En collectant les cotisations sociales, le réseau des Urssaf réunit sur les entreprises une masse de données d’une très grande richesse et dispose ainsi de capteurs très avancés sur la situation économique et l’emploi. « C’est un patrimoine commun, notre rôle est de le mettre à disposition du grand public », a déclaré hier à Paris Yann-Gael Amghar, directeur de l’Acoss, la caisse nationale du réseau des Urssaf, à l’occasion de l’ouverture du portail open.urssaf.fr. Cette manne est désormais facilement accessible pour les chercheurs, collectivités locales et territoriales ou chambres de commerce pour analyser le tissu socio-économique ou pour tout autre utilisateur et d’autres usages à créer.

Le site propose déjà 14 jeux de données à explorer : effectifs salariés et salaires du secteur privé, par régions, départements, secteurs d’activité ou zones d’emploi, données sur les particuliers employeurs issues des dispositifs Cesu, Pajemploi et DNS, ou encore déclarations préalables à l’embauche par région. Autant  indicateurs de bonne ou mauvaise santé. A travers les déclarations des entreprises, « en 2008, nous avons été parmi les premiers à voir la crise arriver », cite en exemple Yann-Gael Amghar. Les données, sous licence ODbL, s’exportent au format CSV, XLS et JSON et via des API pour les exploiter dans des applications ou créer des services en bénéficiant de leur actualisation. Leur réutilisateur doit en mentionner la source et les garder ouvertes. Le site propose des API libres avec des données anonymes librement accessibles et des API partenaires à accès restreint, accessibles à des co-contractants sur critères d’éligibilité. Le portail propose aussi des data-visualisations, les premières portant sur les 3,37 millions de particuliers qui emploie 1,3 million d’employés (total d’heures déclarées, masse salariale nette annuelle…).

Créer des usages et de la valeur

Au-delà de cette mise à disposition, un objectif d’innovation ouverte et de création de valeur est expressément recherché par les promoteurs du portail. « Nous transformons et valorisons beaucoup de données dans le cadre de nos missions », explique Carole Leclerc, directrice Innovation et Digital de l’Acoss, une entité créée il y a 18 mois pour accompagner la capacité d’innover des autres directions de l’établissement et les utilisateurs de ses services. Ce matin, Carole Leclerc a exposé l’ambition de l’Acoss de voir ce partage de données avec tout public déboucher sur « de nouveaux usages, de nouvelles analyses, représentations ou services ». Parmi les initiatives, le Lab Urssaf a été créé il y a un an pour faciliter les rencontres. Une fois par mois, des start-ups y présentent leurs services, susceptibles d’être utilisés en interne par l’Urssaf qui réunit 15 000 collaborateurs.

Le portail Open.urssaf.fr a été bâti sur le logiciel d’Opendatasoft, référencé à l’Ugap. L’éditeur est bien implanté dans le paysage de l’open data avec 300 clients (65% en France) dont la moitié dans le secteur public. Pour ses clients français, il opère sa solution en mode SaaS sur les infrastructures cloud d’Outscale, filiale de Dassault Systèmes.

Des données accessibles au niveau le plus fin

Par rapport aux statistiques publiques, fournies à un niveau macro sur un échantillon limité, les données des Urssaf « permettent de revenir au niveau le plus fin », a souligné ce matin Alain Gubian, directeur de la statistique, des études et de la prévision de l’Acoss. Les entreprises sont identifiées par leur code NAF (nomenclature d’activité), avec des restrictions sur les données locales pour éviter les identifications dans les petites communes. Les données mises à disposition sont qualifiées, l’Acoss les ayant déjà travaillées pour constituer ses entrepôts de données et la mettre au service de ses métiers, pour du datamining notamment. Parmi les nouveautés, le portail va apporter des informations sur les travailleurs indépendants, au-delà de celles déjà disponibles sur les micro-entreprises. Toutes ces données vont permettre de faire des comparaisons fines entre les régions pour créer des observatoires et voir comment chaque région contribue à la création de postes en France.