En plein débat sur le téléchargement de contenu illégal, l'apparition de la notion de filtrage risque de faire se dresser de nombreux cheveux sur les têtes des tenants des libertés individuelles. Car quand bien même son objectif est parfaitement légitime, le dispositif technique préconisé par le Forum des droits sur Internet pourrait tout aussi bien satisfaire les ayants droit, soucieux de protéger leurs oeuvres. Le FDI semble avoir conscience du risque de débordements que ses propositions peuvent entraîner : il propose en effet d'encadrer la mise en place de ce filtrage par une loi, afin d'en limiter la portée aux seuls sites pédopornographiques « sans extension du périmètre à d'autres contenus ». Reste à déterminer les méthodes de filtrage qui pourront être retenues. Le FDI, qui précise que les FAI pourront opter pour le dispositif de leur choix, rappelle qu'aucun mécanisme « ne se montre totalement imperméable par rapport à un éventuel contournement ». Pour Jérémie Zimmermann, co-fondateur de la Quadrature du Net, le filtrage est non seulement inefficace mais aussi « contre-productif et dangereux. Il entraînera obligatoirement des faux positifs, on va se retrouver à surfiltrer le Web, c'est un véritable danger démocratique. » A ses yeux, la solution la plus efficace consisterait à « faire en sorte que les accords de coopération internationale entre services judiciaires soient mis en oeuvre afin que soient retirés les contenus. » D'une façon plus générale, La quadrature du Net pointe du doigt la pertinence de la mission confiée au FDI : « Il est permis de s'interroger sur l'efficacité du Forum des droits sur Internet. S'il n'est qu'un instrument servant à légitimer une politique de contrôle et à cautionner la mise en place d'un dispositif répressif, on peut alors se questionner sur le bien-fondé de son existence. »