La majorité des projets d’IA s’arrêtent au stade du POC faute d’un véritable socle d’industrialisation. Plusieurs facteurs se combinent : dette data et jeux de données mal structurées, absence de SLO (objectif de niveau de service), manque de MLOps et faible adoption par les collaborateurs. Autant d’obstacles qui empêchent les projets d’évoluer vers une véritable production.
Pour lever ces freins, Dell Technologies et SCC France proposent, dans le cadre de la Dell IA Factory, une plateforme validée et prête à l’emploi. Basée sur un environnement Kubernetes/OpenShift AI, elle intègre les briques clés du cycle MLOps : ordonnancement GPU (Run:AI, ClearML), serving de modèles (Triton, KServe), registry et observabilité complète. Ce socle s’appuie sur les infrastructures Dell éprouvées (PowerEdge, PowerScale, PowerFlex) associées à la solution de protection PowerProtect. En moins de huit semaines, un MVP en production limitée peut être livré, incluant les SLO, la sécurité et une évaluation continue des performances (drift, robustesse, coûts).
Les cas d’usage (RAG documentaire, computer vision, NLP) s’enchaînent ensuite sans refonte grâce à un scale horizontal maîtrisé, conforme aux exigences de souveraineté et de l’AI Act. Le résultat est une adoption mesurable, des coûts maîtrisés et un time-to-value significativement accéléré.
Pour mieux comprendre ces enjeux et la méthodologie d’accompagnement, Noham Medyouni, Enterprise Architect chez Dell, et William Saadi, CTO de la division Enterprise Solutions de SCC France, détaillent ce qu’est le framework de la Dell IA Factory.
Le Monde Informatique : Pourquoi tant de projets IA échouent et comment éviter cela ?
Noham Medyouni : « De nombreuses analyses, notamment celles de Gartner et d'autres cabinets, estiment que près de 80 % des projets d’IA échouent. Pourquoi ? Parce que les POC (Proof of Concept) ne sont pas menés jusqu’à leur déploiement opérationnel. Trop souvent, ils restent à l’état d’expérimentation, sans passer le cap de l’industrialisation ni répondre aux enjeux d’adoption, de gouvernance ou de valeur métier.
La meilleure approche consiste à sélectionner des cas d’usage simples, faciles à démontrer auprès de la direction. En effet, celle-ci exerce souvent une pression pour intégrer l’IA dans l’entreprise, sans toujours en mesurer les impacts ni anticiper les enjeux liés à son adoption par les utilisateurs. Il est donc préférable de démarrer par des projets ciblés, générant des résultats rapides — des quick wins — qui pourront ensuite être valorisés et étendus à l’échelle de l’organisation. »
Pour parer à de tels échecs, SCC et Dell proposent l’offre de la Dell IA Factory. Qu’est-ce c’est ?
NM : « La Dell IA Factory n'est ni un produit ni une solution. C'est un framework. C'est-à-dire un cadre de travail dans lequel nous allons accompagner le client dans sa roadmap pour déployer des solutions autour de l'IA.
Une fois les cas d’usage priorisés, l’objectif est de bâtir une infrastructure avec une solution qui va démarrer à faible échelle. Et nous allons garantir en même temps que lorsque le nombre de cas d'usage va augmenter, nous allons pouvoir scaler cette plateforme d'IA sans remettre en cause ce qui a été fait au départ. »
La Dell IA Factory, c’est donc le cadre dans lequel développer le projet IA. Vous développez un contenant, le socle technologique, mais aussi un contenu avec l’identification des cas d’usage. Comment travaillez-vous sur ce dernier point dans le cadre de l'accompagnement de SCC/Dell ?
