Les technologies d'intelligence artificielle, et leurs récentes évolutions vers des technologies dites « génératives » étaient à l'honneur lors du Google Cloud Summit Paris 2023, organisé le 29 juin 2023 à la Maison de la Mutualité, à Paris. En présence de Thomas Kurian, PDG de l'hyperscaler, plusieurs clients français se sont succédé sur scène pour partager leur vision de ces évolutions technologiques. Parmi eux, Carrefour, Renault, Veolia ou encore la start-up PhotoRoom.

Évoquant l'IA générative, Luc Julia, directeur scientifique chez Renault, tout comme Julien Largilliere, CTO de Veolia, considèrent tous deux qu'il s'agit davantage d'une évolution que d'une révolution. Le vrai changement introduit par les récents outils ne réside pas tant dans les technologies d'IA en elles-mêmes, mais dans leur démocratisation. Élodie Perthuisot, directrice exécutive e-commerce, données et transformation digitale chez Carrefour, l'a illustré en prenant en exemple son secteur de la grande distribution. « Notre métier est de vendre des pommes de terre. A priori, une activité très éloignée de l'IA. Le lien s'effectue à travers nos clients. Leur vrai problème, c'est de savoir ce qu'ils vont faire à manger à leur famille, avec le budget dont ils disposent. Cela devient intéressant quand on peut poser cette question à l'IA. Et aujourd'hui, on peut poser la question telle quelle, et recevoir une réponse. C'est la première fois que nous avons une réponse directe au problème des clients. » Et pour la directrice exécutive, les premiers cas d'usage étudiés ou déployés aujourd'hui ne font qu'effleurer la surface des possibilités. Un avis partagé par Matthieu Rouif, co-fondateur et CEO de PhotoRoom, une application pour retoucher et modifier facilement les fonds des photos.

Une IA de plus en plus accessible

Julien Largilliere, CTO de Veolia, observe une évolution des demandes métiers, vers davantage de prédictif. (crédit : D.R.)

Pour Julien Largilliere, la nouveauté réside avant tout dans le fait que les technologies d'IA sont devenues accessibles. Veolia utilise déjà des technologies d'IA pour la maintenance prédictive de ses installations ou de ses flottes de camions, pour la détection et la mesure des fuites dans les canalisations, ou encore des algorithmes de vision assistée par ordinateur pour la qualification de déchets solides sur les chaînes de tri. Mais l'IA générative et ses interfaces conversationnelles vont permettre de répondre plus facilement à des exigences métiers qui ont fortement évolué, et qui continuent de le faire. « Il y a quelque temps, les métiers venaient avec des cas d'usage axés sur l'immédiateté et la justesse, avec la fourniture de données en temps réel. Désormais, la demande s'oriente vers le prédictif. C'est là que tous les modèles de machine learning, de deep learning et d'IA générative sont de plus en plus intéressants », estime le directeur technique. Veolia a, par exemple, développé une solution basée sur de l'apprentissage machine pour mesurer l'efficience énergétique de différentes installations et en détecter les dérives de consommation. « Demain, nous demanderons peut-être en langage naturel quel peut être mon plan de décarbonation sur cette installation, ou comment baisser ma consommation en 2 ou 3 mois. »

Chez Renault, l'IA intervient depuis longtemps dans tous les processus liés à la conception d'une voiture, du design aux usines, notamment à travers les solutions de maintenance prédictive, et ces technologies sont également embarquées dans les voitures elles-mêmes, pour améliorer la perception de l'environnement ou la performance. Mais Luc Julia observe aussi une ouverture vers des fonctions de support et des usages à première vue moins évidents. « L'IA peut servir à créer ou traduire la documentation, à contractualiser, à concevoir la publicité des produits... Aujourd'hui, chaque métier dans le groupe peut être concerné, et est concerné par l'IA. »

Pouvoir passer à l'échelle

Élodie Perthuisot, directrice exécutive e-commerce, données et transformation digitale chez Carrefour, pointe l'importance de pouvoir passer à l'échelle sur l'IA. (crédit : D.R.)

La généralisation des usages de l'IA s'accompagne néanmoins d'un certain nombre d'enjeux. Chez Carrefour, Élodie Perthuisot souligne notamment la nécessité de passer à l'échelle, rapidement et de façon optimisée, notamment en termes de coûts. Un aspect important dans un secteur où les marges nécessitent de très gros volumes de produits vendus. « Si on me propose une nouvelle solution pour le marketing, mon besoin n'est pas de lancer une campagne très peaufinée dans un coin, mais de pouvoir en lancer des centaines chaque jour », décrit Élodie Perthuisot. D'où son choix de s'appuyer sur des partenaires, dont Google Cloud, auquel elle fait confiance pour avancer et concrétiser rapidement les idées. PhotoRoom a également rencontré ce besoin de passer à l'échelle, qui a conduit l'entreprise à s'appuyer sur Google. « Nous pouvons désormais proposer des retouches de photos par lots, en conservant la cohérence entre tous les visuels », confie Matthieu Rouif, qui revendique aujourd'hui dix millions d'utilisateurs de son application.

Pour Luc Julia, même dans des entreprises où l'IA est déjà omniprésente, les évolutions rapides du domaine obligent à apprendre sans cesse. « C'est le gros défi. Il faut que chacun apprenne, comprenne ce que ces outils vont lui apporter. » De son côté, Julien Largilliere souligne plus particulièrement deux aspects : d'une part, il rappelle le besoin de cadrer ce virage vers l'IA, notamment par rapport aux questions de protection des données personnelles et sensibles. Par ailleurs, si Veolia a déjà identifié une centaine de cas d'usages autour des IA génératives, il faut désormais les prioriser, via des ateliers avec les métiers, et aussi veiller à la dimension durable, un focus important au sein du groupe spécialisé dans l'énergie, l'eau et le traitement des déchets.