Comme resurgi d'un passé pas si lointain, le green IT refait surface. Portés par une prise de conscience au niveau mondial (à l'exception notable des Etats-Unis et de la Chine) lors de la COP 21 de Paris en 2015, les enjeux autour du changement climatique et les impacts environnementaux animent aujourd'hui les entreprises pour prendre leur part de responsabilité et tenter d'endiguer une surchauffe planétaire. Dans cette lutte, certains fournisseurs informatiques font preuve davantage d'ambitions que d'autres, et c'est notamment le cas de Microsoft. « Le changement climatique s'impose à chaque entreprise, gouvernement et citoyen », a lancé Carlo Purassanta, président de Microsoft France, à l'occasion de la conférence de rentrée de l'éditeur mercredi 29 janvier 2019 à Paris.

La firme de Redmond affiche des objectifs particulièrement élevés de réduction de son impact environnemental, à savoir atteindre une empreinte carbone négative - c'est à dire de dégager moins de CO2 à l'échelle planétaire qu'elle n'en produit - à horizon 2030. Mieux encore, le groupe pense être capable à horizon plus lointain, 2050, d'éliminer toute trace de carbone émise depuis sa création en 1975. « Microsoft a un plan agressif et atteindre un bilan carbone négatif est un objectif très noble », a salué Gérald Karsanti, directeur général de SAP France, invité en plateau par Carlo Purassanta pour sceller une amitié entre les deux éditeurs de près de 30 ans, lorsque le fondateur de Microsoft, Bill Gates, et le co-fondateur de SAP, Hasso Plattner, ont signé en 1993 un partenariat stratégique autour de SAP R/3 et de Windows NT. Du côté de SAP la neutralité carbone est visée pour 2025. « En une décennie, nous avons divisé par trois nos émissions de CO2 », a complété Gérald Karsenti. 

Carlo Purassanta (Microsoft France) et Gérald Karsenti (SAP France)

Carlo Purassanta, président de Microsoft France (à droite) et Gérald Karsanti, directeur général de SAP France annoncent des efforts pour réduire l'empreinte carbone de leurs entreprises respectives. (crédit : D.F.)

La chasse aux déchets plastiques grâce à l'IA

Microsoft pense être en mesure d'alimenter en énergie renouvelable 100% de ses datacenters au niveau mondial contre 60% aujourd'hui. Pour y parvenir, le groupe investit un milliard de dollars dans un fonds destiné au développement de solutions pour limiter l'impact carbone, et également dans des opérations de boisements/reboisements massifs et de captage de CO2 dans l'air et son stockage en sous-sol. « Avec cette annonce, on lance la voie pour faire des choses de façon différente et inciter les autres acteurs à ne pas rester en retrait. Si on a la possibilité d'en faire plus que les autres et que les autres font plus que ce qu'ils voulaient faire grâce à nous, on est dans un cercle vertueux », a expliqué Carlo Purassanta. Même si les intentions sont bien réelles, la tâche s'annonce cependant rude pour Microsoft qui devrait dégager cette année près de 16 millions de tonnes de CO2, soit environ 50% de plus que les 16 millions émis par l'ensemble du secteur agricole en France d'après l'INSEE. 

A l'occasion de sa conférence de rentrée, Microsoft a par ailleurs donné la parole à des entrepreneurs plaçant l'environnement et le développement durable au coeur de leurs préoccupations. Antoine Bruge, responsable projet pour la Surfrider Foundation Europe, a notamment livré un aperçu des activités de son organisme qui a fait le constat que 80% des déchets plastiques qui polluent les océans proviennent des fleuves et des rivières. « L'idée est de mieux identifier les produits plastiques pour comprendre où sont les déchets pour cartographier la pollution et agir en amont », a indiqué Antoine Bruge. Pour répondre à ce besoin, la Surfrider Foundation Europe s'est alliée avec Heuritech, une start-up accélérée dans le cadre du programme AI Factory de Microsoft, qui a développé un moteur d'apprentissage dédié à la reconnaissance d'images. L'objectif est de parvenir à entrainer le modèle pour permettre à terme, la reconnaissance de 20 000 objets plastiques et détecter la pollution. D'ici 15 jours, une plateforme va être mise en ligne afin de constituer une grande base de données open source de déchets « labellisés », à laquelle pourront contribuer tout un chacun en téléchargeant des vidéos ou des clichés des déchets plastiques flottants ou stagnants.

L'agriculture aussi dans le bain de l'IA

Créée en 2017, De Nous à Vous a créé la marque « En direct des éleveurs » qui réunit sous forme de coopérative 14 exploitations laitières produisant et distribuant en circuit court plusieurs millions de litres de lait par an. « Les agriculteurs sont déjà connectés mais en matière de data pour la fiabilité et la transparence de leurs activités, tout n'est pas encore clair », a indiqué Fabrice Hégro, co-fondateur de De Nous à Vous. « L'agriculteur est bourré de data qui ne servent jamais ». Pour exploiter la montagne de données des agriculteurs, un partenariat réunissant Microsoft, Accenture et Ashoka a été mis en place pour créer une plateforme IA automatisant les recommandations aux éleveurs pour améliorer la qualité de leur lait et réduire leur empreinte carbone en optimisant la prise de décision en particulier sur la gestion des stocks. « Passer à l'IA correspond à ma génération », a indiqué un agriculteur adhérent de la coopérative. « Amener ses données tous les jours et ne pas les ranger dans les tiroirs, les rendre réutilisables est très important pour notre métier ».