Créée par trois Français à San Francisco en 2015, l’école de développement informatique Holberton School va démarrer un cursus en ligne en France à la rentrée 2020 et financer elle-même la première promotion d’étudiants. Le prix de la 1ère année est normalement fixé à 6 120 €. Comme chez 42, le parcours d’admission à Holberton School peut être tenté par tout passionné de technologie IT, sans pré-requis de niveau d’études, à partir de 18 ans et sans limite d’âge. Pas d'épreuve de la piscine ici, mais une série de tests en ligne, ponctués par la création d’un site web, afin de mettre en évidence les qualités et la forte motivation des postulants pour ces métiers liés à l'écriture de code. Ce processus se déroule de façon automatisée pour éviter tout risque de biais. Car Holberton School a été constituée avec la volonté d’augmenter la diversité dans l’univers des compétences IT. Son cursus comporte une 1ère partie de 9 mois, soit une année scolaire. Ce sont les « Foundations ». La plupart des étudiants le mettent immédiatement à profit pour trouver un emploi. Mais ceux qui le souhaitent peuvent également opter pour une spécialisation (2 040 €) : programmation de bas niveau & algorithmes, réalité augmentée et réalité virtuelle, machine learning et développement web full-stack. Le contenu de la formation (syllabus) se télécharge sur le site où l'on trouve aussi un FAQ détaillé. En France comme ailleurs, les sessions de live coding dispensées se feront en anglais.

Le nom de l'école rend hommage à Betty Holberton, l’une des six programmeuses de l’Eniac. La première promotion comptait déjà 40% de femmes. Depuis ce lancement, les co-fondateurs Julien Barbier et Sylvain Kalache, deux anciens élèves de l’Epitech et de Supinfo, ont progressivement implanté 12 autres campus, aux Etats-Unis (à New Haven et Tulsa), à Porto Rico, en Colombie, en Tunisie, en Uruguay, au Liban et bientôt, au Mexique. L’ouverture dans l’Hexagone était prévue pour 2021. Elle se fera finalement dès le 7 septembre prochain, accélérée par la nécessité de former rapidement des compétences informatiques dans ce contexte de crise économique et sanitaire. Une autre raison a pressé cette décision, les déboires de Supinfo, l’une des plus importantes écoles d’informatique françaises, mise en liquidation judiciaire cet été. Pour cette rentrée française, Holberton School va donc d’une part, à hauteur d’1 million d’euros, prendre en charge le cursus des 165 premiers étudiants qu'elle admettra et, d’autre part, financer également les frais de scolarité de la 1ère année d’études Holberton pour les étudiants de Supinfo qui voudront suivre son cursus.

Une cohorte de 300 étudiants

L’école créée à San Francisco s’est par ailleurs mise sur les rangs des offres de reprise de Supinfo auprès du tribunal de commerce de Paris. « Quel que soit le repreneur, nous nous engageons à offrir la 1ère année à tous les étudiants qui souhaitent nous rejoindre », nous a confirmé Sylvain Kalache, joint par téléphone. Il explique qu’en tant qu’ancien élève du groupe en difficulté, cette initiative lui tient particulièrement à coeur, ainsi qu’à Julien Cyr, directeur des opérations d’Holberton, lui aussi ancien de Supinfo. L’ancrage que Sylvain Kalache conserve dans la communauté française renforce encore l’importance du projet d’école IT dans l’Hexagone. La recherche d’un campus avait été entreprise en prévision de l’implantation en 2021. Mais les circonstances ont hâté le processus et le campus sera pour l'instant virtuel. Interrogé sur le nombre d’élèves qui pourraient être admis en septembre en France, le co-fondateur l'évalue à une cohorte d’environ 300 personnes. 

Depuis la propagation du coronavirus au 1er trimestre, les cursus d’Holberton se suivent désormais en ligne, avec succès, même si certains campus ont été rouverts. En France comme ailleurs, il y aura trois rentrées : en septembre, en janvier et en juin. Dans les autres écoles du groupe, la rentrée de juin dernier a déjà été effectuée entièrement en ligne, un test de bonne augure pour l’ouverture française de septembre. « Nous orchestrons la collaboration », explique Sylvain Kalache en ajoutant que, de toutes façons, même sur site, il faut amorcer la collaboration entre les étudiants pour qu’elle fonctionne bien. « En ligne, c’est pareil, nous utilisons différents formats, textes, vidéos, etc., nous mettons en place différents groupes et nous avons développé des outils ». Face aux autres concepts d’enseignement, le co-fondateur d’Holberton School indique volontiers que 42 et Epitech sont parmi les écoles les plus proches de celle qu’il a co-créée. « Par rapport à 42, par exemple, nous utilisons les mêmes outils, nous avons une philosophie similaire, mais il y a aussi énormément de différences ». Chez Holberton, on apprend les capacités techniques et, de façon très complémentaire, on met aussi beaucoup l’accent sur les « soft skills » et la capacité à communiquer, à l’oral et par écrit. « Nous faisons rédiger des posts aux étudiants, mais aussi des rapports d’incidents, par exemple. Il faut une balance entre la connaissance du métier et les qualités humaines », souligne le co-fondateur.

20 h pour réaliser les épreuves d'admission 

Depuis sa création, Holberton School a accueilli 1 500 étudiants. Les candidats français qui souhaitent passer les épreuves d’admission ont encore une bonne quinzaine de jours pour s’inscrire en ligne. Selon Sylvain Kalache, il faut environ une vingtaine d’heures pour achever les tests et réalisations demandés. Une estimation qui varie bien sûr suivant les candidats. Une fois l’admission acquise, les étudiants ne doivent pas s’attendre à des cours magistraux. Ils devront collaborer autour de projets avec les autres élèves. « Nous sommes désormais une école internationale et les étudiants s’entraident », rappelle le co-fondateur. Il faut savoir maîtriser la communication en ligne et jongler avec les zones horaires. La formation laisse également la parole à de nombreux intervenants, professionnels, experts et entrepreneurs, qui viennent témoigner de leur expérience. L’école est notamment soutenue par Jeff Weiner, ancien CEO de Linkedin, Jerry Yang, fondateur de Yahoo, Solomon Hykes, fondateur de Docker, ou encore Stéphane Kasriel, ancien DG de Upwork. 

Outre-Atlantique, un certain nombre d’étudiants de l’école ont décroché des postes au sein des entreprises phares de la Silicon Valley, chez LinkedIn, Google, Tesla, Docker, Apple, Dropbox, Facebook, Pinterest, ou encore chez Genentech, Cisco, IBM et d’autres. Aux Etats-Unis et dans les autres pays, les étudiants ne règlent leur cursus de formation que lorsqu’ils ont un emploi dont la rémunération se situe au-delà d’un certain seuil (à titre d’exemple, 40 000 $ outre-Atlantique, 300 000 pesos au Mexique). En France, il est plus difficile de mettre ce type de système en place. Holberton étudie donc la piste de bourses partielles ou totales ou de prêts étudiants à taux zéro. En décembre dernier, l’école a fait un point sur les conditions d’emploi des anciens étudiants depuis la cohorte 0. Il apparaît que 59% d’entre eux ont trouvé un poste en 3 mois et 78% en 6 mois. Sur la base des réponses fournies (auto-déclarées), leur salaire médian actuel s’élèverait à 109 K$ (brut) pour un poste à temps complet.