Le logiciel Open Source est un logiciel commercial comme un autre. C'est du moins l'impression qu'on pouvait retirer de la conférence d'introduction de Solutions Linux, qui ouvrait aujourd'hui au Cnit de Paris-La Défense. Les intervenants de Jaspersoft ou de SpikeSource, pour intéressants qu'ils furent, n'avaient de fait rien à envier à leurs confrères des éditeurs de logiciels propriétaires, puisqu'il s'agissait finalement de vendre sa solution. Kim Polese, de SpikeSource, ou Philippe Donche-Gay, de Capgemini, ont tout de même apporté des éléments de réflexion qui pouvaient intéresser des gens s'interrogeant encore sur la pertinence de l'Open Source, ou tout simplement se demandant quel est son avenir. Kim Polese est ainsi revenue sur les trois questions que la presse - et ses lecteurs - posent généralement : les logiciels libres vont-ils supplanter les logiciels propriétaires ? Les sociétés Open Source seront-elles absorbées par leurs concurrents propriétaires ? L'Open Source finira-t-il par être massivement adopté ? Aux deux premières, la dirigeante de SpikeSource a répondu de façon nuancée : si le Libre sera prédominant, il ne supplantera pas le modèle propriétaire, et si les sociétés Open Source se font massivement racheter, c'est pour mieux changer les éditeurs commerciaux de l'intérieur. Résoudre le problème des briques non synchronisées A la troisième question, Kim Polese a préféré répondre au « comment » de la chose, en expliquant que ce qui manquait aujourd'hui pour que le Libre soit considéré comme massivement adopté, c'est qu'il soit plus largement présent sur les postes de travail et dans les petites et moyennes entreprises. Pour les postes de travail, le monde du Libre doit compter sur le portage des applications les plus populaires par les grands éditeurs. Pour les PME, il manque, dit-elle, « des applications simples à utiliser ». Constatant que les offres Open Source sont basées sur des dizaines de briques aux cycles de développement non synchronisés, engendrant des risques de déstabilisation d'autant plus importants que les composants sont mis à jour très fréquemment, Kim Polese a affirmé : « Aujourd'hui, recourir à l'Open Source signifie une succession sans fin d'assemblage, de tests et de correction ». Un constat dur, mais qui préparait le terrain pour la solution automatisée de test et de correction vendue par SpikeSource (utilisée par OpenExchange, JasperSoft, Alfresco...). De son côté, Philippe Donche-Gay, qui dirige le groupe Open Source de Capgemini, a estimé que c'est l'attitude même de certains éditeurs qui finirait par pousser les clients dans les bras du Libre. Il a ainsi raconté l'anecdote suivante : « Vous savez que Microsoft organise tous les ans quelque chose à l'usage d'environ 50 PDG du monde entier. Paul Hermelin, le PDG du groupe, y était invité comme l'année précédente. Un soir, il m'appelle, et me dit : Steve Ballmer m'est tombé dessus avec se gros yeux en disant qu'on est l'apôtre de l'Open Source au ministère des Finances, que faisons-nous ? » SOA et Open Source, alliance objective pour Capgemini Peu disert sur les nouveaux modèles de support qu'il développe à l'usage des grands clients intéressés par l'Open Source mais dont l'existant est déjà conséquent (Michelin, RATP, EDF, Caisse d'Epargne, Airbus, Cnes, Mairie de Paris...), discret également sur ses relations avec les SSLL (sociétés de services en logiciels libres, naguère partenaires et que la SSII concurrence de plus en plus), Philippe Donche-Gay a toutefois eu le mérite de repositionner la stratégie Open Source de Capgemini dans une stratégie globale. Pour lui, la progression du concept de SOA (architectures orientées services) implique une transformation des systèmes d'information, qui seront de plus en plus basés sur des composants, « à forte connotation métier », dont un certain nombre proviendra du domaine Open Source. Pendant ce temps, sur la partie salon de Solutions Linux, les exposants accueillaient comme d'habitude beaucoup de monde, l'effervescence la plus marquée pouvant s'observer au village des associations. Etudiants attardés en t-shirt, barbus sirotant une bière en tapotant sur leur ordinateur, ou bénévoles associatifs avenants rappelaient que l'Open Source n'est pas non plus qu'affaire de business.