Après avoir multiplié les mises en garde et autres avertissements sans frais, la Commission européenne a décidé d'agir pour encadrer les tarifs pratiqués par les opérateurs sur le roaming, c'est-à-dire les appels passés ou reçus sur un téléphone portables depuis l'étranger. L'initiative est doublement importante : elle devrait concerner plus de 140 millions de voyageurs européens et tend à réguler un secteur dans lequel les prix pratiqués sont quatre fois supérieurs que les tarifs nationaux. L'UFC Que Choisir indiquait encore récemment que les marges appliquées par les opérateurs atteignent 80 % et que les trois opérateurs mobiles français ont engrangé 735 M€ de revenu en 2004 grâce aux tarifs appliqués aux touristes étrangers en voyage en France. Forte de ces données, et après quelques coups de semonce, la Commission européenne indiquait, en mai 2006, qu'elle se fixait pour objectif la suppression pure et simple des tarifs d'itinérance. Une intention évidemment mal acceptée par les opérateurs européens qui scrutent d'un mauvais oeil toute initiative visant à amputer une partie du marché de 8,5 Md€ dont ils jouissent allégrement. Soucieux de séduire et rassurer l'exécutif européen, ils se fendaient, en juin, d'une déclaration d'intention sur la baisse de leurs prix. La Commission n'a toutefois pas été émue par l'apparente bonne volonté des acteurs mobiles et, face à des tarifs d'itinérance cinq fois supérieurs au coût réel de la prestation, vient d'accoucher d'une proposition de règlement. S'il n'est plus question de supprimer purement et simplement les tarifs de roaming, la Commission entend les encadrer strictement. Le texte présenté par Viviane Reding, la commissaire à la société de l'information, et Juan Manuel Barroso, le président de la Commission, s'attaque à la fois aux tarifs de gros, pratiqué entre opérateurs, et à ceux de détail, applicables aux consommateurs. En ce qui concerne les tarifs de gros, l'organe exécutif communautaire propose un plafonnement se basant sur les prix de connexion d'appels mobiles à partir d'autres réseaux nationaux. Les opérateurs seraient ensuite autorisés à appliquer une marge de 30 % à ces tarifs pour déterminer le niveau de facturation de détail. Selon l'UFC Que Choisir, un Français en déplacement en Europe ne paierait plus que 0,49 € par minute pour un appel passé vers un autre pays européen, contre un euro actuellement. S'il émet dans le pays visité, la facture ne dépasserait pas 0,33 €, contre un euro. Enfin, s'il reçoit un appel, il ne paierait que 0,165 €, contre 0,35 à 0,47 € aujourd'hui. Au final, les consommateurs économiseraient, d'après les estimations de la Commission, près de 5 Md€ par an pour un volume de communication inchangé. Les opérateurs, de leur côté, seraient toujours en mesure de mener une activité génératrice de marge. Pour autant, ils ne goûtent guère l'initiative de la Commission. Par la voix de la GSM Association, ils rappellent qu'ils ont largement réduit leurs tarifs d'itinérance depuis le début de l'année 2006 et estiment que la régulation proposée nuirait à la fois au marché et aux consommateurs. Le règlement, s'il est adopté, serait applicable immédiatement pour les tarifs de gros. Six mois plus tard, les dispositions relatives aux prix de détails seraient à leur tour mises en place. Il reste maintenant au Parlement européen et au Conseil des ministres de l'UE à se pencher sur le sujet. Rappelons qu'un règlement, à la différence d'une directive européenne, est d'applicabilité immédiate dans les Etats membres et qu'il ne nécessite pas de transposition dans les législations nationales. Autre rappel utile : rien ne changera pour les touristes cet été.