"La France doit faire le choix de soutenir enfin ses universités pour se donner une chance de rester un pays qui compte dans le concert des nations." Ces mots ouvrent le rapport de la CPU (Conférence des Présidents d'Université), avec une pique qui n'aura échappé à aucun observateur : "enfin" semble nuancer fortement le travail des ministres qui se sont succédés à la tête de l'Enseignement supérieur. Puis, avant de détailler 20 propositions, la CPU rappelle 4 missions indissociables des universités : - la recherche (fondamentale et finalisée). "L'université est et doit rester la référence et l'opérateur majeur de la recherche. Le seul véritable enseignement universitaire est celui fondé sur la recherche." - La formation générale et professionnelle. "Cette mission de formation exige de faire de l'insertion professionnelle un des objectifs majeurs des universités et de réformer totalement l'accueil et le suivi des étudiants." - La valorisation économique et sociale au plus près du territoire. "L'université doit pouvoir être un acteur majeur de l'émergence des PME innovantes dont notre pays a cruellement besoin." - L'internationalisation et la contribution au rayonnement et à l'attractivité de la France. "Un contrat individuel de réussite" et une majoration des droits d'inscription La France voudrait-elle combler son retard présumé sur les autres nations en matière de recherche ? Il y a quelques mois, le rapport Hetzel insistait sur la nécessité de rapprocher l'enseignement supérieur de l'entreprise et il y a quelques semaines, François Loos annonçait vouloir faire des Ecoles des Mines un exemple sur le plan international. Aujourd'hui, les présidents d'université font preuve d'indépendance par rapport à leurs autorités de tutelle en demandant une enveloppe budgétaire de "10 milliards d'euros pour l'ensemble des activités de l'université, notamment pour assurer une dépense globale de 12 000 € par an et par étudiant. La part de l'Etat doit rester prépondérante dans ce financement." Mais ils font également preuve d'une réflexion à l'égard du système ambiant, en demandant "une majoration et une modulation des droits d'inscription accompagnée d'une révision globale du système d'aides aux étudiants", et la mise en oeuvre d'un contrat individualisé de réussite (CIR) pour chaque étudiant. Une revalorisation de la licence La CPU demande la revalorisation de la licence pour qu'elle devienne "la référence d'un post-bac réorganisé assurant une réelle égalité des chances." Jean-François Giret, chercheur au Céreq (Centre d'études et de recherches sur les qualifications) et co-auteur de l'ouvrage Des formations pour quels emplois ? (La Découverte, 2005) a analysé le parcours de 25 000 étudiants du CAP au doctorat, sortis du système éducatif en 2001 et interrogés en 2004. Il aboutit aux mêmes conclusions que les présidents d'université : "les formations professionnelles sont très appréciées par les employeurs. Par exemple, les diplômés de DUT ont un taux de chômage de 6% comparable à celui des diplômés d'écoles d'ingénieurs. De même, la licence professionnelle confère un net avantage sur le marché du travail au niveau bac +3 : moins de 5% des jeunes qui avaient obtenu ce diplôme dans une spécialité industrielle en 2001 étaient au chômage en 2004." Reste à savoir comment les équipes pédagogiques, les étudiants, les collectivités territoriales et l'Etat parviendront à discuter de ces propositions pour transformer cette équation à plusieurs inconnues, en intégrant les jeunes au marché de l'emploi sans les priver de l'érudition, l'une des spécificités de l'université française !