Le monde du calcul haute performance poursuit son développement, en particulier en France derrière l'écosystème d'industriels, de fournisseurs de technologies et d'acteurs académiques rassemblés par la technopole Teratec (85 membres). Au-delà du HPC (high performance computing), le Big Data et la simulation constituent les deux autres volets ciblés par le Forum Teratec 2015 (23 et 24 juin, Ecole Polytechnique, Palaiseau). La communauté du calcul intensif y converge cette semaine pour deux jours de conférences et d'ateliers. Pour sa 10ème édition, l'événement réunit 1 300 participants et 65 exposants. En ouverture, Gérard Roucairol, président de Teratec, a rappelé que les 34 plans d'origine de la Nouvelle France Industrielle mis en place par le précédent Gouvernement avaient été fusionnés en 9 programmes. Le plan Supercalculateurs qu'il supervise doit notamment diversifier les usages du HPC et mettre les ressources du calcul intensif à la portée des PME. Il prévoit aussi le lancement d'initiatives sectorielles comme la Vallée du numérique végétal, à Orléans, qui devra contribuer à diffuser la simulation dans des secteurs d'activités qui l'utilisent encore peu. Ce plan Supercalculateurs a été regroupé avec ceux du Cloud Computing et du Big Data sous une seule et même bannière, celle de l'Economie de la donnée, qui doit « créer ou consolider près de 137 000 emplois grâce au big data d'ici 2020 »

Dans une intervention vidéo, le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a insisté sur le gisement d'opportunités exceptionnel que représentait le big data. « Rien que cette année, les offres d'emplois mondiales liées au big data sont estimées à 4,7 millions », a-t-il indiqué en ajoutant que la croissance du marché du calcul intensif était chaque année de 4,5%. « La France a tous les atouts pour être leader dans ce domaine », a-t-il ajouté en souhaitant que le pays devienne un hub européen de la recherche sur ces questions. Le ministre a rappelé qu'Intel avait inauguré il y a quelques semaines un centre dédié au big data, « confirmant sa volonté de faire de la France la tête de pont de sa R&D en la matière », une décision qui, selon lui, laisse présager dans un avenir proche d'autres bonnes nouvelles.

Thierry Mandon, secrétaire d'Etat à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, considère que les industriels et les scientifiques doivent susciter un débat autour du traitement des big data. (crédit : LMI)

Etre au plus près de la puissance de calcul

« Tous les secteurs sont concernés par le big data », a insisté à son tour Thierry Breton, président d'Atos, qui a racheté l'an dernier Bull, constructeur national de supercalculateurs. « Très vite, il m'est apparu que les données allaient devenir l'enjeu essentiel de nos clients, de nos entreprises, qu'il fallait donc que nos ingénieurs soient au plus près de la capacité de calcul et que nous ayons la connaissance intime du traitement des données avec nos algorithmes », a-t-il souligné en clôture de la journée, appréciant que ces compétences aient pu être préservées dans l'Hexagone. La France est l'un des quatre pays au monde (avec les Etats-Unis, le Japon et la Chine) et le seul en Europe à disposer d'une expertise HPC de cet ordre. « Nous avons tout pour bâtir cet environnement qui va être nécessaire pour les générations à venir et nous devons faire connaître tout cela aux acteurs publics », a-t-il indiqué en n'omettant pas de mentionner, en corollaire, le fait que cette industrie était très consommatrice d'énergie. « Et ce sont des sujets qui ne sont pas à prendre à la légère », a-t-il rappelé.

Susciter des débats autour des enjeux des big data

A sa suite, Thierry Mandon, secrétaire d'Etat chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, a reconnu que « dans cette bagarre mondiale, il y aura besoin de fonds publics ». Dans ce contexte, il constate qu'une désynchronisation se produit entre le rythme des acteurs industriels, des scientifiques et des citoyens. « Si ces enjeux-là ne sont pas compris par les citoyens, s'ils ne comprennent pas ce que le big data peut apporter, ce sera difficile pour un pays comme la France de continuer à soutenir ses acteurs industriels », a-t-il exposé. « Il y a des personnes qui s'inquiètent du big data, il faut faire des débats avec eux. Il faut redescendre dans l'arène, dans le grand public, pour irriguer la société du potentiel de ces technologies et de leurs capacités à fournir des progrès ». Pour lui, les « nouveaux » scientifiques et industriels ne doivent pas craindre le débat avec la société mais au contraire le susciter. En conclusion, Thierry Mandon a lui aussi reconnu que les questions de consommation d'énergie et d'empreinte écologique des datacenters étaient essentielles. Nous reviendrons dans un prochain article sur les évolutions des offres HPC présentées sur Teratec.