Dans son étude annuelle, l’Uptime Institute montre que la fin des datacenters n’est pas pour demain. Si le constat de ce rapport n’est pas surprenant, il met cependant en évidence une tendance de ces dernières années : la stagnation de l'efficacité énergétique. Selon Uptime, entre 2007 et 2013, l'efficacité énergétique des datacenters a été fortement améliorée, principalement grâce à des méthodes faciles ou peu coûteuses, comme le simple confinement de l'air. Mais pour aller au-delà, il faudrait entreprendre des modifications plus complexes ou plus coûteuses. En fait, selon l’institut, depuis 2013, les gains en efficacité énergétique (PUE) ont été marginaux.

Uptime explique cette stagnation par une densité de puissance toujours plus élevée. « Pendant la dernière décennie, et sans doute bien avant, l'industrie a mis en garde contre une augmentation excessive de la densité de puissance des racks informatiques », indique le rapport. Cette mise en garde prenait notamment en compte la prolifération des charges de travail à forte intensité de calcul (IA, IoT, cryptomonnaies, réalité augmentée et virtuelle), qui impliquent toutes le recours à des racks haute densité. « Nos enquêtes de 2018 et 2019 ont montré que les racks offrant des densités de 20 kW, et au-delà, étaient devenus la norme dans de nombreux datacenters ». Or, à 20 kW par rack, le refroidissement par air n'est plus adapté, et le refroidissement direct par liquide et le refroidissement de précision par air deviennent plus économiques et plus efficaces. Si le rapport tempère en disant que ces densités élevées ne sont pas assez courantes pour avoir un impact sur la plupart des datacenters, il conseille néanmoins de ne pas ignorer cette tendance, car la densité moyenne de puissance des racks de datacenters a augmenté régulièrement, passant de 2,4 kW par rack en 2011 à 8,4 kW par rack en 2019.

Problèmes récurrents de courant

Un autre problème auquel sont confrontés les opérateurs de datacenters est celui des interruptions de courant, à l’origine de pannes de plus en plus importantes. « Il est clair que la fréquence des pannes est inquiétante, d’autant que ces pannes, plus sérieuses, sont de plus en plus dommageables et coûteuses, si bien que ce que l’entreprise a gagné en termes d'amélioration des processus et d'ingénierie a été partiellement contrebalancé par les défis liés à la maintenance de systèmes toujours plus complexes », indique encore le rapport. L'enquête a également révélé que les opérateurs conservaient leur matériel plus longtemps. En 2015, le cycle de rafraîchissement le plus répandu était de trois ans, contre cinq ans en 2020. Cette tendance va probablement se poursuivre dans le contexte d'incertitude que crée la pandémie de Covid-19.

L'enquête d’Uptime a donc montré que, malgré l’adoption des clouds publics, les infrastructures sur site n’étaient « ni en fin de vie, ni mourantes ». Elle conclut que « le secteur des datacenters d’entreprise, même s'il n'est pas nécessairement le plus innovant, restera le socle de l'informatique d'entreprise au cours de la prochaine décennie ». Concernant l’usage des datacenters par les entreprises, 58% des personnes interrogées pour les besoins de l’enquête ont déclaré que la plupart des charges de travail étaient toujours exécutées dans les datacenters des entreprises. Selon Uptime, ce pourcentage devrait redescendre à 54% au cours des deux prochaines années. Parmi les personnes interrogées, 16% ont déclaré qu’elles utilisaient des installations en colocation, et que 12 % des charges de travail devraient migrer vers un cloud public d'ici 2022.

Méfiance vis à vis du cloud

Alors, pourquoi les entreprises sont-elles aussi méfiantes envers le cloud ? Selon Uptime, le manque de visibilité, de transparence et de responsabilité des services de cloud public est un problème majeur pour les entreprises qui exécutent des applications critiques. Elles veulent plus de visibilité sur la façon dont les fournisseurs de cloud gèrent leurs opérations. Si elles avaient cette visibilité, elles seraient plus disposées à utiliser un cloud public. Seulement 17 % des personnes interrogées déclarent que leur entreprise dispose d'une visibilité adéquate et que celle-ci a migré ses charges de travail critiques dans un cloud public. 10% des personnes interrogées disent que leur entreprise n'a pas assez de visibilité, mais qu’elle a quand même déplacé ses charges de travail critiques dans le cloud. Plus important encore, 21 % des personnes interrogées disent que leur entreprise déciderait d’exécuter des charges de travail critiques dans un cloud public si le niveau de visibilité sur la résilience opérationnelle du service était plus élevé.