L'Internet Society France, Alain Benichou, président d'IBM France ou encore Guy Mamou-Mani, président du Syntec Numérique, nous ont fait part de leur étonnement suite à l'installation du CNN par Nicolas Sarkozy le 27 avril dernier. Dans un communiqué l'Internet Society « s'étonne que la composition du Conseil National du Numérique ne la reflète pas totalement » et interpelle le pouvoir en place avec deux questions fort pertinentes : « Que serait Internet sans la communauté technique qui le fait sans cesse évoluer et que serait Internet sans les utilisateurs qui y tissent les liens qui préfigurent les usages de demain ? »

Parmi les grands absents de ce « machin » numérique, citons les membres de la société civile, les élus, les associations de consommateurs, du monde du Libre (pourquoi pas de représentant de l'April), de certains pôles de compétitivité (Cap Digital) ou encore de l'industrie IT (constructeurs, SSII...).

Une vision du numérique limitée à Internet

Président du Syntec Numérique, Guy Mamou-Mani se félicite pour commencer de la création du CNN : « il faut remettre le numérique au centre de l'économie et de la transformation de l'Etat, mais en même temps les nominations ne correspondent pas au contexte général ». Après le déjeuner des blogueurs à l'Élysée, le président du Syntec Numérique avait été catastrophé par le casting des invités conviés à débattre du numérique en France. L'angle choisi lors de ce lunch était l'Internet politique en France et pas du tout celui de l'économie et de la modernisation de l'Etat. « J'ai bien peur que le Président ait une vision du numérique qui se limite à Internet. Il est intéressé par l'Internet des marchands, pas par notre business. [...] Nous avons réussi à avoir un représentant au CNN [Bruno Vanryb, PDG d'Avanquest Software et président du collège Éditeurs de logiciels du Syntec Numérique, NDLR] alors que j'en attendais quatre ou cinq. Pourquoi Vanryb et pas les autres ?  Le Président n'a pas compris que les SSII et les intégrateurs faisaient du numérique. Cela confirme bien que la vision du numérique est partielle en France. » Pour autant, Guy Mamou-Mani ne veut pas être totalement négatif : « Il faut porter notre voix [...] J'ai ainsi invité le Président à visiter une des entreprises du Syntec et il a accepté. On a progressé, il faut continuer ».

Un candidat très décalé

D'autres voix, comme celle d'Alain Benichou, se font également l'écho de cette incompréhension du pouvoir politique. Le patron d'IBM France et son équipe s'estiment ainsi être un acteur important du numérique et s'étonnent de la présence au sein du CNN de "certains géants générant moins de marge qu'un carnet de timbres [voir la liste des fameux membres pour comprendre NDLR]." La publication des membres du récent Conseil National du Numérique a également laissé pantois le président d'IBM France. Pour développer l'industrie numérique, Alain Benichou propose d'opérer dans un environnement supportant moins de contraintes régaliennes et d'impulser l'économie numérique par le haut - c'est-à-dire en commençant par l'Etat avec un grand projet de dématérialisation.

Dernier gag suite à la nomination du CNN. Les membres devaient élire leur président, et le candidat qui a failli être élu - suite à une campagne très dynamique - n'est autre qu'un entrepreneur haut en couleur spécialisé à l'origine dans les sites de charmes sur Internet. Finalement devant le tollé annoncé, les membres ont fini par se rallier à un candidat moins sulfureux, Gilles Babinet. Un CNN né sous de mauvais auspices donc même si le Président de la République ne s'est pas interdit d'étoffer l'équipe dans les prochains mois.

 

Crédit photo : L. Blevennec/elysee.fr