Le ciel est leur limite. Olivier Pomel et Alexis Lê-Quôc, co-fondateurs de la société française spécialisée dans le monitoring des infrastructures cloud et conteneurisées Datadog (que nous avions déjà rencontré en 2015), ont été bien inspirés de ne pas se quitter après avoir bouclé leur cursus de Centrale Paris. Arrivés en 1999 aux Etats-Unis où ils sont entrés chez IBM Research, les deux compères ont ensuite vadrouillé dans plusieurs start-ups avant de rester plus longtemps, de 2002 à 2010, chez Wireless Generation, éditeur de logiciels dans le secteur de l'éducation. « Je faisais partie de l'équipe en charge de monter le réseau tandis qu'Alexis était chargé de le hacker », raconte Olivier Pomel, CEO de Datadog.
De cette expérience, le dirigeant a notamment retenu « des erreurs à ne pas faire » et à eu l'envie, commune, avec Alexis Lê-Quôc, d'apporter auprès des entreprises sa compréhension des systèmes et des applications tournant en production. « On est allé parler à des entreprises pour bien cerner leurs besoins et éviter d'inventer un logiciel qui ne sert à rien », explique-t-il. « Pour gérer la performance de leurs systèmes, tous les grands groupes ont des solutions IBM, CA ou BMC et HP mais ces dernières n'étaient pas portées vers le cloud ». Il n'en fallait pas plus pour que le crédo d'une solution de suivi de la performance des infrastrucutures cloud soit désormais pris.
L'open source dans la peau
Si au départ de la création de l'entreprise, en 2010, Datadog peinant à séduire les entreprises de secteurs traditionnels comme les banques, d'autres, les natives du cloud, se sont montrées beaucoup moins farouches. C'est ainsi que parmi les premiers clients de la start-up française, ont trouvaient alors Airbnb, Stripe ou encore Trillo. « Ces entreprises avaient des difficultés à gérer des environnements entièrement cloud de plus de 1 000 instances et fait de containers ou de micro-services », explique Olivier Pomel. L'une des principales caractéristiques - et point fort - de Datadog par rapport aux offres traditionnelles de gestion des actifs IT, se situe au niveau de sa prise en mains. « Avant les infra c'était pour les adminsys, maintenant avec le cloud, la transition se fait vers les équipes agiles et c'est pourquoi les entreprises se transforment pour gagner en compétitivité, enlever les barrières », fait savoir Olivier Pomel.
Exemple de monitoring de flux dans Datadog. (crédit : Datadog)
Après une version alpha en 2011, Datadog annonce une general availibility un an plus tard. Fruit d'un développement interne, cette solution a été créée en utilisant l'outil de Kafka (message queue) couplée à une base de donnée SQL dans un premier temps, avant NoSQL, PostgreSQL et Cassandra, ainsi que divers agents librairies et API également open source. « Ces briques ont été choisies pour aider les clients à instrumenter Datadog et leur permettre de faire un audit et de modifier ça eux-mêmes », précise Olivier Pomel.
Une technologie mainstream dans 2 ou 5 ans ?
Depuis, la société a engrangé les références clients, d'Intel à Telstra en passant par Sony, Hyatt ou encore Dupont et bien d'autres qui ne peuvent pas être citées. Le succès de Datadog est lié à l'évolution favorable de la perception du cloud par les entreprises, mais également à l'arrivée aux manettes de la direction informatique de DSI et de directeur technique plus jeunes, devant faire face à l'objectif d'une transformation digitale imposée par leur direction générale sous 2 ou 3 ans. « Au début les groupes avaient peur d'aller vers le cloud public et sont allés vers le cloud privé mais ce dernier manque de masse critique et il y a beaucoup de risque à parier sur un looser », avance Olivier Pomel. « Aujourd'hui elles ne veulent pas tout mettre dans le cloud public et la destination est l'hybride ». Il y a un an, on comptait chez nos clients 50% des instances managées dans le privé et sur les 50% restants dans le cloud 80% sur Amazon qui reste le cloud le plus mainstream devant Microsoft qui restes spécifique à leur environnement captif quand Google est un environnement plus moderne choisi par exemple par Spotify mais plus risqué pour un grand groupe ».
Outre les environnements cloud, la solution de monitoring de la performance Datadog s'est par ailleurs également ouverte aux containers et aux orchestrateurs. Un monitoring qui s'exerce plus avec des infrastructures virtuelles que legacy. « Certaines entreprises veulent donner du self-service à leurs équipes d'ingénieurs, ce qui est impossible avec vSphere et SCOM. D'autres préfèrent mettre Peoplesoft en environnement virtualisé et ne veulent pas forcément migrer vers Workday... On estime à 3% les workloads qui ont migré vers le cloud. Du côté des éditeurs historiques du monitoring, leur business a baissé de 3% qu'il compense par une augmentation de prix ou de l'ingénierie financière. On est optimiste pour que notre technologie devienne mainstream dans 2 ou 5 ans », explique Olivier Pomel.
Une ouverture vers le monitoring de métriques métiers
En attendant, la société fait monter d'un cran ses ressources. Aidé par une levée de fonds de 95 millions de dollars en janvier 2016 - et par un business porteur générant un chiffre d'affaires en très forte croissance, sans pour autant atteindre la rentabilité - Datalog recrute. A Paris, là où elle dispose d'un centre R&D aux côtés de New-York, la société compte doubler ses effectifs tous les ans qui atteignent pour l'heure la cinquantaine de collaborateurs. Dans le monde l'éditeur compte 450 employés. En termes de développement à l'international, la plaque Asie ne s'avère pas le marché le plus facile, sachant que l'essor en Europe est tiré par la Grande-Bretagne. Dans le monde, la société est utilisée par 6 000 clients, sachant que l'Europe en capte plus de 600 et la France plusieurs dizaines dont Dailymotion. « La transition vers le cloud a 2 ans de retard par rapport aux Etats-Unis et les processus d'achat sont très différents aussi », note Olivier Pomel. A ce titre, les Etats-Unis reste un objectif commercial fort qui va s'accompagner d'un renforcement conséquent de ses équipes de ventes.
Dans le cadre de sa croissance, Datadog a dernièrement mis la main sur Logmatic, une société spécialisée dans la gestion des logs. « Il n'y a pas de raison que les logs soient séparés du reste des signaux permettant de comprendre l'ensemble des événements système », explique le CEO. « Plus on a de flux de données, plus on est intelligent. La transformation business commence à générer de plus en plus de logs et Datadog permet aussi de suivre maintenant aussi bien des métriques infra que des métriques business comme des inventaires de caisses que du suivi d'impression publicitaire. En combinant à la fois des capacités en monitoring cloud, APM et des logs - deux derniers domaines où il est vient concurrencer AppDynamics et Splunk - Datadog pourrait bien - et plus que jamais - avoir ainsi dans les mains toutes les cartes pour réussir.
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