Les investissements dans l’informatique quantique se poursuivent, un marché stratégique sur lequel s’engagent les fournisseurs IT et les états, dont la France qui a annoncé début janvier une plateforme nationale de calcul quantique hybride. Cette fois, ce sont HPE et Samsung qui viennent de participer à un tour de table de 33 M$ réalisé en série B par l’éditeur de logiciels israélien Classiq. Ce dernier développe une solution de QAD (Quantum Algorithmes Design) pour la conception et l’optimisation de circuits et d’algorithmes quantiques. La technologie fournie « aide les équipes quantiques à automatiser le processus de conversion de modèles fonctionnels de haut niveau en circuits quantiques optimisés », décrit la société sur son site en ajoutant que sa plateforme permet ainsi de concevoir des algorithmes quantiques impossibles à créer autrement. Les utilisateurs peuvent combiner des modules quantiques intégrés avec ceux qu’ils ont définis, puis indiquer des contraintes comme le nombre de portes, la profondeur du circuit et les niveaux d’intrication. La plateforme Classiq va alors synthétiser un circuit optimisé qui aurait requis des semaines s’il avait été construit manuellement, indique son éditeur.

HPE et Samsung ont investi par l’intermédiaire de leurs fonds respectifs, Hewlett Packard Pathfinder et Samsung Next, aux côtés d’autres entrants dans la société comme Phoenix (groupe d’assurance), Spike Ventures et les investisseurs privés Lip-Bu Tan (ancien CEO de Cadence Design Systems) et Harvey Jones (ancien CEO de Synopsys). Ils ont rejoint les fonds déjà présents au capital, Wing VC, Team8, Entrée Capital, Sumitomo Corp (via IN Venture) et OurCrowd.

Une plateforme agnostique vis-à-vis du matériel

Depuis sa création à Tel Aviv il y a 20 mois, Classiq a levé 48 M$. La société co-fondée par Nir Minerbi, son CEO, Amir Naveh, responsable des algorithmes, et Yehuda Naveh, CTO, réunit des experts de l’informatique quantique, de physique théorique, des technologies de CAO et de l’IT. « Ce nouveau financement arrive à un moment pivot ; l’industrie quantique passe maintenant des services de conseil aux produits et du prototype à la production », commente Nir Minerbi dans un communiqué. Avec les fonds obtenus, Classiq va ouvrir d’autres bureaux dans le monde et renforcer son équipe d'ingénieurs et de chercheurs pour poursuivre son développement et déposer des brevets de conception d’algorithmes quantiques.

Classiq laisse ses utilisateurs construire leur pile quantique en restant agnostique vis-à-vis du matériel.

Hewlett Packard Pathfinder se dit impressionné par le moteur de Classiq qui automatise la création de circuits quantiques et « conduit à abaisser de façon significative les barrières d’entrée dans l’informatique quantique », indique Paul Glaser, vice-président, responsable du fonds de HPE. De son côté, Boaz Morris, investisseur chez Phoenix, souligne que si le matériel quantique a fait des progrès impressionnants, le logiciel utilisé pour les opérer reste très insuffisant. « La plateforme de Classiq, agnostique par rapport au matériel, permet aux entreprises de développer des logiciels quantiques sophistiqués plus vite et mieux que n’importe quelle autre méthode », estime-t-il dans un communiqué. Enfin, l’éditeur israélien a suscité l’intérêt des investisseurs indépendants Harvey Jones et Lip-Bu Tan qui viennent de la conception par ordinateur, puisque les entreprises qu'ils dirigeaient, Synopsys et Cadence, réalisent pour la conception électronique ce que Classiq propose aujourd’hui pour la conception de logiciels quantiques.

Un marché global de 490 M$ en 2021

Le marché mondial du quantique n’en est qu’à ses débuts. Il vient d’être estimé à 490 M$ en 2021 dans une récente étude d’Hyperion Research pour le compte de QED-C et QC Ware avec l’appui du consortium européen de l’industrie quantique et l’industrie quantique du Canada. Sa valeur devrait progresser à un rythme annuel de près de 22% jusqu’en 2024 pour parvenir à 888 M$. Le chiffre d’affaires des logiciels quantiques, englobant les applications et le middleware, représente 35% du total, le matériel (sur site et accessible dans le cloud) pèse 23%, l’accès aux services de cloud quantique par les utilisateurs, 16% et les services professionnels 14%.

En France, le mois dernier, la société Pasqal qui conçoit et produit des simulateurs quantiques a racheté l’éditeur de logiciels quantiques néerlandais Qu&Co pour fusionner leurs projets. Pasqal conçoit et produit des processeurs quantiques basés sur la technologie des atomes neutres. Parmi les récents rapprochements sur le marché, Honeywell a créé en décembre dernier la société Quantinuum avec Cambridge Quantum.