Wiliam Saadi : « Le fait que la Dell IA Factory soit un cadre permet à SCC de se concentrer sur la création de contenu. En fait, il y a toujours une notion de contenant-contenu. Avoir un contenant cadré, scalable et déjà connecté avec l’écosystème permet à SCC de venir travailler sur la notion de cas d'usage avec ses clients et d'aller chercher ces quick wins. Ce que va faire SCC, c'est vraiment venir discuter avec le client. Quelle est sa problématique métier ? Comment il va pouvoir aller chercher du ROI rapidement ? »
Quel est le délai pour un premier quick win ?
WS : « Notre objectif, avec chaque client, est de bien calibrer cette phase initiale. Nous visons à identifier un premier quick win dans un délai de trois mois, voire six semaines. Au bout de trois mois, nous devons être en mesure de présenter un échantillon concret de cas d’usage.
Le gros avantage de ce fonctionnement par itération courte, c'est que nous ne sommes pas obligés de démarrer avec des investissements absolument énormes en termes d'infrastructures. Nous pouvons démarrer avec des socles technologiques raisonnables. »
Dans le socle technologique du projet IA, il y a les infrastructures mais aussi la data. Quelles sont les bonnes pratiques en la matière pour assurer la scalabilité du projet ?
WS : « Si je n'ai pas un socle data correct, je ne vais pas être capable d'avoir un socle d'IA correct. Le client a donc besoin d'un environnement standardisé parce que, sinon, il risque de se retrouver avec trop d'hétérogénéité. Il retombera alors dans les travers de l'informatique, c'est-à-dire sans portabilité ni scalabilité.
La donnée étant le nerf de la guerre pour un client, il faut que ce soit sécurisé et confidentiel. Il faut aussi que ce soit catégorisé et classifié. Pour tous ces éléments-là, il faut des stacks d'outillages qui proposent déjà ces fonctionnalités pour qu’il ne soit pas nécessaire de tout réinventer. »
Justement, est-ce qu’il y a un écosystème autour de la Dell IA Factory ?
NM : « Plusieurs partenaires contribuent activement à la Dell IA Factory, comme SCC, mais aussi des acteurs issus de l’écosystème régional et national. Parmi eux, des éditeurs spécialisés apportent leur expertise sur des cas d’usage ciblés. Par exemple, nous collaborons avec un éditeur français particulièrement compétent dans le domaine de la vision par ordinateur (computer vision), ce qui renforce notre capacité à adresser des besoins métiers concrets avec des solutions locales et souveraines. »
WS : « Il y a des liens avec des éditeurs majeurs qui portent des exécutions logicielles liées à l'IA. Cela nous permet d'aller choisir dans tout l'écosystème open source afin de réaliser plusieurs cas d'usage. Nous mettons à disposition pour cela plusieurs librairies Python, des outils de machine learning ou autour des LLM.
En ce moment, il y écart de perception sur le marché, nous parlons beaucoup de certains LLM mais il n'existe pas que ces solutions. Il y a des LLM qui sont assez miniaturisés pour pouvoir répondre à un cas précis, comme couvrir des besoins particuliers de computer vision. Il y a aussi des librairies de machine learning qui permettent de faire vraiment de la reconnaissance particulière d'images ou de syntaxe. »
En somme, SCC et Dell sont en mesure d’accompagner le déploiement de solutions IA adaptées aux premiers cas d’usage pour ensuite scaler selon les besoins ?
WS : « Avoir un modèle de LLM qui sait lui donner une recette de spaghettis mais aussi lui faire son analyse comptable, ce n'est pas du tout ce que veut le client. Il a besoin d'identifier ses cas d’usage et de voir quels sont les plus rapidement rentables. C'est là-dessus que SCC intervient avec Dell pour travailler sur le déploiement du socle, la partie contenant. Il s’agit d’un socle standard qui sera calibré pour les premiers besoins du client. SCC garantit aussi que lorsque les cas d'usage vont évoluer, ce socle sera scalable, sans devoir tout réinventer. »
NM : « La Dell IA Factory, c'est de la haute couture. À chaque fois, c'est un cadre sur-mesure sur lequel Dell va s’appuyer avec SCC pour justement déployer ces solutions pour le client. »

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