Dans quel état numérique se trouve la santé ? Cette question a été débattue lors d'un débat organisé par le CPI-B2B (Club de la Presse Informatique BtoB). Pour Cécile Lagardère, manager santé chez Accenture, les technologies progressent dans ce secteur mais des freins nuisent à son développement. Pour établir ce constat, la responsable s'est appuyée sur une étude menée par la société de conseil auprès de 3 700 médecins dans 8 pays : Allemagne, Angleterrre, Australie, Canada, Espagne, Etats-Unis, France et Singapour. Le premier enseignement de cette enquête révèle que dans l'Hexagone, les médecins plébiscitent les solutions informatiques de santé et que la grande majorité (99%), déclare utiliser activement un dossier médical électronique (DME).

Les médecins interrogés dans le cadre de cette étude estiment en outre que les solutions IT dédiées à la santé présentent de nombreux avantages: une réduction des erreurs médicales (76%), un meilleur accès aux données pertinentes pour les études cliniques, une optimisation des processus de travail inter-organisations, de meilleures décisions de traitement et de diagnostic (pour 74% des sondés), ou encore une meilleure coordination des soins à travers les établissements de soins/services (70% des personnes interrogées).

Une succession d'obstacles


Pourtant, comme l'a fait remarquer Cécile Lagardère, plusieurs obstacles empêchent les technologies de se développer dans le monde médical. « En France, Il s'agit d'abord du coût de mise en place des technologies, du temps que cela  requiert, et de l'appropriation des outils » a-t-elle souligné. « Viennent ensuite la  sécurité des données, la nécessité d'une expertise technique, le manque de compétences IT pour exploiter les technologies, l'accès à l'ordinateur et l'interopérabilité des systèmes d'informations. »

Pour Claude Caselles, consultant en informatique de santé chez Capgemini,  le fait de peiner à intégrer le numérique dans le domaine de la santé, à la différence des banques, est dû à différents facteurs : « On a affaire à une collectivité médicale, réglé par un ordre en totale autonomie, à qui l'on ne peut pas imposer quoique ce soit », a-t-il déclaré. « De plus, le monde de la santé traite de données confidentielles qui ne doivent jamais se retrouver sur la place publique. En France, on est particulièrement vigilant là-dessus. Lorsqu'on parle de concentration et d'interopérabilité des données, les problèmes ne sont pas techniques, ils sont ailleurs ».

Prendre en compte l'écosystème

Le consultant considère également que le monde de la santé manque de vision systémique. « Il ne faut pas se focaliser sur le besoin exprimé par le client, il faut le comprendre et une fois qu'on l'aura compris, on devra s'intéresser à l'écosystème, c'est-à-dire aux besoins exprimés par les acteurs ayant des relations avec les  clients, que ce soient les médecins traitants, les officines de ville ou l'assurance maladie », estime-t-il.

Pour Cyrille Roy, directeur stratégique santé chez Econocom, il existe un paradoxe entre l'univers professionnel où règnent les smartphones et le monde de la santé, où subsistent des réticences en matière de technologie pour cause de confidentialité des données ou d'interopérabilité. « On a su remplacer la TV par  l'écran interactif », a-t-il également rappelé. « Le terminal patient était en vogue il y a 5 ans.  Un moniteur permettait de consulter les données médicales, mais la solution a finalement échoué car l'ERP ne convenait pas à la taille de l'écran. La problématique se situe au niveau de l'application et de l'équipement qui va devoir l'intégrer. »