Dans un billet de blog, Daniel Eran Dilger, du site RoughlyDrafted Magazine, émet un avis assez proche. « Google copie toute idée originale qu'il peut trouver, à l'instar d'une énorme éponge d'informations, aspirant les modèles économiques et les créations innovantes afin de les dupliquer à sa façon, souvent avec peu de succès », écrit-il. « Google est le plus grand voleur d'informations, il se conduit comme un rouleau compresseur pour ses partenaires, pour les créateurs de contenus et ses concurrents, au nom de son concept du progrès en marche, et il justifie ce qu'il fait en expliquant qu'il s'agit d'un « remix » d'idées proposé gratuitement. Tout cela est très bien si vous ne vous mettez pas à vous plaindre de voir des gens prendre l'information que vous proposez, sans autorisation, de façon publique, « remixer » à leur tour cette information. »

Google pave-t-il la voie pour d'autres plaignants

D'autres observateurs du débat ont plus de mal à établir un parallèle direct entre l'époque où Google a été accusé de copie et l'incident de cette semaine. « Bien qu'il y ait des points communs, je pense que la situation est un peu différente. Dans les cas invoqués [Books, Google News et YouTube], Google ne copiait pas un concurrent pour le combattre, estime de son côté Ray Valdes, du Gartner, dans un e-mail adressé à nos confrères d'IDG News Service.

Eric Goldman, professeur de droit associé à l'Université de Santa Clara, fait remarquer que Google n'a apparemment pas prévu de faire un procès à Microsoft. « Il semble qu'il vienne de réaliser qu'en affaires, c'est de bonne guerre pour des sociétés de copier leurs concurrents, aussi longtemps que ce qui est copié n'est pas protégé par copyright, marque déposée, brevets ou par d'autres moyens légaux », souligne-t-il. Selon lui, Google pourrait ainsi ouvrir la voie pour d'autres récriminations, voire procès d'utilisateurs à l'encontre de Microsoft pour violation de la vie privée. Google a indiqué qu'il croyait que l'éditeur de Windows récupérait les requêtes d'utilisateurs par l'intermédiaire de son navigateur Internet Explorer et de la barre d'outils de son moteur de recherche Bing. Accusations également contestées par Microsoft.

Finalement, Eric Goldman voit cet éclat comme le dernier épisode d'une série d'affrontements publics entre les deux entreprises. « Ils cherchent toutes les occasions pour s'épingler ». Coïncidence ou pas, la controverse est apparue le jour même d'un événement sur la recherche sponsorisé par Microsoft, par le biais d'un article exclusif sur le blog Search Engine Land, qui s'est trouvé renseigné par Google sur ces allégations. Matt Cutts, ingénieur chez Google, a mis le problème sur le tapis durant une table ronde à laquelle il participait pendant cet événement, engageant une rixe verbale avec Harry Shum, vice président chez Microsoft.

Sur le terrain de la recherche aussi, Google a emprunté

Parmi les observateurs, certains rappellent que, sur le terrain spécifique de la recherche, Google lui-même a été accusé de copier certaines fonctionnalités sur des concurrents, incluant Bing et Ask.com. Interrogé par téléphone, l'analyste métier Greg Sterling, de Sterling Market Intelligence, considère que « Google a certainement emprunté à d'autres. Je ne dirais pas qu'il a volé, mais il a quelquefois lourdement emprunté ». Il n'est pas le seul à l'avoir fait, dans le secteur des moteurs de recherche où « chacun surveille largement la concurrence et où on duplique des choses qui sont perçues comme étant les meilleures pratiques et des fonctions intéressantes », a ajouté Greg Sterling.

D'ailleurs, en se défendant lorsqu'on l'a attaqué de numériser et d'indexer des livres sans avoir demandé la permission à leurs auteurs, Google s'est aussi appuyé sur le principe d'une utilisation équitable (« fair use »), qui autoriserait l'utilisation non autorisé d'éléments protégés par copyright dans certaines circonstances et limites. « Google a bénéficié d'une interprétation généreuse de cette utilisation, rappelle Greg Sterling. Il y a sans nul doute une certaine ironie du sort ici lorsque Google se plaint d'être copié par quelqu'un ». Contacté par nos confrères d'IDG News Service, Google n'a pas commenté cette affaire.