Le compositeur persiste et signe. Après avoir tenté une première expérience - ratée - en 2015 avec Yacin Bahi, André Manoukian reprend la casquette du chef d’entreprise et relance sa start-up sous le nom de Muzeek. Et cette fois-ci, en collaboration avec l’entrepreneur Philippe Guillaud, qui occupe le poste de COO de l’entreprise. Les deux associés se sont rencontrés en 2017 aux Etats-Unis et ont décidé de recentrer l’activité de l’entreprise en France pour mieux repartir.

En faisant appel à d’anciens collaborateurs de M. Guillaud et à quelques recrutements, Muzeek réunit aujourd’hui une dizaine de personnes, se répartissant à parts égales entre musiciens, ingénieurs informatiques et commerciaux. Mais que propose-t-elle ? Un logiciel de post-production vidéo renforcée à l’intelligence artificielle pour générer automatiquement une musique originale sur une vidéo à partir d’arrangements originaux. L’interface en mode SaaS se présente comme un logiciel de montage traditionnel. L’utilisateur y charge sa vidéo et peut générer sa musique en définissant le moment le plus fort de la vidéo, l’émotion véhiculée, le style de musique souhaité. Sur ces indications, les algorithmes puisent dans la base de données de Muzeek pour générer plusieurs propositions en quelques secondes.

100 arrangements = 30 000 mélodies possibles

Philippe Guillaud dirige l'activité de la start-up Muzeek. (Crédit : Nicolas Certes)

Cette base de données est pour l’instant composée de 80 arrangements qui permettent de générer 25 000 musiques. Mais la start-up compte bien continuer de l’alimenter en créant une centaine d’arrangements par an (qui permettront de proposer 30 000 mélodies différentes). Et ceci dans chaque pays où elle sera présente, en faisant notamment appel à des écoles de musique locales, dont les étudiants participants toucheront des droits par le biais de la Sacem. Mais Muzeek vient également de signer un accord avec l’éditeur musical Cristal Publishing pour augmenter la taille de son catalogue et est en discussions avec Universal et Sony.

Côté technologie, Muzeek s’appuie sur différents frameworks en fonction des techniques d’IA utilisées. La start-up jongle entre Tensorflow, Keras et CoreML d’Apple qu’elle utilise davantage car ce modèle est plus portable. Tous ces outils sont mis en application pour développer des algorithmes d’analyse d’images pour détecter l’environnement général de la vidéo (et générer des métadonnées), d’analyse audio avec un système de dissociation du son et de l’image et de détection de voix pour repérer différents interlocuteurs et ainsi aider le système de speech-to-text à générer des sous-titres. Muzeek travaille également sur des plug-ins pour s'intégrer à des solutions existantes (Premiere Pro, Final Cut, Logic Pro, etc.).

Une prochaine levée de fonds pour s’internationaliser

(Crédit :Muzeek)

La clientèle principalement visée et intéressée s’oriente vers les médias et sociétés réalisant des vidéos virales à la manière de Brut. Si ce dernier n’a pas encore fait appel à la solution de la start-up d’André Manoukian, Muzeek compte déjà une dizaine de clients, dont Loopsider, MylittleParis ou le cabinet de conseil Onepoint. Des discussions sont en cours avec des chaînes de télévision françaises. Trois types d’abonnements au mois et par utilisateur sont proposés en fonction du nombre de musiques utilisées et du nombre d’heures de sous-titres exportés. Le format est bien adapté aux utilisateurs seuls également, comme les Youtubeurs, qui seront moins gênés par la directive européenne sur le droit d’auteur par la même occasion. Philippe Guillaud indique que, depuis janvier cette année, plus de 500 utilisateurs utilisent chaque mois la plateforme et qu'ils ont produit 7 000 musiques.

Après une première levée de fonds de 1,2 M€ auprès du fonds parisien OneRagtime en janvier 2018, Muzeek prépare un tour de table série A pour pouvoir se développer à l’international. L’entreprise va d’ailleurs ouvrir en septembre prochain un bureau commercial à Los Angeles et recruter deux personnes qui viendront épauler Philippe Guillaud sur place. Un profil senior en mesure d’interagir avec l’industrie du cinéma et un profil plus technique en ingénierie son et musique sont recherchés. Début 2020, d’autres bureaux, axés sur la musique, devraient ouvrir en Europe : à Valence (Espagne), Londres et Berlin.