas et en France. Il est en cours de mise en oeuvre au Canada. Et la Suède évalue un premier projet pilote autour de Snowflake. « Nous allons poursuivre notre stratégie de déploiement progressif sur nos sept principaux pays », indique Franck Ella. Tout en veillant à doser l'effort, selon les termes du responsable. « En effet, quand on remporte un appel d'offres, l'IT y est intégrée. Ce qui signifie aussi que nous allons peut-être devoir rendre le parc à l'autorité de régulation, y compris les données associées, à l'issue du contrat », précise Franck Ella. De plus en plus, Transdev intègre justement à ses contrats des clauses relatives à la propriété des données d'exploitation.