« Le Web, c'est le coma éthylique assuré ! », assène Umberto Eco, l'écrivain et sémiologue (*) italien, dans l'interview qu'il accorde cette semaine à l'hebdomadaire culturel Télérama (n°3117 du 10 au 16 octobre 2009). Evoquant la programmation que l'intellectuel italien a conçue au Louvre sur le thème du « Vertige de la liste », la journaliste Catherine Portevin lui rappelle qu'il a écrit « que le Web, ce grand catalogue, offre justement le vertige le plus mystique et le plus virtuel ». Eco Umberto confirme. Le Web est bien le catalogue « le plus affolant, le plus dramatique ». Et d'expliquer : « C'est la différence entre le doux vertige que donnent deux verres de whisky et celui que procurent deux bouteilles de whisky. Le Web, c'est le coma éthylique assuré ! ». « La culture est une chose qui se partage, se discute », souligne également l'érudit transalpin en rappelant qu' « une des grandes fonctions de la culture est d'imposer un savoir partagé par tous », ce qui ne veut pas dire immuabilité de ces connaissances. « Il existe une sorte de 'Larousse' encyclopédique admis par tout le monde », plus fourni chez l'homme de 70 ans que chez le jeune de 25 ans. « Internet peut signifier à terme la mise en miettes de ce 'Larousse' commun au profit de six milliards d'encyclopédies, chaque individu se construisant la sienne », confie encore le romancier à notre consoeur de Télérama. Quant à l'importance prise par Internet et par la numérisation des écrits, elle ne préfigure en rien, pour le romancier, la disparition du livre. L'e-book, rappelle-t-il, cherche à imiter le livre, mais ne peut l'égaler. « Le livre papier est autonome, alors que l'e-book est un outil dépendant » ... de sa batterie, de l'électricité, de la nature des matériaux qui le compose (quelle pérennité a-t-il ?), de sa fragilité... Jeté du cinquième étage, il résistera moins qu'un livre en papier, plaisante Umberto Eco. (*) la sémiologie est la science qui étudie les systèmes de communication par signes dans la société.