Comme nous vous le précisions précédemment, l’entreprise aura le choix d’utiliser la plateforme ou le portail public de facturation (PPF) de l’Etat qui sera une émanation de Chorus Pro ou bien une plateforme de dématérialisation partenaire (PDP) certifiée par l’Etat pour une durée de trois ans renouvelables. Le PPF sera une plateforme accessible gratuitement aux entreprises et proposera de ce fait un service minimum mais universel de la facture électronique ; ce portail permettra de transmettre, déposer ou saisir en ligne les factures et bien sûr d’en recevoir. A l’opposé, une PDP sera payante mais cette plateforme privée ou commerciale proposera davantage de services en échange (automatisation, visibilité, gestion de la trésorerie, préparation au paiement/gestion du paiement, reporting, gestion de la solvabilité, capacité de commande en amont, etc.). « Une trentaine de plateformes PDP serait en cours d’immatriculation, et ce, dès ce mois de juin 2023 », indique à ce titre Grégoire Leclercq, directeur général délégué de EBP. De son côté, Thomas Honegger, COO de Esker France Benelux et Suisse, estime à terme un nombre de 70 plateformes environ certifiées par l’Etat. Etant donné les flux colossaux de facture à venir, la plateforme de l’Etat sera-t-elle, à terme, capable à elle-seule de supporter ce niveau de charge ? Rien n’est moins sûr pour Grégoire Leclercq qui évoque un possible désengagement de l’Etat sur certaines catégories d’entreprises. Elles n’auront alors pas d’autres choix que de se tourner vers une PDP. Ces PDP serviront en quelque sorte de concentrateurs de flux vers le portail public de facturation. Une affaire à suivre donc…  

Les acteurs de la dématérialisation en pole positon  

Quels types d’acteurs proposeront des PDP ? Des éditeurs de solutions de gestion (voir dernière partie) mais surtout des acteurs de la dématérialisation comme Docoon, Yooz, Esker ou encore Weexa qui seront probablement sur la liste des PDP dévoilée en septembre prochain. Rappelons qu’à l’heure où nous écrivons ces lignes, aucune plateforme partenaire n’est donc encore agréée par l’Etat. « Un acteur comme Esker qui opère sur l’ensemble des flux fournisseurs et clients a tout intérêt à proposer une solution complète pour assurer la conformité et apporter plus de valeur ajoutée », souligne Thomas Honegger qui positionne d’ailleurs Esker comme un ERP du document sans la comptabilité. Et bien évidemment, la différence entre les plateformes se fera sur les services apportés mais pas seulement, d’autres points pourraient être déterminants dans le choix de la plateforme comme la présence internationale du fournisseur. « C’est l’une de nos forces, d’accompagner les entreprises vers d’autres régions », précise sur cet aspect Thomas Honegger. De leur côté, Laurent Leboisne, directeur France de Weexa et Malik Touimi-Benjelloun qui assure la direction marketing et communication du groupe mettent en avant la capacité de Weexa à traiter l’échange des flux depuis la source jusqu’à la cible : « De par notre expérience, nous sommes par exemple capables d’aller sourcer la donnée dans SAP et la transporter vers la PDP, tous n’offrent pas ce niveau de service. » A noter que Weexa a justement racheté EDT en 2021, déjà très impliqué dans la facture électronique. Chez Yooz, autre candidat pour devenir PDP et qui dispose déjà d’une certaine expérience dans l’automatisation des processus de facturation, la différenciation se fera, entre autres, sur l’aspect collaboratif. « Notre philosophie est de développer une communauté avec nos 100 000 entreprises clientes », précise François Lacas, CMO & Deputy COO de Yooz, sans oublier sa présence internationale (Yooz est utilisé dans 35 pays). François Lacas met aussi en avant l’importance de l’expérience utilisateur en apportant une interface simple et intuitive. « En septembre dernier, lors du congrès de l’Ordre des experts-comptables, nous avons réalisé une démonstration sous la forme d’un prototypage de notre interface. Il faut de la simplicité, n'oublions pas que les experts-comptables deviendront des coordinateurs de flux entrants et sortants. » 

Des obligations parfois contraignantes pour devenir PDP  

Pour obtenir l’immatriculation PDP de l’Etat, les opérateurs devront se soumettre à quelques obligations dont le respect de la RGPD mais surtout de la norme ISO 27001 qui est assez contraignante comme le confirme Laurent Leboisne : « Nous nous faisons d’ailleurs conseiller dans l’obtention de cette certification. » De même, une certification SecNumCloud pourrait être obligatoire sur l’infrastructure ou celle de l’hébergeur pour une gestion sécurisée des données sensibles. Thomas Honegger admet sur ce point que l’ANSSI ne sait pas encore totalement prononcer sur la ou les parties SecNumCloud, par exemple si cette certification concernera l’archivage, l’ensemble de l’infrastructure ou autre. A ce titre, et d’une manière globale, il subsiste encore quelques zones de flou autour des PDP et de la facture électronique, des questions remontent régulièrement à la FNFE (Forum National de la Facture Electronique) et à la DGFiP 

En parallèle, il faudra bien sûr respecter les processus d’authentification des utilisateurs mais aussi assurer l’interopérabilité, bien sûr avec le PPF, mais aussi avec toutes les autres PDP labellisées via des API et autres protocoles, la FNFE préconisant entre autres le réseau européen Peppol. A noter enfin que trois formats de facturation électronique sont acceptés : les formats structurés répondant à la norme européenne EN16931 (formats UBL, UNCEFACT, CII, XML…), les formats hybrides répondant à la norme européenne EN16931 associant des données structurées et un PDF lisible à l’écran, le standard franco-allemand Factur-x est le plus connu de ces formats hybrides, et enfin, les formats dits non structurés comme le PDF ou même le JPEG et autre HTML.