Pour Vade Secure et ses logiciels de protection de la messagerie contre les cybermenaces, l’odyssée américaine engagée il y a plusieurs années entre dans une phase stratégique. L’éditeur français qui utilise l’intelligence artificielle pour agir pro-activement contre le phishing et les malwares vient de lever 70 M€ en signant un accord d’investissement avec le fonds américain de capital développement General Catalyst. Avec l’arrivée de ce dernier au capital, Georges Lotigier, le PDG de Vade Secure et principal actionnaire jusque-là n’est plus majoritaire, pas plus que l’ensemble des co-fondateurs. Vade Secure « s’américanise pas mal », reconnaît le dirigeant, qui a également co-créé les sociétés OpenIO et Scalair. « Effectivement, le pool d’investisseurs devient majoritaire avec General Catalyst, cela change la donne, mais c’est fréquent dans ce genre d’opérations et la gouvernance est bien répartie », nous a-t-il exposé. « Vade Secure reste une entreprise française et je reste à sa tête, de même que les actionnaires actuels ».  

Avec cet apport de fonds, la société veut accélérer son expansion mondiale en se focalisant sur son offre aux clients professionnels commercialisée à travers des fournisseurs de services managés (MSP). L’investissement reçu servira aussi à faire évoluer les capacités d’apprentissage automatique de sa technologie de détection des menaces, de même que sa solution de sécurité des emails nativement conçue Office 365. Il y a moins de deux ans, Vade Secure avait levé 10 M€ auprès d'Isai pour développer cette adaptation à la suite bureautique de Microsoft et pour se développer au Japon et aux Etats-Unis où la société (alors dénommée Vade Retro) avait déjà ouvert une filiale plusieurs années auparavant.

L'une des licornes françaises dans 4 à 5 ans

Vade Secure évolue sur un marché porteur, l’email continuant d’être le vecteur d’attaque numéro 1 pour les tentatives de phishing, spear phishing, malware et ransomware dans le monde, rappelle-t-il. Ses logiciels s’adressent tout autant aux PME qu’aux grandes entreprises et ils protègent actuellement « plus d’un demi-milliard de boîtes de messagerie auprès de plus de 5 000 clients à travers le monde », affiche l'éditeur français basé à Hem, près de Lille. Parmi ces utilisateurs, la société compte des opérateurs de télécommunications et des OEM tels que Comcast, Orange, BT Group, Softbank, Fujitsu Cloud Services, NTT Comm, Telstra et Cisco.

« Nous continuons à investir très fortement et à faire prendre des risques à l’entreprise et ce n’est pas forcément dans la culture des fonds européens pour lesquels il faut plutôt stabiliser. Mais ce n’est pas comme cela que l’on devient leader sur des marchés IT dont la durée de vie est courte et que l'on passe de quelques dizaines de millions d'euros à quelques centaines de millions d'euros. Culturellement, c’est très différent aux Etats-Unis », déchiffre Georges Lotigier pour expliquer le choix du fonds américain. Au passage, certains actionnaires de Vade Secure en ont profité pour faire un peu de « cash out ». Cela non plus n’est pas fréquent en France alors que ça l’est outre-Atlantique, rappelle le PDG. Pour être audacieux, il faut avoir l’impression que l’on n’a pas trop à perdre et donc pouvoir réaliser de la plus-value, ajoute-t-il. L’intention de Vade Secure est maintenant d’entrer dans une phase de rentabilité et de croissance. « La société est très saine dans sa structure », affirme Georges Lotigier. « Notre entreprise investit le plus possible pour aller potentiellement vers l’IPO. Notre objectif est de devenir l’une des licornes françaises dans 4 à 5 ans ».

Un conseil d'administration renouvelé

Avec l’arrivée de General Catalyst, le conseil d’administration de Vade Secure accueillera bientôt Paul Sagan, investisseur du fonds et ex-CEO d’Akamai Technologies, Matthew Brennan, Austin McChord, fondateur de Datto (revendu à Vista Equity Partners). Par ailleurs, Stephan Dietrich, co-fondateur de l'éditeur français Neolane, spécialisé dans l'email marketing et racheté par Adobe en 2013, actuel membre du conseil d’administration de Vade Secure, va co-investir aux côtés de General Catalyst.