Satisfaisant pour les uns et illégal pour d’autres. L’usage des drones de surveillance par les forces  de l’ordre dans le cadre des manifestations du 1er mai continue d’alimenter la polémique notamment sur le plan juridique. Acté par le décret du 19 avril 2023 autorisant l’utilisation des drones et des caméras aéroportées par les services de police et gendarmerie nationales, les douanes et les militaires, la CNIL a communiqué en fin de semaine dernière son avis sur ce sujet sensible.

Un encadrement de l'usage des drones par la Cnil

Parmi les engagements prévus par la loi, des quotas fixent le nombre maximal de drones pouvant être autorisés dans chaque département. De plus, leur utilisation doit être notifiée par décision écrite et motivée du représentant de l'État dans le département ou, à Paris, du préfet de police. Les autres obligations devant être respectées sont les suivantes : les caméras aéroportées ne peuvent ni procéder à la captation du son, ni comporter de traitements automatisés de reconnaissance faciale.

En outre, les images captées ne peuvent être conservées que pour une durée maximale de 7 jours à compter de la fin du déploiement du dispositif. C'est dans son avis du 16 mars 2023 que la commission a émis des observations supplémentaires, notamment sur les conditions de mise en œuvre des drones et l’information des personnes. Elle considère que « la diversité des situations opérationnelles auxquelles les forces de l’ordre sont confrontées n’a pas permis de définir des critères exhaustifs déterminant les situations pouvant donner lieu à enregistrement ou la transmission en temps réel des images au poste de commandement des forces de l’ordre ». Pour l’organisme garant des libertés publiques, de telles précisions devront figurer dans une « doctrine d’emploi » à l’usage des forces de l’ordre, qui devra lui être communiquée.

Des attentes sur la communication au public

Une information générale du public sur l'emploi des drones et leur autorisation doit être délivrée par le ministère de l'Intérieur dans le cadre d’une intervention particulière, préconise aussi la Cnil. La commission  recommande par ailleurs de communiquer sur le lieu de l’opération au cours de laquelle les caméras aéroportées seront utilisées (par exemple via des dispositifs sonores), notamment lorsque les drones sont utilisés pour sécuriser des manifestations.

Concernant le décret du 19 avril 2023, elle évoque un « acte réglementaire unique », ce qui signifie que les administrations souhaitant utiliser de telles caméras devront formellement s’engager à respecter les conditions fixées pour les utiliser. En conclusion, la Cnil rappelle qu’elle pourra contrôler les dispositifs de caméras aéroportées et, comme elle l’a déjà fait dans le passé, prononcer des mesures correctrices.

Des réponses dispersées pour les juridictions administratives

Si la Cnil a donné son avis, des juristes et des avocats ont contesté en référé auprès des tribunaux administratifs l’usage des drones de surveillance. Or force est de constater que les décisions des ces juridictions sont variées. A Paris, l’arrêté de la Préfecture de Police a été validé alors qu’à Rouen il a été partiellement suspendu en réduisant la zone et la plage horaire autorisées. D’autres ont rejeté les requêtes comme à Lyon pour défaut d’urgences. Face à ces diversités de réponses, les yeux se tournent maintenant vers le Conseil d’Etat qui doit examiner le 16 mai prochain un recours contre le décret du 19 avril 2023.