Les élections américaines, qui se sont tenues le 7 novembre dernier, sont loin d'avoir levé toutes les incertitudes planant sur le vote électronique. Pour la première fois, l'usage des machines à voter électroniques s'est effectué à grande échelle et le moins que l'on puisse dire est que cela ne s'est pas fait sans souci. Pannes au démarrage et problèmes de "vote flipping" [le candidat sélectionné n'est pas celui que valide la machine] ont causé des problèmes dans de nombreux districts. Les questions sur l'audit des résultats restent de plus largement sans réponse. Selon les experts, environ 39% des votes se sont effectués sur des machines électroniques, pour la plupart des systèmes à écrans tactiles. Un certain nombre de problèmes sont apparus dès les premières heures du vote dans le Colorado, au Texas, en Floride, dans l'Utah et en Pennsylvanie. Les comtés de Broward et Miami-Dade, qui avaient connu leur heure de honte lors de l'élection qui a porté George Bush au pouvoir, ont rapporté un curieux fonctionnement de leurs machines, connu sous le nom de vote-flipping. Dans certains cas, les électeurs ont eu à sélectionner jusqu'à 4 fois le candidat démocrate avant que la machine n'accepte leur vote au lieu d'afficher le candidat républicain. Officiellement, un problème de calibration d'écran lié à une mauvaise manipulation des opérateurs des bureaux de vote. Dans plusieurs comtés de l'Ohio et de l'Indiana, les machines ont tout simplement refusé de démarrer, obligeant dans certains cas des juges à retarder l'heure de clôture des bureaux pour permettre aux électeurs de voter. Dans un des comtés de l'Indiana, les cartes d'activation des machines avaient été mal programmées. A Denver, dans le Colorado, les électeurs ont dû patienter parfois plus de deux heures du fait de problèmes de performance avec la base de données des électeurs. Le gros point noir : l'absence de trace papier Malgré ces problèmes, aucun effondrement généralisé n'a été noté et aucune preuve d'un piratage d'une machine n'a été mise en avant. Mais pour Bruce Schneier, un expert en sécurité, CTO de Counterpane Internet Security, là n'est pas la question. Pour lui, le problème principal des machines à voter est qu'elles rendent impossible tout recomptage en cas de doute du fait de l'absence de trace papier. La solution pour Schneier : maintenir le vote papier mais recourir à des machines à lecture optique pour accélérer le comptage des votes. En cas de doute, il reste ainsi possible de procéder à un décompte manuel. Cela ne sera pas possible en Virginie, l'état pivot de l'élection sénatoriale, ou le candidat démocrate a devancé son prédécesseur républicain de 7000 voix, assurant le contrôle du Sénat aux Démocrates. Dans cet Etat, deux tiers des votes ont été enregistrés par des machines électroniques sans aucune trace papier. De ce fait, tout recomptage sera impossible alors que la loi prévoit la possibilité d'un recomptage si l'écart entre les deux candidats est inférieur à 1% du nombre de votants (ce qui est le cas). A moins d'être convaincu de l'infaillibilité et de l'inviolabilité des machines, le doute pourra donc subsister.