Deux semaines avant le MWC 2018, les ambitions s’affichent chez les principaux fournisseurs de technologies réseaux mobiles. Et cette année, la 5G sera une fois de plus sur le devant de la scène avec des démonstrations qui préfigurent les premiers déploiements commerciaux attendus mi-2019. Jean Varaldi, directeur général de Qualcomm France, nous a expliqué lors d’une conférence de presse à Paris, que les travaux sur la 5G avaient démarrée en 2008 et qu’elle allait être déployée de façon industrielle en 2019/2020. Partenaire de Qualcomm, Orange a, par exemple, présenté la semaine la mise à jour sa feuille de route 5G. Et les premiers déploiements commerciaux ne sont plus attendus en 2025, comme annoncé en 2016, mais en 2020 avec des expérimentations grandeurs natures en 2018 et 2019.

Fin 2017, la release 15 de la 5G NR Non Standalone (c’est à dire opérable sur les réseaux 4G) a été finalisée et Qualcomm a commencé à promouvoir ses puces modem 5G NR X50 capable d’atteindre un débit de 2 Gigabit/s sur une cellule. Une bande passante qui pourra ensuite être partagée entre les utilisateurs et même combinée avec de la 4G. Les premiers smartphones ne sont toutefois pas attendus avant la fin du premier trimestre 2019. Le fournisseur de composants teste aujourd’hui sa plateforme (logiciels et matériels) avec des appliances dédiés (des box 5G NT Baseband), des smartphones prototypes 5G NR UE (avec 16 antennes plates dans 2 cm) et des stations de base 5G NR gNodeB couplées avec des antennes multiples permettant d'améliorer l'efficacité spectrale. Le recours massif au MIMO massif augmente considérablement le débit de la cellule (voir illustration ci-dessous).

 

L’arrivée de la 5G avec son débit plus important (plusieurs gigabit/s), sa couverture plus large et sa latence réduite bénéficiera également à l’IoT et aux voitures autonomes. (crédit : Mitsubishi Electric)

« Travailler avec 19 opérateurs pour les expérimentations en laboratoire et sur le terrain peut sembler anodin mais c’est un travail industriel très important », a relevé Jean Varaldi. Ces derniers mois plusieurs tests d’interopérabilité ont été réalisés : avec ZTE en novembre 2017, avec Ericsson en décembre dernier, avec Nokia en janvier 2018 et enfin avec Huawei et Samsung plus récemment. « Nous avons réalisé des démonstrations d’interopérabilité avec les cinq acteurs majeurs », a pointé le dirigeant. « Des tests sont également programmés avec les opérateurs français (Orange, Bouygues Telecom et SFR), l’Arcep a bien travaillé pour ouvrir les fréquences nécessaires ».

Qualcomm propose déjà des prototypes de smartphone 5G pour démarrer les tests. (Crédit Qualcomm)

Nonobstant les déclarations de certains acteurs spécialisés dans les réseaux IoT bas débit, la 5G NR lorgne également vers les objets et les capteurs connectés. « Le réseau 5G est idéal pour commander des machines car le réseau WiFi n’est pas fiable. Toutes les machines pourraient être pilotées sans fil dans les usines », assure Jean Varaldi. L’Arcep compte ainsi attribuer des fréquences à des opérateurs mais également à des acteurs industriels pour des réseaux 5G privés. Les voitures autonomes pourraient également en profiter avec l’utilisation du spectre 5 à 6 GHz pour le C-V2X (Cellular Vehicle-to-Everything ). Si les véhicules haut de gamme sont équipés depuis plusieurs années de modem 4G/LTE pour remonter des données télémétriques et assurer des services à distance (comme BMW Connected), tous les constructeurs automobiles travaillent avec les fournisseurs de semi-conducteurs comme Qualcomm, Intel ou Nvidia pour comprendre et influencer leurs roadmaps composants pour l’automotive. En France, Qualcomm collabore avec Renault et Peugeot qui ont décidé de développer en interne - sans recourir à des équipementiers automobiles - leurs services C-V2X. « Nous ne sommes pas encore engagés avec les équipementiers sur ces questions, il y a un vrai sujet à dégrossir », a indiqué le dirigeant de Qualcomm. Précisons pour être complet sur le sujet que des initiatives ont aussi été engagées avec Audi et Ford sur le sujet, notamment avec sa plateforme Snapdragon 820A.

L'interaction entre les véhicules autonomes, le mobilier urbain et les équipementiers routiers est au coeur de la technologie C-V2X. (Crédit Qualcomm)

Cette conférence de presse était bien sûr l’occasion de faire le point sur l’OPA hostile lancée par Broadcom sur Qualcomm. Si ce dernier a plusieurs fois indiqué rejeter l’offre du premier, la bataille n’est pas terminée puisque Broadcom cherche aujourd’hui à obtenir la majorité simple (avec six membres sur 11) à la prochaine réunion du conseil d'administration de Qualcomm - le 6 mars 2018 - dans le cadre d'une prise de contrôle toujours hostile mais avec une transition en douceur. Pour réussir son opération, Broadcom a amassé un trésor de guerre d’une centaine de milliards de dollars, avec le concours de 12 établissements bancaires (Citigroup, BofA Merrill Lynch, J.P. Morgan, Mizuho, MUFG, SMBC, Wells Fargo, Scotiabank, BMO Capital Markets, RBC Capital Markets, Morgan Stanley, et Deutsche Bank). Une ligne de crédit supplémentaire d’un montant de 6 milliards de dollars serait également disponible auprès de plusieurs fonds d’investissement dont KKR, CVC et Silver Lake.