Des ingénieurs de l'Université de Stanford affirment avoir inventé une technologie qui permettrait aux abonnés au réseau haut débit d’exercer eux-mêmes un contrôle sur le trafic internet. Appelée Network Cookies, elle permettrait aux clients de décider quelles données ils veulent recevoir en priorité par rapport à celles qu’ils considèrent comme moins urgentes. Par exemple, un client haut débit pourrait décider que le trafic des vidéos de Netflix doit passer avant les messages électroniques. Selon les professeurs Nick McKeown et Sachin Katti, et l’étudiant en ingénierie Yiannis Yiakoumis, « cette technologie pourrait mettre un terme à l’interminable débat sur la neutralité du Net, qui n’arrive pas à déterminer si les fournisseurs d’accès haut débit ont le droit d’établir des priorités sur le trafic et s’ils peuvent bloquer ou limiter le débit de certaines données circulant sur le réseau ».

Présentée pour la première fois en août dernier au Brésil, Network Cookies mettrait les fournisseurs d’accès haut débit et les fournisseurs de contenu sur un pied d’égalité en terme de respect des préférences utilisateurs, ont encore expliqué les chercheurs. « Avec cette technologie, les utilisateurs définissent eux-mêmes leurs priorités », a souligné Yiannis Yiakoumis dans un courriel à nos confrères d’IDG News Service. « Il serait possible de leur donner le choix et ce serait bénéfique pour tout le monde. Par ailleurs, la technologie permet une meilleure transparence et une vérification des processus de gestion », a-t-il précisé. Il est cependant difficile de savoir si les fournisseurs d’accès haut débit seraient favorables à cette technologie, dans la mesure où Network Cookies les priverait d’une partie de leurs prérogatives sur la gestion du réseau. Une porte-parole de USTelecom, un fournisseur d’accès haut débit, a refusé de commenter l’information.

Network Cookies testé dans 161 foyers avec la participation de Google

Les chercheurs ont testé la technologie Network Cookies en situation réelle dans 161 foyers sélectionnés avec la participation de Google. À l’aide d’une application appelée Boost, ils ont pu décider comment hiérarchiser le trafic entre les sites d’actualités, la vidéo, la musique et le sport. En ce qui le concerne, Yiannis Yiakoumis est convaincu que la technologie serait utile aux fournisseurs d’accès Internet. Ceux-ci « pourraient s’en servir comme élément différenciateur et ils pourraient s’engager davantage vis-à-vis de leurs clients, en collant aux principes de la neutralité du Net », fait-il valoir. « Par ailleurs, les fournisseurs d’accès haut débit conserveraient le contrôle sur leurs infrastructures et pourraient décider de fournir en options un service à faible latence, un service à bande passante élevée, ou un trafic data gratuit avec une bande passante réduite », a-t-il encore expliqué. « Les FAI pourront décider quels services proposer, avec quelles garanties, et ils resteront maîtres de la mise en œuvre de ces services sur leur réseau », a-t-il ajouté. « Par contre, les utilisateurs pourront décider eux-mêmes comment utiliser ces services et quel niveau de trafic leur réserver. Je pense que cette approche est plus simple à gérer pour les fournisseurs de services Internet. En effet, au lieu d'essayer de deviner ce que veulent les utilisateurs, ils peuvent les laisser choisir ».

Mais que se passerait-il si certains utilisateurs haut débit désignaient tout le trafic comme prioritaire ? « On peut imaginer des mesures incitatives pour que les clients utilisent cette capacité de contrôle correctement ou leur demander de choisir entre les applications », estime Yiannis Yiakoumis. « Les fournisseurs d’accès Internet pourraient également imposer des quotas mensuels sur les connexions à grande vitesse ou faire payer un supplément pour les services à faible latence », a-t-il ajouté. Selon lui, « ce n’est pas très différent de ce qui se passe aujourd'hui où l’on peut s’abonner à une formule à 10 ou à 50 Mb/s. Nous disons simplement que c’est aussi bien que le client puisse avoir les deux formules en même temps et qu’il puisse décider lui-même comment répartir ce trafic ».