Entretien avec Philippe Gasc. Ce diplômé en sciences humaines occupe la fonction originale de consultant interne auprès des informaticiens au sein de la SSII Projipe. Ils les aide à progresser et à s'adapter aux contextes clients qu'ils rencontrent. Lemondeinformatique.fr : quel est votre rôle chez Projipe ? Philippe Gasc : Je propose un espace d'écoute neutre et confidentiel au sein de l'entreprise. Un lieu dans lequel les collaborateurs peuvent exprimer des difficultés, des doutes ou des souhaits sans avoir peur d'être jugés. La confidentialité est posée dès la prise de contact. C'est un principe qui est totalement respecté par la direction. Dans ce cadre, je leur apporte un accompagnement pour les aider à avancer sur la problématique posée. Je me positionne dans une relation client fournisseur, dans laquelle je suis le fournisseur. L'objectif est que la personne qui me sollicite se sente mieux par la suite. Concrètement, dans quels contextes intervenez-vous ? J'ai défini cinq actions ou services à leur intention. Le premier est associé à l'intégration du collaborateur. Je rencontre les nouvelles recrues pendant au moins deux heures pour leur exposer les principes de nos métiers afin qu'ils s'en imprègnent et pour créer une relation. Le deuxième concerne la gestion de carrières. Je les aide à faire des bilans et à élaborer des projets d'évolution professionnels lorsqu'ils le souhaitent. J'interviens aussi pour les accompagner lorsqu'ils prennent de nouvelles fonctions et qu'ils rencontrent des difficultés. Je propose enfin une prestation pour préparer les entretiens avec les clients, en sessions individuelles ou en groupe. Nous travaillons au développement d'une communication positive et attractive vis à vis du client. Je peux aussi être amené à gérer des cas particuliers. Dans tous les cas, le contenu de ma prestation est adaptée en fonction du ressenti et de la demande du collaborateur. Pourriez-vous donner un exemple de mission de conseil? Je peux évoquer le cas d'une personne qui venait d'évoluer vers des fonctions de conseil, après avoir travaillé dans l'assistance à maîtrise d'ouvrage. Elle s'est retrouvée dans un contexte client qu'elle vivait mal, jugé peu organisé et avec beaucoup de pression venant d'interlocuteurs qui n'étaient forcément ses responsables. Cette personne était paniquée et avait besoin d'aide. Mon travail a d'abord été d'accueillir sa demande pour lui procurer un soulagement, d'établir un dialogue en replaçant la fonction de consultant dans sa réalité, puis de voir ce que le client avait dit. A l'issue de ce travail, nous avons mis en évidence que le client n'avait formulé aucune plainte et qu'il n'y avait pas de raison pour que le consultant ait peur d'être mal jugé. Cela a permis de lever l'anxiété et de commencer à prendre du recul sur la situation. L'angoisse peut entraîner de la confusion, une remise en question de ses compétences et sa valeur et des blocages. Mon travail est notamment d'aider à ce que cette émotion disparaisse. Le consultant peut ensuite raisonner sur ce qui le dérange, se réapproprier la situation et définir un plan d'action structuré. Le côté professionnel reprend le dessus. Je l'accompagne ensuite dans la mise en place du plan d'action. Pouvez-vous intervenir à la demande d'un responsable opérationnel? Dans ce cas, comment assurer le consultant qu'il peut vous aborder en toute confiance ? Oui je peux être sollicité lorsque le manager souhaite faire faire un point de suivi à son collaborateur dans un contexte décorrélé de l'opérationnel, suite à un malaise perçu, une démotivation passagère, ou une situation conflictuelle chez un client par exemple. Dans ces cas là, il a en général prévenu le consultant et m'a présenté comme voie de solution, ce qui est déjà rassurant. Lorsque je prend contact avec lui, je lui précise aussi qu'il n y a pas d'obligation et que mon rôle n'a rien de formel, ce n'est qu'un service. La règle de confidentialité s'applique par ailleurs, même pour l'existence de l'entretien si cela est souhaité. En général, les gens viennent, ce qui leur permet de se libérer en parlant. Nous pouvons ensuite identifier les points de dérives dans la relation client. Comment est mesuré l'impact de votre poste ? Je sais qu'entre 2001 et 2004 pendant une période difficile, le taux de réussite aux entretiens avec les clients s'est accru, ce qui a été bénéfique pour tout le monde. Mon intervention a parfois permis, par ailleurs, que des personnes poursuivent leur mission au lieu d'en sortir. Globalement, il faut comprendre que donner la possibilité à des personnes de dire qu'elles ne se sentent pas bien et de décortiquer des situations sans peur du jugement a un impact énorme en terme de créations de liens et de cohésion interne. Par ailleurs, dans toutes les missions, les problématiques relationnelles et humaines sont aussi importantes que les questions opérationnelles. Mon poste contribue à la qualité de vie dans l'entreprise. Il vise à fidéliser nos collaborateurs. Tout le monde y gagne et la direction me laisse faire, ce qui prouve que ce travail doit être efficace, même si son impact est difficile à mesurer.